Présidentielle du 30/12: « Kabila » refait le coup de la « charte de bonne conduite »

Les candidats à l’élection présidentielle des coalitions politiques « Cach » et « Lamuka » ne sont pas tombés au piège tendu par « Joseph Kabila » et la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe). Felix Tshisekedi Tshilombo et Martin Fayulu n’ont pas apposé leurs signatures sur la fameuse « charte de bonne conduite ». Celle-ci n’est pas sans rappeler l’accord signé en août 2006 entre le camp Bemba et l’AMP portant « acceptation des seuls résultats publiés par la CEI ». On connait la suite…

« Si tous les dégoûtés s’en vont, tous les dégoûtants vont rester », aurait dit l’ancien Premier ministre belge Paul Vanden Boeynants. Dimanche 30 décembre 2018, les Congolais – sauf ceux de Beni, Butembo, au Nord Kivu et de Yumbi (Maï Ndombe) iront (enfin) aux urnes pour choisir leur nouveau Président de la République ainsi que les députés nationaux et provinciaux.

A Kinshasa, le débat fait rage. Des Kinois paraissent dubitatifs face à un choix cornélien: boycotter la « parodie électorale » annoncée et ouvrir un grand boulevard conduisant au sommet de l’Etat pour le « dauphin » du « raïs »; aller aux urnes et légitimer un hold-up électoral. Que faire?

MARCHÉ DE DUPES

Fayulu, Tshisekedi et Shadary

Depuis vendredi 28 décembre, la SADC mène des discussions avec les trois principaux candidats à l’élection présidentielle en l’occurrence Martin Fayulu Madidi (Lamuka), Emmanuel Ramazani Shadary (FCC) et Felix Tshisekedi Tshilombo (Cach). L’objectif est d’amener les protagonistes à prendre l’engagement d’accepter « les seuls résultats » publiés par la CENI (Commission électorale nationale indépendante). Un vrai marché de dupes.

Les coalitions « Lamuka » et « Cach » se disaient, vendredi, disposées à parapher cet accord à la condition que quelques amendements soient intégrés. Outre l’instauration du comptage manuel des bulletins après le vote, il y a: l’accréditation de tous les témoins, l’autorisation aux témoins d’assister au dépouillement des bulletins et de contresigner la copie officielle du PV. Sans omettre, la permission aux témoins d’accompagner les plis transférés par les agents de la CENI jusqu’aux centres locaux de compilation des résultats (CLCR).

Ces contre-propositions ont balayées du revers de main par une centrale électorale dont l’inféodation au Front commun pour le Congo (FCC) et son « autorité morale » n’est plus à démontrer.

Aux dernières nouvelles, La Ceni et le « dauphin » Emmanuel Ramazani Shadary ont été les seuls à signer le texte non-amendé de ladite charte. Les coalitions « Cach » et « Lamuka » ne sont pas tombées dans le traquenard tendu par « Kabila » et la SADC.

Redoutant le pire au lendemain des élections, la Cenco (Conférence épiscopale nationale du Congo) et l’Eglise du Christ au Congo ont publié, mercredi 26 décembre, un communiqué demandant à la Ceni de faciliter l’accès des observateurs et témoins non seulement dans les bureaux de vote mais aussi dans les CLCR.

Les deux communautés chrétiennes ont, par ailleurs, exhorté la centrale électorale à ne publier que les résultats provenant du « comptage manuel ». De même, les PV devraient être affichés à la devanture de chaque bureau de vote.

Les deux églises demandent au gouvernement de « garantir la transparence pendant et après les élections ». Le fonctionnement normal de l’Internet et des SMS est également demandé. On rappelle que les principaux membres de l’exécutif national font partie de l’équipe de campagne de Ramazani Shadary.

CONFLIT D’INTÉRÊT

Colonel Pierrot Mwanamputu

Comme pour répondre aux deux candidats à la présidentielle ainsi qu’aux confessions religieuses, le colonel Pierrot Mwanamputu a annoncé, vendredi, sur les ondes de Radio Okapi, que des policiers seront déployés, lors du vote, aux alentours des bureaux de vote. Ils ont reçu mission d’ « éviter tout attroupement ». La police n’acceptera donc pas la présence, en ce lieu, des témoins des organisations politiques ou candidats. Certains leaders politiques avaient annoncé que leurs « observateurs » resteront sur place de l’ouverture à la fermeture des bureaux de vote. Mais aussi aux centres de compilation.

Selon Mwanamputu, les commandants de la police ont été instruits de garder le contrôle des hommes placés sous leur commandement. Ceux-ci doivent « rester fermes, vigilants et courtois le jour du vote ».

Des propos qui ne manqueront pas de faire sourire quand on sait que le « premier flic » du pays en l’occurrence le ministre de l’Intérieur et de sécurité Henri Mova Sakanyi est chargé de la même fonction dans l’équipe de campagne du « dauphin » de « Kabila ». Un vrai conflit d’intérêt.

Pour les caciques de la mouvance kabiliste dite « FCC », l’opposition ne peut pas gagner les élections. Au motif pour le moins infantile qu’elle se serait engagée « un peu tard » dans la campagne électorale. Selon eux, le candidat du FCC à la présidentielle devrait l’emporter pour avoir sillonné 24 provinces du pays sur 26. Néhémie Mwilanya Wilondja, coordonnateur du FCC et « dircab » de « Kabila » a tenu ces propos le 19 décembre sur RFI. Conseiller diplomatique du « raïs », Barnabé Kikaya bin Karubi ne dit pas autre chose.

ROUBLARD

En réalité, « Joseph Kabila » et les membres de son « clan » – qui ont pris le pays en otage – ont peur du changement. Ils ont trop d’intérêts mal acquis à préserver. Les « kabilistes » savent que les Congolais veulent la rupture avec le « système » AFDL-PPRD-MP-FCC. « Kabila » et les siens savent également que dans une consultation électorale libre, transparente et équitable, le « dauphin » Ramazani serait terrassé tant par Felix Tshisekedi que par Martin Fayulu.

Depuis 2015, « Kabila » tente désespérément de faire modifier la Constitution pour briguer un nouveau mandat. Le troisième. Il a, en revanche, réussi à changer quelques dispositions de la loi électorale.

En proposant aux candidats de l’opposition de signer la fameuse « charte de bonne conduite », « Kabila », assisté par la SADC, voulait enfermer les adversaires du candidat du FCC à la présidentielle dans une sorte de « camisole juridique ». Jean-Pierre Bemba Gombo en sait quelque chose.

La signature, en août 2006, sous l’égide de la Mission onusienne au Congo, d’un « accord » portant « acceptation par les protagonistes des seuls résultats publiés » par la centrale électorale entre l’AMP et les bembistes (Union pour la Nation) n’avaient pas empêché le président « élu » de faire pilonner la résidence de son ex-challenger JP Bemba. La « communauté internationale » était aux abonnés absents.

En 18 années de présence à la tête de l’Etat, le successeur de Mzee LD Kabila n’aura pas laissé de lui l’image d’un homme de parole. Bien au contraire. On retiendra de lui, le souvenir peu glorieux d’un roublard…

 

Baudouin Amba Wetshi

Happy
Happy
0 %
Sad
Sad
0 %
Excited
Excited
0 %
Sleepy
Sleepy
0 %
Angry
Angry
0 %
Surprise
Surprise
0 %