Affolé par le basculement de la majorité au sein de l’Assemblée provinciale au profit de l’USN (Union Sacrée de la Nation), le gouverneur de Tanganyika, Zoé « Kabila », réputé arrogant et distant, a trouvé la parade pour s’attirer la « sympathie populaire ». Il vient de lancer une structure chargée d’accorder des « micro-crédits » aux femmes et enfants. L’objectif avoué est de lutter contre la pauvreté. L’idée en soi est louable. Sauf que, « Zoé » voudrait défendre ses intérêts particuliers avec l’argent public.
Par arrêté daté du 9 mars 2021, le gouverneur de la province de Tanganyika, Zoé « Kabila » vient de créer un organisme chargé d’accorder des micro-crédits aux « déshérités » de cette partie du pays. La dame Marie Kongolo a été nommée coordinatrice de cette structure dénommée « Coordination des micro-crédits de la province du Tanganyika ». Celle-ci démarre avec un « capital » de 100 millions de CDF soit l’équivalent de plus ou moins 50.000 $.
S’agissant d’un projet qui, selon son initiateur, vise à « lutter contre la pauvreté », on voit mal quelqu’un jeter la première pierre sur « Monsieur le gouverneur ». Sauf qu’on cherche en vain la rubrique budgétaire d’où est tirée cette somme – que d’aucuns ne manqueront pas de qualifier de modique. Il est évident que le fonds de départ mobilisé par « Zoé » ne provient pas d’une banque. Encore moins d’une caisse d’épargne. D’où vient cet argent?
Le 18 décembre 2020, l’Inspection générale des finances (IGF) avait publié un rapport sur la gestion de la taxe dite « Go pass ». Il s’agit d’une redevance destinée à la modernisation des infrastructures aéroportuaires aux quatre coins du pays. A en croire l’IGF, la RVA (Régie des Voies Aériennes) a réalisé au cours de la période comprise entre 2015 et 2019, un montant de 124 millions $ dont 42 millions ont été affectés à l’aéroport de Kalemie, le chef-lieu de Tanganyika. On peut gager que « Zoé » joue les mécènes avec les deniers publics.
Ce gouverneur s’est découvert la vocation de « bienfaiteur » au lendemain du basculement, en ce mois de mars, de la majorité parlementaire, au profit de l’Union Sacrée de la Nation. Frère cadet de l’ex-président « Kabila », « Zoé » a toujours rechigné d’adhérer à cette doctrine lancée par le président Felix Tshisekedi Tshilombo. En guise de diversion, l’homme lance cet organisme de micro-crédit. L’objectif est de s’attirer une « sympathie populaire » factice. Et pourtant, l’homme, réputé violent et distant, n’a jamais fait mystère – à l’instar des autres membres de la fratrie – de son refus farouche de s’intégrer dans la société congolaise. Ils ont toujours vécu entre soi.
ZOE « KABILA » CHAHUTÉ PAR DES CHEFS COUTUMIERS
Après son entrée en fonction en avril 2019, le nouveau gouverneur de Tanganyika fut « chahuté » par des chefs coutumiers. Dans une lettre adressée au président Felix Tshisekedi, ces derniers ont dénoncé des spoliations, des expropriations et des pillages des ressources. « Nous vivons vraiment dans un régime de terreur à Kalemie », écrivaient-ils. Une seconde lettre de rétractation sera montée de toute pièce sans effacer l’impression laissée par la première correspondance.
Il semble bien que pour lancer des projets immobiliers, « Zoé » avait sommé plusieurs milliers d’habitants des ilots Kibizye et Bilila, situés au milieu du Lac Tanganyika, d’aller voir ailleurs. Quelle en est la motivation? D’aucuns parlent de la présence des ressources minières dont le fameux lithium. D’autres font état de l’existence d’un important gisement d’or noir en dessous du lac.
Dès le lendemain de la fin de la guerre avec le M23 en 2013, « Joseph Kabila » dont le second et dernier mandat expirait le 19 décembre 2016 ne cachait plus son ambition de faire réviser la Constitution. La loi électorale devait être reformée. Objectif: briguer un troisième mandat. Et pourquoi pas instaurer une « Présidence à vie »? En fait, la fratrie « Kabila » considère, à tort, le Congo-Kinshasa comme un « héritage » voire une « prise de guerre ».
Au mois de septembre 2016, « Zoé » qui était réputé pour son affairisme est descendu dans l’arène politique. Dans un entretien au magazine « Jeune Afrique », « Monsieur frère du Président », qui parlait sans doute « par procuration », a commencé par ces mots: « Notre père a versé son sang pour ce pays. Lorsque nous étions enfants, il nous répétait que c’était nous qui allions reconstruire la RD Congo ».
LE TANGANYIKA ADMINISTRÉ DANS UNE OPACITE TOTALE
Le locuteur avait perdu de vue que son Président de frère s’était engagé lors de son investiture, le 26 janvier 2001, à « faire éclater toute la vérité sur les circonstances exactes de la mort » de Mzee. En dix-huit ans d’exercice du pouvoir d’Etat, « Joseph » s’est montré délibérément incapable de démontrer l’amour « filial » en honorant cette promesse.
Dans le même entretien, Zoé dira que son frère n’a pas l’intention de s’éterniser au pouvoir avant d’ajouter que sa fratrie « n’est pas prête à céder le pouvoir à n’importe qui ».
C’est au mois de janvier 2016 que « Joseph » a commencé à « lorgner » vers Kalemie, ville qui n’est séparée de la « Tanzanie natale » que par le lac Tanganyika. En juin de la même année, plusieurs projets seront lancés: construction d’un stade moderne de 15.000 places à Mukulu, coût 10 millions $; construction d’un bateau de 3.500 tonnes, montant non-divulgué; élargissement de l’aéroport de Kalemie de 1.750 à 2.500 mètres, coût: 18 millions $. Tous ces marchés ont été conclus sans appel d’offres en violation de la loi sur la passation des marchés publics. Devrait-on parler de blanchiment?
Une chose paraît sûre: la province de Tanganyika est en passe de devenir « la chose » de la fratrie « Kabila ». Celle-ci administre cette partie du pays dans une totale opacité. Des grands travaux sont financés sans que l’on sache la provenance des sous. Les Zaïro-Congolais ont encore frais en mémoire les « enfants Kabila » ont foulé le sol de leur pays d’adoption dans une impécuniosité inqualifiable. De là à suspecter cette famille de conspirer contre la sécurité et l’intégrité du territoire national, il n’y a qu’un pas à franchir. Il est clair que « Zoé » finance sa tardive vocation de « mécène » avec l’argent public. L’IGF est prévenue…
Baudouin Amba Wetshi