La nouvelle est tombée, vendredi 12 mai, aux alentours de 16 heures: la manifestation de l’Opposition, prévue initialement le samedi 13, est reportée au samedi 20 mai, a annoncé Delly Sessanga (Envol). Ce report a été décidé par les quatre initiateurs de ladite marche. A savoir outre Sessanga: Martin Fayulu Madidi (ECIDé), Moïse Katumbi Chapwe (Ensemble) et Augustin Matata Ponyo (Leadership, gouvernance et développement).
A en croire le président de l’Envol, le organisateurs n’ont pas voulu tomber « dans le piège tendu » par le gouverneur de Kinshasa, Gentiny Ngobila Mbaka. Celui-ci a invoqué « des raisons de sécurité » à l’appui de sa décision. Des observateurs y voient un subterfuge. Au motif que cette mesure n’ait pas été appliquée lors de la sortie de l’Union sacrée de la Nation au Stade des Martyrs. C’était le dimanche le 30 avril.
D’après Sessanga, les protestataires entendent manifester contre le « tripatouillage électoral ». Sans omettre la vie chère et l’insécurité. D’aucuns ont déploré la position prise par Ngobila. « Il n’y a pas de démocratie sans opposition ». Plus cyniques, certains militants politiques estiment, avec sourire en coin, que l’hôtel de ville devait jouer son rôle qui consiste à « prendre acte » en laissant faire. « C’était l’occasion de voir ce que ces quatre moustiquaires pèsent réellement au niveau de l’opinion », disent certains militants proches de l’Union sacrée pour la Nation.
Jusqu’au début de l’après-midi de ce vendredi 12, on a observé un certain « tâtonnement » au niveau de l’organisation. Marchera? Marchera pas? On imagine que les discussions étaient animées entre les « radicaux » et les « réalistes ». Secrétaire général de l’ECIDé, le très radical Devos Kitoko jurait ses grands dieux que « la date du 13 mai est maintenue ». In fine, les réalistes ont triomphé en mettant l’accent sur la menace d’une « répression policière ».
Jeudi 11 mai, le Lushois Moise Katumbi s’est rendu au Camp Luka. L’ancien gouverneur du « Grand Katanga » – qui est plutôt mal connu à Kinshasa – voulait sans doute tester sa popularité. Le contact avec la population n’aura pas lieu. En cause, l’imposant « service d’ordre » qui semblait empêcher « Moïse » d’approcher la masse. C’est à croire que ce dernier redoutait une agression physique.
La réponse est venue vendredi 12. Sur les réseaux sociaux. Sur le compte Twitter @lwaribaM, une vidéo met en scène un individu présenté comme étant un « militant » de l’UDPS. Dans un monologue ponctué des gestes agressifs, l’homme promet à Katumbi un « passage à tabac » lors de la marche de samedi 13. Sur le compte Twitter de @MichaelTshi, une autre vidéo circule. On voit le même individu en compagnie du général John Tshibangu qui célébrait apparemment sa nomination.
Question: le report de la marche de l’Opposition aurait-il été motivé par les menaces proférées à l’encontre du président de l’Ensemble pour la République? L’homme politique et ses proches auraient-ils été paralysés par la peur?
Des observateurs n’excluent pas cette hypothèse. « A l’époque d’Etienne Tshisekedi, l’opposition passait outre les directives de l’hôtel de la ville », fait remarquer un étudiant en droit à l’Université Libre de Bruxelles. Pour lui, les manifestations de l’Opposition politique ne sont finalement motivées que par le « positionnement ».
A quelques sept mois de l’organisation des élections générales, on assiste à une méfiance viscérale des personnalités tant de l’Opposition que de la Société civile à l’égard la CENI (Commission électorale nationale indépendante), la très puissante Eglise catholique et les Protestants en tête.
A cette ambiance délétère, il faut ajouter, d’une part, la crise avec le Rwanda de Kagame et ses supplétifs du M23 et de l’autre, la crise diplomatique avec l’EAC (East African Community). Tous les Congolais de bonne volonté espèrent voir les acteurs politiques mettre un peu d’eau dans leur vin. Il s’agit d’un « sursaut patriotique » pour sauver la « Maison commune Congo » du naufrage? Osons espérer qu’ils boivent tous du vin.
–
Baudouin Amba Wetshi
