Président hors mandat depuis le 19 décembre 2016, « Joseph Kabila » n’affiche aucun signe de celui qui se prépare à « déménager ». Bien au contraire. L’homme continue à exercer la plénitude des prérogatives du chef de l’Etat comme si de rien n’était. Alors que son rôle devrait se limiter à expédier les affaires courantes. Samedi 14 avril, le « raïs » a signé plusieurs ordonnances. L’une d’elles porte « démission d’office » de plusieurs magistrats assis et debout.
Parmi les magistrats « sanctionnés » par la volonté de « Kabila », il y a Chantal Ramazani Wazuri, ancienne présidente du Tribunal de paix de Lubumbashi/Kamalondo. Son crime est d’avoir adressé une lettre au vitriol au ministre de la Justice Alexis Thambwe Mwamba. Elle y fustigeait les pressions qu’elle a subies pour condamner l’ancien gouverneur du Katanga Moïse Katumbi Chapwe à une peine de 36 mois, assortie d’inéligibilité, dans le fameux litige immobilier avec le Grec Alexander Stoupis. C’était en juillet 2016.
Dans cette missive, la jursite pointait un doigt accusateur en direction principalement de l’administrateur général de l’ANR (Agence nationale de renseignements) Kalev Mutondo.
Conseil de Katumbi, l’avocat parisien Eric Dupond-Moretti assure que Chantal Ramazani « a déclaré devant Huissier de Justice » que le procès Katumbi versus Stoupis « était une pantalonnade. Et que sa signature a été obtenue sous la menace ».
Dans une interview accordée, début janvier 2017, au journal en ligne « Afrik.com », la magistrate dit avoir reçu un « nombre incalculable » d’appels téléphoniques non seulement du premier président près la Cour d’appel de Lubumbashi, Paulin Ilunga, mais aussi du bâtonnier Ambroise Kamukuny. Professeur de droit public notamment à l’université de Kinshasa, ce dernier est également l’avocat personnel de Kalev Mutondo, le chef barbouze de « Kabila ».
Dans cet entretien, elle raconte une « anecdote »: « M. Stoupis aurait dû verser à l’Etat 30.000 dollars de caution. Mais il s’est présenté à l’audience avec un certificat d’indigence au motif qu’il ne pouvait pas payer les frais de justice. En même temps, il est venu au tribunal accompagné de très grands avocats ». Le bâtonnier Kamukuny a enjoint la juge de signer l’ordonnance accordant au Grec une « exonération ».
La juge a regretté le silence du ministre de la Justice. » (…). J’ai demandé dans ce courrier que ma signature soit retirée du jugement parce qu’elle avait en réalité été extorquée. Malheureusement, le ministre ne m’a jamais répondu. Et personne depuis n’a osé dénoncer ces faits très graves. Ni le conseil supérieur de la magistrature, ni les syndicats de magistrats. C’est d’autant plus décevant qu’à l’heure où je vous parle beaucoup de magistrats en RDC travaillent sous pression. Dans notre pays, le pouvoir politique instrumentalise la justice ».
Selon la juge Chantal Ramazani, la lettre de dénonciation qu’elle avait adressée au ministre Thambwe l’a mis, elle et sa famille, dans une insécurité totale. « (…), des militaires ont été envoyés chez moi. Ils ont arrêté mon chauffeur. Des compatriotes m’ont alors aidé à m’enfuir. Ma photo était placardée partout, même à l’aéroport. Mais j’ai finalement réussi à m’échapper par la grâce de Dieu et j’ai été ‘exfiltré’ en Europe ».
Qui de la juge Ramazani Wazuri et de « Joseph Kabila » devait être astreint à la démission forcée? Le tribunal de l’Histoire jugera…
B.A.W.