« Vice-Premier » en charge de l’Intérieur et sécurité, Gilbert Kankonde Malamba Nkashama a procédé, lundi 9 septembre, à la remise-reprise avec Basile Olongo. Proche des milieux chrétiens, le nouveau ministre a la réputation d’un homme consensuel. On espère que le pouvoir ne le changera pas et qu’il mettra à profit son mandat pour mettre fin à l’ « infantilisation » des provinces par le gouvernement central. Et pourquoi pas réformer l’ANR (Agence nationale de renseignements) afin qu’elle joue (enfin) le rôle d’une véritable « Sûreté nationale ».
Nommés le 26 août, les membres du gouvernement « Ilunga Ilunkamba 1er » sont en passe d’achever leur entrée en fonction. Depuis la semaine dernière, les cérémonies de passation de pouvoir se succèdent à travers les ministères.
Lundi 9 septembre, le vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur et sécurité, Gilbert Kankonde a pris possession de son lieu de travail. Il a, à cette occasion, invité les membres de son cabinet et ceux de l’administration à « œuvrer pour un Congo libre et sécurisé où les droits et libertés des citoyens sont garantis et respectés ».
Tout au long des deux dernières décennies, des membres des gouvernements successifs du « Congo démocratique » ne cessaient de dire à qui voulait les entendre que l’exécutif faisait de la figuration.
A tort ou à raison, d’aucuns attribuent cette « inertie » tant à l’incompétence et au manque de volonté politique qu’à la modicité de moyens d’action. « Les ministères ne disposent plus de budget d’investissement. Ils ne reçoivent que les frais de fonctionnement », confiait récemment encore un ancien ministre de « Joseph Kabila« .
Que peut-on attendre de l’exécutif dirigé par Sylvestre Ilunga? Poser la question revient à y répondre. Et pour cause, lors de la présentation du programme de son gouvernement, le nouveau « Premier » a surpris les observateurs en énumérant une série de réformes qu’il compte mener sans toutefois indiquer le coût et la provenance du financement.
RELEVER LE DÉFI SÉCURITAIRE
Au ministère de l’Intérieur, le nouveau « patron » a invité les « services spécialisés » placés sous la tutelle de son ministère de « relever le défi » de la sécurité des personnes et des biens. Sans la paix, a-t-il souligné, il ne peut y avoir de développement ni de vie collective harmonieuse. « L’image du pays en dépend », a-t-il glissé.
Gilbert Kankonde s’est donné une sorte de « feuille de route ». Il a promis de se pencher sur les « fléaux majeurs » qui affectent le quotidien des Congolais aux quatre coins du pays. A savoir notamment: l’insécurité à l’Est, le banditisme urbain à Kinshasa et dans le « Grand Katanga ». Sans omettre, les tracasseries policières et les embouteillages provoqués par le non-respect du code de la route.
Il faut espérer que le nouveau ministre de l’Intérieur ne se limitera pas à faire des annonces fracassantes. Et qu’il disposera des moyens non seulement financiers et matériels mais aussi humains – de grande qualité – pour marquer son passage à la tête de ministère régalien.
Une parenthèse mérite d’être ouverte ici. Sur les réseaux sociaux, une « circulaire » pour le moins étrange, datée du 5 septembre 2019, signée par le président de l’UDPS, Augustin Kabuya Tshilumba, est en circulation. Ce dernier rappelle aux membres du gouvernement Ilunga étiquetés UDPS que le « jeudi 29 août, il a été convenu » que le parti allait leur « recommander 70% des membres devant constituer les différents cabinets ».
Il est demandé aux nouvelles « excellences » portant le label UDPS de réserver « 70% » des postes dans leurs cabinets respectifs au parti . Chaque ministre est invité à transmettre l’organigramme de son cabinet « avec indication précise des postes à pourvoir et du profil requis, afin de permettre au parti de s’en occuper », peut-on lire. Fermons la parenthèse.
« DIRIGER LE CONGO AUTREMENT »
La démarche de l’actuel secrétaire général de l’UDPS brille par son incohérence par rapport aux valeurs qui servent – servaient? – de socle idéologique à cette formation politique qui clamait son attachement à l’Etat de droit autant que son ambition de « diriger le Congo autrement », dixit Felix Tshisekedi au lendemain de son élection à la tête de l’UDPS.
S’il est vrai que tout cabinet ministériel est, par nature, composé d’un personnel politique, il n’en demeure pas moins vrai que les « meilleurs ministres » ont toujours été ceux qui savent bien s’entourer.
Sous d’autres cieux, un cabinet ministériel est composé de deux parties. L’une technique, réunissant des experts dans le secteur concerné dont le directeur du cabinet. L’autre, politique. C’est ici qu’on peut « caser » les communicants et autres « militants ».
L’article 200 de la Constitution institue une « Conférence des gouverneurs de province ». Autorité de tutelle, le nouveau ministre de l’Intérieur devrait jouer un rôle majeur pour mettre fin à la stagnation socio-économique des pouvoirs locaux. Une situation qui découle notamment de l’ « infantilisation » de ces derniers par le gouvernement central. De même, cette rencontre devrait être l’occasion de parler de développement en partant de la « base ». Et non une simple occasion d’écouter les « lamentations » des gouverneurs des provinces moins nanties.
Osons espérer que Gilbert Kankonde aura à cœur de restructurer l’ANR (Agence nationale de renseignements) afin que celle-ci cesse de se comporter en « police politique » en jouant le rôle d’une véritable « Sûreté de l’Etat ». Une telle mutation passe nécessairement par le détachement de cette Agence de la Présidence de la République.
A l’instar de ses collègues, le vice-Premier ministre Kankonde dispose de 100 jours pour convaincre.
B.A.W.