Ancien administrateur-directeur général adjoint de la Gécamines, le député national élu de Kipushi, Calixte Mukasa a décidé de quitter le PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie). Il invoque « des raisons de convenance personnelle ». Un cas plutôt inhabituel. Jusqu’ici, ce sont les « opposants » qui passaient avec armes et bagages dans le « clan kabiliste ». Sur la photo, on voit le secrétaire permanent du PPRD, l’impayable Emmanuel Ramazani Shadary.
Dans une lettre datée du 22 juillet 2018 dont l’objet n’appelle aucune interprétation – « ma démission comme membre effectif du PPRD » -, le député national Calixte Mukasa Kalembwe notifie au secrétaire exécutif de ce parti dominant pour le Haut-Katanga sa « démission ». « Je viens déposer en ce jour ma lettre de démission au sein du PPRD pour des raisons de convenance personnelle », écrit-il non sans rappeler les articles 15, 20, 22, 28, 29 des statuts de cette formation politique lesquelles précisent notamment que « (…) l’adhésion au PPRD est un acte individuel, libre (…)« et « (…) la démission d’un membre effectif se constate par le dépôt d’une lettre auprès de l’organe de base de son ressort (…)« .
Mukasa conclut sa correspondance en invitant l’Assemblée nationale à prendre « les dispositions idoines en rapport avec ma nouvelle situation ». En clair, le député suppléant devrait occuper le fauteuil devenu vacant.
Depuis bientôt deux ans, l’Etat congolais vit une situation surréaliste. Et ce par la volonté de « Joseph Kabila »: les principales institutions de la République en l’occurrence le « Président de la République » et le « Parlement » sont hors mandat. Le dernier mandat du Président en exercice a expiré le 19 décembre 2016. L’élection de son successeur devait avoir lieu 90 jours auparavant. Le mandat des membres des deux Chambres du Parlement a cessé (2011-2016) « à la fin de la législature » (article 110-1 de la Constitution).
Sur le plan théorique, le chef de l’Etat et les parlementaires des deux chambres n’exercent plus un pouvoir constitutionnel. Celui va de l’investiture à la fin de l’investiture. Les juristes parlent de « compétence temporelle ». Ils sont censés expédier les affaires courantes.
La démission de Mukasa Kalembwe survient à un moment où la mouvance kabiliste ressemble de plus en plus au « Titanic ». Dans une déclaration faite vendredi 26 juillet, le numéro deux de la représentation permanente des Etats-Unis à l’Onu, Jonathan Cohen, a rappelé que « Joseph Kabila » n’est plus éligible pour briguer un troisième mandat. Et ce conformément à la Constitution congolaise. Le diplomate a regretté que le dirigeant congolais n’ait pas profité de son allocution du 19 juillet, devant le Congrès, pour annoncer, de manière solennelle, qu’il n’entendait pas solliciter un nouveau terme. « Le temps de la posture [consistant à seriner qu’il va respecter la Constitution] est terminé », a asséné l’adjoint de l’ambassadeur US Nikki Halley.
« FRONDEURS »
Pour ceux qui ne le savent pas, le représentant permanent de l’Administration américaine aux Nations Unis à New York a rang de membre du cabinet du Président. Les Kabilistes auraient tort de penser que Jonathan Cohen est un banal « deputy chief of mission » (ministre-conseiller).
On ne sait pas grand-chose sur Calixte Mukasa Kalembwe. Sauf qu’il a été l’adjoint du Canadien Paul Fortin jusqu’à la démission de celui-ci en septembre 2009. Il a assuré l’intérim du poste, jadis très convoité, d’administrateur-directeur général de la Gécamines jusqu’à la nomination d’Ahmed Kalej Nkand. On le sait, ce dernier sera « viré » en juillet 2014 pour « manquements graves » avant d’être « blanchi » par la justice kabiliste.
Selon des sources lushoises, « Calixte » aurait des liens de parenté avec feu Augustin Katumba Mwanke (AKM). Ces sources considèrent que l’homme a entamé sa « traversée de la savane » au lendemain la disparition brutale, en février 2012, de celui qui passait pour son « neveu » et « protecteur ».
Depuis le décès mystérieux du tout-puissant conseiller de « Kabila » que d’aucuns désignaient par l’acronyme « AKM », les « katangais » suspectés d’ « infidélité » à l’égard du « raïs » n’ont plus de « paratonnerre ». Ils font face à des pires représailles. Le successeur de Mzee estime que ceux qui se livrent à la fronde « lui doivent tout ». Aussi, doivent-ils « passer à la caisse ».
L’auteur de ces lignes a tenté sans succès de joindre au téléphone le désormais ancien député afin qu’il explicite ce qu’il entend par « raison de convenance personnelle ».
On espère que Calixte Mukasa Kalembe ne va pas ajouter son patronyme sur la liste des « frondeurs » qui ne cesse de s’allonger. Quelques noms: Vano Kiboko (ancien député nationale), Jean-Claude Muyambo Kyassa (ancien membre de la majorité présidentielle), George Mawine (ancien chef adjoint de la Ligue des jeunes du PPRD), Moïse Katumbi Chapwe (ancien gouverneur PPRD du Katanga), Charles Mwando Nsimba (ancien 1er vice-président de l’Assemblée nationale) et Gabriel Kyungu wa Kumwanza (ancien président de l’assemblée provinciale du Katanga). Affaire à suivre.
B.A.W.