Journaliste bien connu au sein de la diaspora congolaise de Belgique, Cheik Fita vient de passer trois mois à Kinshasa. Mardi 28 septembre, il a présenté la version papier de son média « Infos en ligne des Congolais de Belgique« . Sur la photo, on voit, à sa gauche, notre consoeur Hilda Odia. C’était l’occasion de questionner notre confrère non seulement sur son magazine mais aussi sur la situation générale du pays. Et ce trente-deux mois après l’investiture de Felix Tshisekedi Tshilombo à la tête du pays. INTERVIEW.
Vous venez de lancer un magazine papier au moment où le monde médiatique affiche le « trop plein« …
Je suis journaliste. Je le reste. Je dois avoir un média par lequel je m’exprime. Mon mode de pensée, ma vision et ma ligne reflètent une certaine originalité. Je crois pouvoir apporter un « plus » par rapport à cette diversité. Je suis foncièrement démocrate. Peu importe le nombre des médias. L’important est de savoir cibler son public.
L’histoire récente montre que qu’il y a toujours de l’enthousiasme à la naissance d’un nouveau média papier. Les spécialistes déconseillent aux promoteurs de se lancer dans cette « aventure » sans avoir réuni les moyens pouvant garantir au moins une année de parution. Qu’en dites-vous?
Je pense que j’aurai le budget. Tout en faisant l’étude de marché, j’ai pris soin de contacter des quelques partenaires. Pourrions-nous bénéficier de l’apport d’un homme disposé à mettre son argent? Je crois que oui. Quelqu’un a promis de soutenir financièrement notre magazine. Après une étude de marché kinois, j’ai constaté qu’il y a une réelle demande de support en papier pour soutenir certaines décisions de justice notamment. Au risque de me répéter, le marché médiatique kinois est encore porteur. Il n’y a pas de « trop plein« .
Le numéro zéro qui vient d’être lancé compte pas moins de sept pages consacrées à l’actualité politique. Est-ce un signe annonciateur de la ligne éditoriale du magazine?
Non! Il y a sept pages sur vingt-neuf. Le fait que j’étais dans le sillage du Président de la République – ce qui n’est pas facile -, je pensais qu’il était de bon ton de rendre compte de tout ce que j’avais vu. Le chef de l’Etat figure sur plusieurs pages. La raison est simple: l’homme est omniprésent dans la vie politico-médiatique dans le pays en général et à Kinshasa en particulier. Le ministre de la Jeunesse est le titre-phare de ce numéro. J’ai beaucoup d’inquiétudes par rapport à notre jeunesse. C’est pour cette raison que j’ai donné la parole au ministre en charge de ce secteur en l’occurrence Yves Bunkulu Zola. J’ai retenu également le président du sénat, Modeste Bahati Lukwebo dont l’allocution prononcée lors de la rentrée parlementaire de septembre avait retenu mon attention. Monsieur Bahati a une vision très positive de la société civile. C’est un des « sages » qui ne crient par « au feu » tout le temps.
Vous venez de passer trois mois à Kinshasa. Quelle est l’image que le pouvoir actuel renvoie à l’opinion?
C’est mi-figue mi-raisin. Il convient de noter que la population congolaise – dans sa grande majorité – n’est pas très politisée. Les frictions politiques que l’on a connues durant la campagne électorale de 2018, relève désormais du passé. Cette population manifeste une sorte de « petite confiance » vis-à-vis du pouvoir actuel. Il n’y a pas de critiques acerbes que l’on avait connues à l’époque de Kabila. Je suis d’avis que le gouvernement doit être plus incisif tant dans les décisions que les actions. La population est demandeuse d’actions dans plusieurs secteurs.
Que répondez-vous à ceux soutiennent que l’actuel chef de l’Etat peine à conquérir les cœurs et les esprits. Au motif que la population attend toujours de percevoir les premiers signes de changement dans son vécu quotidien. Au centre de reproches: la pénurie d’eau courante et d’électricité
Honnêtement, j’ai assisté à l’inauguration de plusieurs projets à caractère social. Je peux citer notamment: l’éclairage public qui a été rétabli à Ndjli-Brasserie; la mise sur pieds d’une coopérative des pêcheurs. Il y a plusieurs chantiers dans la capitale. C’est le cas de l’asphaltage de l’avenue Nyangwe. Il faut reconnaitre que les pouvoirs publics ont besoin de beaucoup de moyens. Je mentirai en affirmant qu’à la fin du quinquennat actuel, le Congo-Kinshasa va ressembler à un paradis. Le pays est confronté à un problème de mobilisation des recettes et l’affectation de celles-ci à des actions concrètes. Au cours de mes deux voyages au pays, j’ai constaté que la parité entre le franc congolais et le dollar n’a pas bougé. J’ai noté qu’il y a un « sentiment de sécurité« . La population savoure une ambiance libérale au pays. Tous les « interdits » ont été levés. A titre d’exemple, j’ai pris des photos partout à Kinshasa sans qu’un agent de l’ordre me réprimande. Il va sans dire que je n’ai pas photographié l’aéroport du côté militaire. Ma seule crainte est que cette liberté retrouvée vire à l’anarchie.
Un exemple?
L’exemple le plus patent ce sont les embouteillages qui affectent les grandes artères de la capitale. Les gens roulent n’importe comment. La puissance publique peine à encadrer cette liberté retrouvée. Sur le plan économique, c’est une catastrophe. Il est important que les gouvernants s’y penchent.
En parcourant le premier numéro de votre magazine, il semble bien qu’il n’y a pas encore d’embellie au niveau de la circulation routière. Devrait-on conclure que les sauts de mouton n’ont apporté aucun changement?
Ils ont apporté un certain changement. Sauf que le changement bute sur « l’incivisme aigu » de certains automobilistes qui ne respectent pas le code de la route. On doit « éduquer » les gens.
Ces derniers temps, l’entourage du chef de l’Etat est la cible de toutes les critiques. Devrait-on parler de procès d’intention?
Il y a autour du « Chef » des gens dont on ne perçoit pas l’utilité…
Propos recueillis par Baudouin Amba Wetshi