Peut-on vraiment parler d’une surprise à travers la désignation par le FCC de leur candidat présidentiel en la personne d’Emmanuel Shadary Ramazani? Dans un certain sens la réponse est affirmative. Mais dans l’autre, il faudrait plutôt voir cette désignation de la dernière minute comme un déraillement, un désistement, qui relève d’une forte pression subie à l’interne comme à l’externe.
Évidemment les kabilistes, par orgueil, ne l’admettront pas. Toutefois, la vérité est lourde à assumer et les actes posés sur le terrain accréditent cette thèse. Rien ne justifiait le comportement inique que le peuple congolais a dû subir de la part du conglomérat du FCC. Jamais, dans aucun pays, on a vu des dirigeants politiques, mieux, toute une coalition, se comporter de la manière dont ils l’ont fait devant une élection présidentielle. Celle-ci a, en principe, ses règles. Les candidats ont besoin de la visibilité, bien avant, pour augmenter leur chance de remporter le scrutin. Quel intérêt avaient-ils de maintenir le suspense sur le nom de leur candidat? Pourquoi Kabila a longtemps évité de se prononcer sur son sort alors que celui-ci était scellé par la constitution?
La réalité, crue et rude, a fini par les rattraper et les mettre dos au mur. Ils croyaient, comme de gros enfants, que le temps était élastique. Ils s’imaginaient aussi, comme des incrédules, sortant de l’on ne sait quel moule, que leur « Raïs » avait des capacités infaillibles, plus que le pape de Rome, au point de le croire éternel et irremplaçable dans une république pourtant bananière et qui fait la honte de sa classe politique. C’est cette même classe politique, médiocre à souhait, qui continuait à clamer que Joseph Kabila sera inéluctablement leur candidat. Lui-même, le concerné, a entretenu ce climat, en faisant de ce sujet crucial, un jeu de devinette populaire. Il renvoyait tout le monde de manière, par ailleurs insuffisante, à la constitution, affirmant qu’elle sera respectée, amnésique de multiples violations perpétrées le long de son règne dictatorial.
Le revirement de dernière minute est un camouflet sans appel à la prétention de ceux qui ont manifestement échoué et qui ont continué à miroiter l’irréel face à leur gestion catastrophique et calamiteuse d’une des nations les plus riches au monde. La candidature à surprise de Shadary, étant moins favorisé au départ dans les pronostics, trahit visiblement leur volonté de maintenir à tout prix le pouvoir à tous les échelons. C’est une candidature qui devrait donner matière à réflexion et ouvrir les yeux aux Congolais pour exactement comprendre ce qui se cache derrière cette désignation impromptue bien que le personnage était et est encore Secrétaire général du PPRD. Qu’on se souvienne des noms d’éventuels dauphins du « Raïs » qui circulaient, tels que les Matata Ponyon, Aubin Minaku, Mova Sakanya et bien d’autres. Et puis, dans le camp de l’opposition, la descente dans l’arène de Jean Pierre Bemba et la présence de Felix Tshisekedi, de Kamerhe et de Katumbi, bien qu’exclu, aurait dicté un autre choix pour se donner la chance de vaincre l’élection présidentielle.
Raisonnablement, Kabila tenterait tout simplement de brouiller les cartes en endormant, une fois de plus, les Congolais face à la mascarade de la non-présentation de sa candidature en vertu des interdits de la constitution. Ce qui est important, à ce stade, c’est de s’imaginer la suite du processus électoral et de tenir toujours en ligne de compte que Kabila est encore au pouvoir et il y restera, selon les juges de la cour constitutionnelle, aussi longtemps qu’il n’y aura pas un successeur issu des élections. Toute l’énigme est là. Les Congolais ne doivent surtout pas commettre l’erreur de se voiler la face. Le processus électoral est vicié dans son fondement au point de pousser certains partis politiques dont la DC de Diomi Dongala à le déserter. Les élections sont donc hypothétiques et contestables à l’avance pour plusieurs raisons. Le problème de la machine à voter n’a pas encore été vidé, à ce jour. Ces machines ne sont même pas encore-là et elles risquent de ne pas arriver à temps afin d’être déployées sur toute l’étendue du pays. Il y a le problème de la restructuration de la CENI dont les dirigeants de l’ex Majorité présidentielle semblent ignorer. Les 10 millions de doublons constituent une épine dans la tenue régulière des élections transparentes. Tenant compte de tous ces écueils, évoquer la tenue des élections serait illusoire et gravement imprudent.
N’ayant pu imposer sa personne, Kabila a manigancé, en plaçant une marionnette sans réelles ambitions pour jouer le rôle de figurant de circonstance. N’est-ce pas, Shadary le disait lui-même, « Kabila demeure notre candidat ». En réalité, il l’est. Car c’est lui qui tire les ficelles et dicte les règles de jeu. Il est toujours au pouvoir et fera tout pour que les élections soient toujours repoussées pour une raison ou pour une autre.
La solution pour le peuple congolais d’en sortir et d’en finir réellement avec l’ère Kabila est de le mettre hors d’état d’influencer le processus électoral. Et cela ne peut se faire qu’en mettant en place une autorité de tutelle neutre et indépendante que nous avons à plusieurs reprises plaider ici qui est l’équipe des Administrateurs élue et plébiscitée par le peuple congolais en vue d’ouvrir la voie à une alternance politique crédible en RDC.
Par Mwamba Tshibangu