Un gouvernement pour quoi faire avec quels moyens?

Nommé le 15 février dernier au poste de Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, 43 ans, aurait terminé ses consultations. Durant une vingtaine de jours, l’ancien « DG » de la Gécamines s’est entretenu avec le personnel tant politique que socio-économique du pays. Au centre des discussions: la formation du nouveau gouvernement.

Contre toute attente, « Sama » fait déjà l’objet d’un « procès ». D’aucuns prédisent son échec avant même qu’il ait esquissé les premiers actes. Les adeptes de cette thèse citent à l’appui la modicité du budget pour l’exercice 2021. Polémique dérisoire? L’avenir tranchera. D’autres ne voient le nouveau chef du gouvernement que sous les traits d’un caudataire. Mieux, un « béni oui oui » face à un « Fatshi » hyperpuissant. Et ce suite au basculement de la majorité parlementaire en faveur de l’Union sacrée de la Nation.

L’investiture du nouvel exécutif sera un des temps forts de la rentrée parlementaire attendue le lundi 15 mars. Des observateurs impartiaux espèrent que le nouveau « Premier » aura à cœur d’innover en centrant son « discours inaugural » non pas sur un catalogue irréalisable de bonnes intentions mais sur quelques priorités. Des priorités dont les bénéficiaires devraient être en premier lieu les citoyens les plus défavorisés du corps social.

Les mêmes observateurs espèrent également que le nouveau Premier ministre va centrer l’action de son équipe sur quelques « projets réalisables » ci-après: la sécurité des personnes et des biens, la défense des frontières, l’identification et le recensement de la population, la réduction du train de vie de l’Etat, l’émission de la nouvelle carte nationale d’identité, la réforme de Commission électorale nationale indépendante, la décentralisation, le renforcement de l’efficacité et l’indépendance de la Justice, l’amélioration du climat des affaires par la lutte contre la corruption, la réforme fiscale, l’impulsion de la production par l’entretien des voies d’évacuation des produits agricoles, les soins de santé primaire pour tous, l’accès à l’eau et l’électricité. Sauf oublier l’enseignement primaire pour tous.

Des informations parcellaires laissent entendre que l’équipe gouvernementale en gestation ne compterait « qu’une » cinquantaine de membres au lieu de 65. Questions: un gouvernement éléphantesque pour quoi faire? Est-ce pour flatter les égos de quelques « amis » et autres « professionnels de la politique »? Est-ce pour « récompenser » quelques transfuges du Fcc (Front commun pour le Congo) à la mine patibulaire? Un gouvernement avec quels moyens d’action?

Depuis la nuit des temps, les Zaïro-Congolais vivent une sorte de « fièvre » à la veille de la « proclamation » de la composition d’un nouveau gouvernement. Cette fièvre collective se transforme souvent en désillusion suite à l’incapacité du nouvel exécutif à rencontrer les attentes. Le problème, les Zaïro-Congolais ont la faiblesse de mettre l’accent sur le partage des maroquins au détriment de la recherche des ressources à mobiliser.

Dans une interview accordée à Congo Indépendant en janvier 2011, François-Joseph Nzanga Mobutu, alors vice-Premier ministre en charge de l’Emploi, avait déploré l’inexistence d’un budget d’investissement dans les ministères. Ceux-ci ne recevaient qu’une « enveloppe » destinée au fonctionnement du cabinet du ministre.

Lors de l’investiture du gouvernement du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba, ce dernier avait présenté un « programme » aux allures d’un banal chapelet de bonnes intentions. S’articulant sur quinze thèmes dits « piliers ». Ceux-ci étaient divisés en 109 actions sectorielles sans que l’on parvienne à identifier les « priorités » de la nouvelle équipe. « Qui veut tout faire ne fait rien ». C’est le crédo cher à l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair qui a laissé l’image d’un grand chef de gouvernement dans son pays.

Outre cette indéfinition des priorités, le successeur de Bruno Tshibala avait perdu de vue que la politique est synonyme d’action. L’action suppose des moyens. Sans moyens, pas de résultat.

Lors de son audition devant la représentation nationale, le « Premier » Ilunga avait, à l’instar de ses prédécesseurs, « oublier » de répondre à deux questions fondamentales. Primo: combien coûte la réalisation du programme? Secundo: D’où proviendra le financement?

Osons espérer que Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge est « sous-évalué » à tort. Et que le moment venu, il pourrait « surprendre » l’opinion nationale en donnant des réponses à ces interrogations.

 

Baudouin Amba Wetshi

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