Dans un arrêt rendu, lundi 11 avril 2022, dans l’affaire dite « Procès 100 », la Cour de cassation de la RDC a anéanti la décision de la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe du 15 juin 2021 condamnant Vital Kamerhe à 13 ans de travaux forcés. Au motif que cet arrêt viole l’article 104-3 du Code de procédure pénale. Le dossier est, par conséquent, renvoyé devant la même juridiction « recomposée ». Cette haute juridiction estime que le jugement rendu au second degré était entaché de vice de procédure.
« Le président de la juridiction d’appel fixe le jour d’audience. (…). Toutefois, lorsque la juridiction d’appel estime que la situation du prévenu pourrait être aggravée ou lorsqu’il s’agit d’une infraction pouvant entrainer la peine capitale, il ne sera statué qu’après citation du prévenu et le cas échéant, de la partie civilement responsable de l’amende et des frais », stipule le troisième alinéa 3 de l’article 104 du Code de procédure pénale. C’est bien cette disposition qui a servi de base légale à l’arrêt de la Cour de cassation. Il serait reproché à la Cour d’appel de Kinshasa-Gombe « d’avoir statué sur l’appel sur simple notification de la date d’audience au lieu de procéder par voie de citation à comparaître ».
Dès l’annonce de la décision de cette haute Cour, une question a commencé à tarauder les esprits. Il s’agissait de savoir si Vital Kamerhe allait bénéficier, de facto, de la liberté provisoire en attendant la date de l’audience à la Cour d’appel de Kinshasa-Gombe. Pour les membres de l’équipe de défense de l’ancien « dircab » du chef de l’Etat, « la question ne se pose même pas ». Pour eux, c’est en « homme libre » que leur client va comparaitre à nouveau. « La date de l’audience devait être fixée ce mardi 12 avril », a précisé un des avocats.
Dans un communiqué publié le même lundi 11 avril, le secrétaire général de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), Billy Kambale, semble abonder dans le sens qui précède. Enthousiaste, il parle d’un arrêt de « cassation totale ». De manière schématique, la « cassation totale », entraîne l’annulation, avec effet rétroactif, de tous les chefs de la décision attaquée. Traduction: les jugements rendus au premier et second degré sont annulés. Le « compteur judiciaire » serait-il remis à zéro? L’avenir le dira.
Dans le texte précité, Kambale considère cet arrêt de la Cour de cassation comme une « victoire de la justice congolaise qui indépendamment de toute influence extérieure, a su dire le droit en réhabilitant » Vital Kamerhe. Et de poursuivre que l’UNC « salue la progression aujourd’hui dans l’effectivité de l’Etat de droit en RDC ». Au nom de ce parti, « Billy » rend hommage au chef de l’Etat congolais du fait qu’il soit « resté au-dessus de la mêlée ».
Suspecté de détournement de l’argent destiné à financer le « programme de 100 jours » lancé par le président Felix Tshisekedi Tshilombo, le « dircab » Vital Kamerhe sera condamné à 20 ans d’emprisonnement au premier degré. En appel, sa peine sera ramenée à 13 ans. C’est ainsi que la Cour de cassation fut saisi d’un pourvoi. La suite est maintenant connue.
Dès la publication de l’arrêt de la Cour de cassation, des voix se sont élevées pour brocarder « l’Etat de droit », un des thèmes favoris de « Fatshi ». « L’Etat de droit n’est plus qu’un slogan, tonne un juriste bruxellois. Comment voulez-vous que je crois à l’instauration de la primauté du droit après la remise en liberté des anciens ministres Eteni Longondo et Willy Bakonga suspectés de détournements de deniers publics? », s’est-il interrogé. Abondant dans le même sens, un membre de l’opposition joint au téléphone à Kinshasa de résumer: « La décision prise par la Cour de cassation dans l’affaire Kamerhe est un scandale ».
Une autre question hante les esprits: Quid de la situation des co-accusés de Vital Kamerhe? A en croire un avocat proche de l’équipe de défense de « VK », la Cour d’appel aura à statuer au cas cas par cas. « C’est un poker: les accusés peuvent être blanchis ou voir les peines respectives confirmées ou aggravées ».
Affaire à suivre.
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B.A.W.