Sud-Kivu: Le temps des Wazalendo

Depuis le 4 avril 2025, les collines de Kalehe, Kabare et Walungu résonnent d’un nouveau souffle. Celui d’une contre-offensive populaire qui bouscule le cours de la guerre à l’Est de la RDC. À Bushaku, Nyabaronga, Chizi, puis à Lumbishi, les Wazalendo reprennent méthodiquement, village après village, les positions jadis occupées par le M23/RDF/AFC. Devrait-on parler de tournant?

Longtemps marginalisés sur le plan militaire, ces groupes d’autodéfense locaux, portés par un sentiment viscéral de défense territoriale et de dignité nationale, imposent désormais leur tempo sur le champ de bataille. Leur enracinement dans les communautés, leur connaissance du terrain et leur détermination farouche en font aujourd’hui d’eux des acteurs incontournables du conflit.

Il faudrait refuser de regarder pour ne pas voir l’implication croissante du gouvernement congolais dans cette dynamique. Ils bénéficient d’un soutien logistique et financier de la part du gouvernement, et apportent un appui direct aux forces armées sur le terrain.  Une stratégie assumée de « guerre populaire » face à une agression extérieure récurrente.

Mais une question cruciale se pose: que serait devenu l’État congolais dans cette région si les Wazalendo n’avaient pas existé? Face à « une armée vaillante, mais infiltrée jusqu’au cœur ». Leur motivation? Une rage froide née de l’humiliation répétée, et un amour inconditionnel pour une patrie meurtrie.

Cependant, cette montée en puissance pourrait poser des risques à moyen et long terme. Une fois l’ennemi repoussé, que ferait-on de ces milliers d’hommes en armes? Les intégrer directement dans l’armée serait une erreur stratégique. Il serait préférable que l’État les canalise dans une réserve militaire encadrée, professionnelle et démobilisable en temps de paix.

C’est ici que le programme de la Réserve Armée de la Défense (RAD) prend tout son sens. En l’activant pleinement, l’État congolais disposerait d’un outil structuré pour encadrer ces patriotes engagés, renforcer les FARDC, et éviter l’erreur fatale d’armer massivement des civils hors de tout cadre légal. Le RAD permettrait d’absorber cette dynamique populaire dans une logique républicaine, en formant, encadrant, et responsabilisant les citoyens désireux de défendre leur pays.

Cette réserve nationale pourrait devenir le socle d’une armée moderne, enracinée dans son peuple, sans pour autant glisser vers la « miliciarisation » du pays. Il y a urgence à légiférer, financer et déployer ce dispositif à l’échelle nationale.

La reconquête en cours ne saurait suffire. Sans un projet politique clair pour l’après-guerre – qui inclurait la satisfaction des attentes de la population en termes des services sociaux de base, la restauration de l’autorité de l’État – la RDC risque de retomber dans un cycle de conflits endémiques.

Pour l’instant, les Wazalendo avancent. Et l’histoire continue d’observer, prête à juger ceux qui écriront les pages suivantes.

Obed Kakule Vitangi

2 commentaires sur Sud-Kivu: Le temps des Wazalendo

  1. Quand la République s’efface, les citoyens s’arment.
    Leur courage est réel. Leur efficacité, indiscutable. Mais leur rôle soulève une interrogation grave : comment un État sérieux peut-il déléguer sa propre défense territoriale à des milices locales, fussent-elles patriotiques ?
    En théorie, la RDC dispose d’une armée structurée : les FARDC, avec leurs nombreux généraux, leurs casernes, leur chef d’état-major. Sur le terrain, pourtant, le vide est flagrant. L’ennemi occupe, l’armée observe, et ce sont les civils qui combattent. Que font ces généraux grassement rémunérés ? Pourquoi continuent-ils à percevoir leurs soldes ? À quoi sert le commandement militaire si, au cœur du feu, ce sont les paysans qui montent au front ?
    Le soutien du gouvernement aux Wazalendo est assumé : logistique, renseignement, appui moral. L’État les reconnaît, les accompagne, parfois les glorifie. Mais cette reconnaissance cache une réalité plus amère : le désengagement progressif de l’armée dans sa propre mission. Ce qui devrait être exceptionnel devient la norme. Et ce qui est présenté comme une stratégie de « guerre populaire » frôle dangereusement la miliciarisation du territoire national.
    À court terme, cela fonctionne. Mais après la guerre ? Que fera-t-on de ces milliers d’hommes en armes ? Les intégrer directement dans l’armée serait une erreur historique. Ne rien faire serait une bombe à retardement.
    Il semble exister pourtant une voie de sortie. Le programme de la Réserve Armée de la Défense (RAD), encore peu opérationnel, offre un cadre légal, structuré et temporaire pour canaliser ces forces patriotiques. Il permettrait :
    – De former et encadrer ces volontaires dans un cadre étatique.
    – De renforcer les FARDC sans les diluer.
    – De prévenir l’émergence de nouveaux seigneurs de guerre, souvent nés de la victoire.
    Encore faut-il que ce programme soit financé, légiféré et étendu à l’échelle nationale. Il y a urgence.
    La RDC ne doit pas se contenter de gagner une guerre. Elle doit reconstruire son armée. Cela commence par :
    – Un audit du commandement militaire.
    – Une purge des officiers fantômes et infiltrés d’origine rwandaise et/ou autre.
    – La création d’unités mixtes FARDC-Wazalendo, sous contrôle républicain.
    – Une législation claire sur les groupes d’autodéfense, avec mécanismes de désarmement et de réintégration.
    La reconquête actuelle est porteuse d’espoir. Mais sans un projet politique clair, sans une vision de l’après-guerre, la RDC risque de tomber de nouveau dans les bras du chaos.
    Pour l’instant, les Wazalendo avancent. Mais l’Histoire regarde plus loin que les collines reprises. Elle guette ceux qui, demain, écriront — ou effaceront — les promesses de la reconquête.

  2. Nangaa et ses affides du M23 commencent à réaliser à quel point on peut
    facilement gagner une bataille mais remporter une guerre demande d’autres atouts. Les jeunes « Waza » se battent pour leur terroir, leurs familles et surtout pour leur avenir. Les traîtres finissent souvent au bout d’une corde pour avoir collaborer avec l’ennemi contre son pays. Il y a peu, ils avaient le vent en poupe parce que Kagame leur avait miroité mont et merveilles, aujourd’hui, isolé, il ( Kagame ) commence à se rendre compte du défit auquel il doit faire face. Il a tellement vendu le génocide au point de ne plus savoir quoi inventer. Le Congo est un grand pays pour lequel nos pères de l’indépendance ont sacrifié leur jeunesse, il n’est pas question de céder au diktat d’un petit dictateur imbus de lui même.

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