Excellence Madame la Représentante Spéciale,
C’est avec amertume que je saisis ma plume ce jour pour exprimer à l’Organisation des Nations Unies, à travers votre auguste personne, ma désolation au sujet de ce que j’appelle la mort programmée de Radio Okapi et donc le bâillonnement même de la liberté de la presse en RD CONGO.
En effet, c’est avec enthousiasme que nous les pionniers, le premier noyau des journalistes de Radio Okapi, avions accueilli ce projet de l’ONU dès le mois de Janvier 2002. Nous avions ainsi enfin vu venir un moyen d’expression des libertés de tous les Congolais à travers celle de la presse. De l’homme de la rue au sommet de l’Etat en passant par les femmes paysannes et les jeunes désœuvrés.
En y croyant, nous y avions mis toutes nos énergies de telle sorte que certains d’entre nous y ont soit laissé leurs vies, assassinés parce que Journalistes de Radio Okapi, comme Serge Maheshe et Didace Namujimbo à Bukavu soit leur santé en faisant des accidents vasculaires cérébraux, AVC, ou en y échappant par le poids du travail tels que Leonard Mulamba et Jean Ngoma à Kinshasa, Jean Michel Libula à Dungu ou encore Jules Ngala à Goma.
D’autres ont mis leurs vies et leurs familles en péril en acceptant d’aller implanter la Radio Okapi et donc les ondes de la liberté dans des zones à très haut risque à l’époque telles que Bunia, Beni, Butembo, Kindu ou encore Dungu où il n’y avait même pas encore des Casques bleus agissant sous le fameux chapitre VII. Ce fut notamment le cas pour moi, José des Chartes Menga Mbula et d’autres collègues. En effet, ce sont nos reportages, à nous de Radio Okapi, qui ont alimenté la plupart des rapports politiques de la Monusco. Les Représentants spéciaux Amos Namanga NGONGI et William Lacy SWING en savent beaucoup.
Tous ces sacrifices ont été consentis pour que nous puissions enfin offrir aux Congolais cet espace de liberté tant rêvé depuis le déclenchement de la vague du pluralisme démocratique tout au début des années 1990.
Nos efforts ont été reconnus par la Fondation Hirondelle et les Nations Unies, les deux partenaires de ce projet, qui ont promis de le faire durer dans le temps et donc de le pérenniser au-delà du mandat de la Monusco.
C’est ainsi que l’un de vos prédécesseurs, je cite l’Ambassadeur William Lacy SWING, avait lâché lors de l’un des anniversaires de cet organe: « Radio Okapi est le plus beau projet que l’ONU ait réalisé au CONGO ».
Des réunions et des retraites ont été organisées pour la pérennisation de Radio Okapi à New York, à Lausanne et à Kinshasa. La toute dernière étant celle de Mitendi dans le faubourg de Kinshasa en 2017.
Cependant, je constate, non sans amertume que tous ces efforts, tous ces sacrifices, sont en train de tomber à l’eau ce jour. Et donc à ce jour, l’ONU dont vous êtes la Représentante en RDC, a floué non seulement les Journalistes de Radio Okapi, Activistes de la liberté de la Presse mais aussi tous nos millions d’auditeurs et d’internautes disséminés à travers le CONGO et le monde. Quel crédit les Congolais pourraient encore accorder à l’ONU pour défendre la liberté de la presse, d’expression et d’opinion?
J’en veux pour preuve la fermeture progressive des stations locales de Radio Okapi dans les villes de Mbandaka, Mbuji Mayi, Matadi et aujourd’hui Kisangani et Lubumbashi et peut-être bientôt Bunia et ailleurs, réduisant ainsi au silence ces ondes de la liberté et au chômage ces héros de l’information.
Même si des relais FM restaient dans ces villes, rassurez-vous, Madame Zerougui, que sans journaliste sur terrain, il n’y a pas de couverture efficiente d’actualité, il n’y a pas d’informations fiables et il n’y a pas de valeurs démocratiques prônées par notre Institution qu’est l’Organisation des Nations unies.
Ainsi donc, je prie à l’ONU, de revoir sa politique de promotion de la liberté de la presse dans ce pays dont les Journalistes se sont battus depuis des lustres pour son essor. Et cela au sacrifice de leurs vies. Au cas contraire, l’Histoire jugera les actuels Représentants de cette Organisation qui risque de se repentir dans l’avenir sans aucun résultat comme c’est le cas avec le génocide Rwandais.
Ainsi, je viens, Madame, de faire ma part dans l’écriture de l’Histoire de la défense de la liberté de presse, dans ce pays et dans le monde !
Cordialement,
M. José des Chartes Menga Mbula, Journaliste, Ecrivain et Activiste de la liberté de presse.