Sous le titre « Kabila, Tshisekedi, Katumbi, les Congolais et moi… », l’hebdomadaire parisien « Jeune Afrique » publie dans son édition n°2918, datée du 11 décembre 2016, les « confessions exclusives – et explosives – » du facilitateur Edem Kodjo. Celui-ci règle ses comptes au bazooka avec quelques membres de l’opposition congolaise en général et Etienne Tshisekedi wa Mulumba en particulier. Un coup de sang affligeant de la part d’une personnalité africaine censée être un modèle de noblesse.
Deux faits semblent expliquer, sans toutefois justifier, le « coup de gueule » de l’ancien Premier ministre togolais.
D’abord, l’épithète « kabiliste » qui lui a été accolée par le président de l’UDPS lors du meeting du 31 juillet dernier. Kodjo considère cette « imputation » comme une infamie. Une « injure grave ».
Ensuite, les « discussions directes » organisées par les évêques catholiques entre les signataires et les non signataires de l’accord du 18 octobre donnent du « dialogue » de la Cité de l’Union Afrique – dont il a été le facilitateur – le relief d’un travail inachevé voire d’un demi-échec.
Furieux, l’ancien Premier ministre togolais semble imputer toute la faute à Etienne Tshisekedi wa Mulumba qui est loin d’être exempt de reproche. Aussi, promet-il à celui-ci des bosses et des plaies. « S’il veut la guerre, je vais le démolir », fulmine Kodjo. Des propos qui n’honorent guère l’énarque qui a été par deux fois chef du gouvernement togolais – sous le dictateur Gnassingbe Eyadema et son fils Faure Gnassibge – et secrétaire général de l’Organisation de l’Unité Africaine.
Le facilitateur Edem Kodjo paie le prix de trois « erreurs fatales ». Lesquelles?
Première erreur. Edem Kodjo est venu à Kinshasa avec une « feuille de route » dans laquelle ressortait un mot: Transition. La Présidente de la Commission de l’Union Africaine, Nkosazana Dlamini Zuma et son époux Jacob Zuma n’ont jamais fait mystère de leur « sympathie » vis-à-vis de « Joseph Kabila ». Pour eux, il suffisait que celui-ci accepte un « partage équitable et équilibré » du pouvoir dans le cadre d’un « gouvernement d’union nationale » pour décrisper l’atmosphère politique. Erreur. Pour la petite histoire, Kodjo avait été dépêché à Kinshasa en janvier 2015 au lendemain des manifestations des 19, 20 et 21. Il devait « sonder » les intentions du chef de l’Etat congolais au sujet d’un troisième mandat.
Deuxième erreur. Arrivé dans la capitale congolaise, Edem Kodjo a perdu de vue de diagnostiquer « l’humeur du moment » pour connaitre les aspirations profondes de la population congolaise. Il ne s’est pas donné la peine de se mettre à l’écoute des « vrais gens » pour connaitre les attentes de la masse. S’il l’avait fait, il aurait constaté que face à quelques politiciens professionnels, en quête de maroquins pour se remplir la « panse », il y a la grande majorité du peuple congolais qui désire ardemment l’amélioration de ses conditions sociales. Une majorité de la population qui exige l’avènement de l’alternance démocratique à l’expiration du second et dernier mandat du président sortant « Joseph Kabila ». Ce sera le 19 décembre prochain.
Troisième et dernière erreur. Edem Kodjo a eu tort de se livrer à un exercice qui ressemble à du « strip-tease ». Il a eu tort d’étaler ses faiblesses autant que ses états d’âme dans un magazine continental. Cette démarche semble confirmer que l’Afrique, à quelques rares exceptions près, est dirigée par des « petits messieurs ». Des hommes qui contrôlent des vastes territoires sans être capables de contrôler ces petites choses appelées: nerfs. « Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse », disait Alfred de Vigny.
Baudouin Amba Wetshi