Les rocades de Kinshasa pourront réduire les embarras de circulation

La réalisation de ce projet aura un impact socio-économique très important pour les usagers. Gare à la corruption! Après les expériences malheureuses  (programme de 100 jours, Tshilejelu, Route Kalamba-Mbujimayi, Route Kananga-Mbujimayi etc.), d’aucuns craignent que le projet des rocades ne soit qu’une répétition des maux passés…

Gaston Mutamba Lukusa

Le président Félix-Antoine Tshisekedi a procédé, samedi 22juin, au lancement, à Mitendi (Kinshasa), des travaux de construction des rocades (périphériques). Une rocade est une voie rapide qui fait le tour d’une ville pour fluidifier le trafic et éviter d’encombrer les centres-villes. Selon Alexis Gisaro, ministre des Infrastructures, Travaux publics et Reconstruction, les rocades de Kinshasa de la première phase du projet seront longues de 63 Km et permettront de relier les paries Sud-Est et Sud-Ouest. Suivant le tracé, la première rocade Sud-Ouest partira du quartier Mbudi (commune de Mont Ngafula) en passant par la Route de la caravane jusqu’à Mitendi avant de faire jonction avec la deuxième rocade Sud-Est partant de Mitendi pour déboucher sur la route nationale N°1 par le quartier Badara non loin de l’aéroport international de Ndjili. Les rocades vont ainsi traverser les communes de Mont Ngafula, Ndjili, Kimbanseke et Nsele. Les travaux de construction pourraient durer trois ans pour un coût global de 300 millions de dollars américains, financés à travers le programme sino-congolais.

Deux autres rocades seront construites au Nord dans la deuxième phase du projet de manière à former une boucle complète au tour de la ville de Kinshasa. La réussite du projet aura un impact social très important non seulement sur les populations riveraines qui bénéficieront d’un bon accès aux services sociaux de base et d’un facile écoulement de la production agricole. Les usagers auront d’autres avantages tels que gains de temps, de confort et de sécurité. Les frais d’utilisation des véhicules (carburants, entretien et usure) vont aussi baisser. Des échangeurs, ponts et passage à niveau seront construits sur le tracé dont les études de faisabilité ont été réalisées depuis 2014. Le projet va donc se traduire par un effet socio-économique positif sur le développement du pays.

Les bienfaits du projet des rocades

La mobilité demeure l’un des défis essentiels de la gestion urbaine de Kinshasa. Selon l’Agence congolaise des grands travaux, le projet des rocades va réduire les coûts et le temps de transport dans la ville, augmenter le volume des activités économiques, réduire les embouteillages et améliorer les conditions de vie de la population. Kinshasa qui s’étend sur 9.965 km² ne possède qu’un réseau routier de 3.621 km. Ce réseau est nettement insuffisant pour couvrir les besoins de transport de plus au moins 15 millions d’habitants. Suivant des projections, le nombre d’habitants pourrait atteindre 25 millions en 2030.

Pour l’Agence des grands travaux, la croissance démographique de Kinshasa implique une stratégie d’occupation du sol ainsi que la gestion des déplacements et des transports urbains. Outre la topographie vallonnée de la frange Sud de la ville, qui ne facilite pas les déplacements routiers, les causes qui engendrent une mobilité laborieuse à Kinshasa sont d’abord dues au caractère très extensif de la capitale. La ville est en perpétuelle recomposition, son parc automobile et le flux quotidien de la population augmentent progressivement, ce qui provoque pendant les heures de pointe, de longues files d’attentes dans la plupart des axes routiers. Par ailleurs, il est évident que le réseau routier tracé d’après les anciens plans d’aménagements ne suffit pas pour permettre la fluidité du trafic dans les artères principales.

Gare à la corruption qui affecte les grands projets publics

Après les expériences malheureuses (projets de 100 jours, Tshilejelu, Route Kalamba-Mbujimayi, Route Kananga-Mbujimayi etc.), d’aucuns craignent que le projet des rocades ne soit qu’une répétition des maux passés. A moins qu’il y ait un meilleur contrôle et suivi d’exécution du projet. La corruption a toujours été le tendon d’Achille des pouvoirs politiques en RD Congo. Dans son rapport annuel de 2015, Transparency International affirmait que la corruption qui affecte les grands projets publics est un obstacle rédhibitoire au développement durable. Selon cette ONG internationale, quand le montant d’un pot-de-vin prend le pas sur l’optimisation des ressources, il en résulte des constructions de mauvaise qualité et une piètre gestion des infrastructures. La corruption gaspille de l’argent, ruine les Etats et coûte cher en vies humaines.

La dette extérieure de la plupart des pays sous-développés est grevée par des surfacturations opérées par les entrepreneurs à la suite de la corruption. Le secteur des bâtiments et des travaux publics est très important pour l’économie mondiale. Mais quand les pratiques de corruption s’y introduisent, elles finissent par augmenter les coûts et altérer la qualité des infrastructures. Trop souvent, on a vu dans notre pays des infrastructures inaugurées en grande pompe mais dont la durée de vie a été abrégée par la mauvaise qualité des matériaux utilisés. C’est le cas par exemple de l’avenue du Tourisme qui longe le fleuve Congo à Kinshasa et des travaux de voirie inaugurés en grande pompe, à des coûts faramineux. Le coût actuel de 300 millions de dollars pour 63 km de rocades est acceptable puisque le prix moyen, en Europe, au Km d’une 2X2 voies de type autoroute est de 8 millions d’euros. La grande crainte est que ce coût ne soit gonflé sous prétexte de réalisation des études supplémentaires. Les délais de construction pourraient aussi être allongés, après signature des avenants, sous des motifs fallacieux.

Gaston Mutamba Lukusa