Serment des juges constitutionnels: L’absence peu républicaine des « kabilistes »

C’est la deuxième fois que des proches de l’ex-président « Joseph Kabila » boycottent une manifestation présidée par le chef de l’Etat. Le premier cas remonte au 4 août. La récidive survenue mercredi laissera des traces. Reste que l’absence des membres du gouvernement et des parlementaires, étiquetés Fcc/Pprd, n’a pas empêché l’organisation de la cérémonie de prestation de serment de trois nouveaux juges à la Cour constitutionnelle. Au-delà des indignations hypocrites contre « la violation intentionnelle de la Constitution » par le président Felix Tshisekedi, les observateurs ont compris que le véritable enjeu est ailleurs. Il tient en douze mots: maintenir la Cour constitutionnelle sous la coupe du « clan Kabila ».

La République, c’est l’intérêt général. Et non l’intérêt d’un clan ou d’un parti. Un homme politique qui devient ministre ou parlementaire cesse d’être l’homme d’un parti. Il est au service de la nation toute entière. Mercredi 21 octobre, des membres du gouvernement et des parlementaires étiquetés Fcc/Pprd -, la mouvance kabiliste, ont jeté le masque. Ils ont confirmé que, pour eux, le pouvoir n’est nullement un service à rendre à la collectivité mais un simple moyen pour défendre les intérêts d’une « corporation » et de son « chef ». Procès d’intention? Nullement!

De gauche à droite, Adolphe Muzito, Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba

La veille, des Congolais n’avaient pas pu s’empêcher de sourire en entendant le Fcc/Pprd Jean-Marie Ingele Ifoto appeler la population à « résister » face à la « violation de la Constitution ». Les « souverainistes » autoproclamés qui squattent la ferme de Kingakati ont surpris. Ils ne sont plus allergiques aux « ingérences étrangères » ainsi qu’aux « impérialistes ». Ils sont allés plus loin en prenant la communauté internationale « à témoin ». C’était à l’issue d’une réunion des caciques de cette mouvance.

Mercredi 21 octobre, les « personnalités » portant le label Fcc/Pprd se sont donc absentées d’une manifestation républicaine au Palais du peuple. A l’ordre du jour, la prestation de serment de trois juges de la Cour constitutionnelle. Il semble bien que des parlementaires de l’AFDC-A de Modeste Bahati Lukwebo et ceux des partis « Ensemble » de Moïse Katumbi et MLC de Jean-Pierre Bemba étaient dans l’hémicycle. C’est le cas également des membres du corps diplomatiques.

En guise d’échappatoires, les « absents » ont brandi, « l’irrégularité » de cette cérémonie autant que le caractère « anticonstitutionnel » de l’ordonnance présidentielle n°20/116 du 17 juillet 2020 portant nomination des juges Dieudonné Kaluba, Alphonsine Kalume et Kamulete Badibanga à la Cour constitutionnelle.

« Joseph Kabila » et ses affidés se sont découvert une nouvelle vocation. Celle de défenseurs de l’Etat de droit. Et ce après avoir violé la Constitution et les lois durant près de deux décennies. Qui oserait leur jeter la première pierre? Sauf que ceux qui connaissent « l’acteur » et son « système » savent que l’ex-raïs est passé maître ès faux-semblant.

RISQUE DE PARALYSIE DE L’ETAT

L’ancien Président de la Cour constitutionnelle, Benoît Lwamba Bindu

En dépit de cette ambiance détestable, les trois juges ont prêté serment mercredi. Ils remplacent Benoît Lwamba, Noël Kilomba et Jean Ubulu. Conformément à la loi organique portant organisation et fonctionnement de cette haute Cour, le Président de la République leur a donné acte de leur prestation de serment.

Le moins que l’on puisse dire est que le Fcc/Pprd parait en plein désarroi. A force de sous-estimer le président Felix Tshisekedi, les « hommes » de l’ex-raïs n’avaient manifestement pas prévu un « rééquilibrage » au niveau des rapports de force. « Fatshi » a-t-il gagné? Assurément pas! Certes, il a marqué des points au plan psychologique. Les « Fatshistes » seraient très mal inspirés de baisser la garde ou encore de sous-estimer un adversaire blessé dans son amour propre.

Des observateurs s’interrogent sur les relations futures entre le Président de la République et le Premier ministre d’une part et les deux présidents des chambres du Parlement d’autre part. « Sylvestre Ilunga, Jeanine Mabunda et Alexis Thambwe ont choisi leur camp politique au détriment de la République », commentait, mercredi soir, un député de l’opposition joint à Kinshasa. D’aucuns redoutent que l’immobilisme ambiant se transforme en une paralysie de l’Etat.

LA VSV POUR LA DISSOLUTION DE L’ASSEMBLEE NATIONALE

Martin Fayulu Madidi

Dans un « message à la nation », diffusé sur les réseaux sociaux, Martin Fayulu Madidi, président en exercice de la plateforme politique « Lamuka » a accusé Felix Tshisekedi et « Joseph Kabila » de « théâtraliser » la vie politique à force de tenter d’ « avoir la mainmise » sur la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) et la Cour constitutionnelle. L’histoire ne dit pas si « Martin » parlait au nom de Lamuka ou de son parti l’ECIDé (Engagement pour la citoyenneté et le développement).

Dans un communiqué daté du 21 octobre, l’association de défense des droits humains la « VSV » (La Voix des Sans Voix) dénonce l’absence du chef du gouvernement ainsi que celle des deux présidents de chambres à cette cérémonie. Pour elle, les trois responsables politiques devaient être présents « au nom de l’intérêt supérieur de la nation, de la paix et de la cohésion nationale ».  « Leur absence prouve à suffisance la crise permanente et ouverte entre les alliés au pouvoir qui ne jurent que par leurs propres intérêts en lieu et place de privilégier ceux de la population congolaise, le souverain primaire », souligne le texte.

Le Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba

Sur un ton radical, la VSV demande au Président de la République « de tirer toutes les conséquences de cette crise politique susceptible de mettre en péril » le pays tout entier entrainant des « violations massives des droits humains ». L’association propose la dissolution de l’Assemblée nationale et la révocation du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba. La VSV sera-t-elle entendue?  On peut en douter.

Lors de l’entretien qu’il avait accordé à des journalistes de la diaspora congolaise de Belgique le 1er octobre dernier, le président Felix Tshisekedi avait confié, avec une pointe de sincérité, sa volonté d’éviter toute crise entre le Cach et le Fcc. Selon lui, les conséquences seraient désastreuses pour les deux parties. La même volonté semble être partagée dans certains milieux dirigeants du Fcc/Pprd, Jusqu’à quand?

 

B.A.W.

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