La libération de la parole a eu pour effet de cracher des vérités qui étaient jadis enfouies. C’est depuis longtemps qu’on dénonce la mauvaise gouvernance de ce beau pays au cœur de l’Afrique. Les acteurs politiques en place, au lieu de faire mea culpa et regarder la réalité en face, ont détourné le regard ailleurs, multipliant à volonté des slogans pompeux non suivis d’actions durables pouvant impacter la vie des gens. Les 5 chantiers et la soi-disant révolution de la modernité n’auront été que des leurres pour endormir le peuple et se faire bonne conscience. Poussant l’outrecuidance très loin, ils ont une autre lecture de leurs réalisations. Sans froid aux yeux, Kabila lui-même n’avait-il pas soutenu: « si vous ne croyez pas à ma parole, croyez au moins à mes œuvres », ignorant les moyens financiers à sa disposition, le temps passé au pouvoir et surtout, le bilan de gestion globalement catastrophique.
C’est bien grave et déplorable d’avoir des dirigeants qui feignent d’ignorer substantiellement la nature intrinsèque du pouvoir qui ne se mesure pas par l’occupation d’un poste de responsabilité, moins encore par le nombre d’années que l’on est en fonction. L’exercice véritable du pouvoir se mesure à travers les actions menées pour atteindre les objectifs fixés et, sous un autre aspect, il se mesure par le respect des textes et des procédures à suivre. Autrement, on patauge dans l’illégalité. Ces fondamentaux sont importants, car ils sont à la base de meilleures performances, génératrices de réussites et de succès ou d’échecs patents et irréfutables. Il est fort regrettable que le Congo-Zaïre ne se soit pas engagé sur la voie du progrès en dépit de ses nombreuses richesses.
Pour éviter un tel gâchis, il faudrait remettre en question la philosophie politique relative à la prise du pouvoir et à sa conservation. L’on ne peut prétendre renouveler un mandat électif que si l’on a démontré, de l’avis des électeurs, de réelles capacités à l’amélioration de leur vécu quotidien en construisant et en bâtissant un avenir meilleur pour tous. Au Congo, sous occupation, on s’est écarté sciemment de cette voie. Tout est fait pour démolir, anéantir l’espoir du peuple congolais. Cela fait déjà 20 ans que la situation socioéconomique se dégrade de jour en jour, que l’appauvrissement de la population se généralise, que le chômage bat son plein, que l’on constate la baisse phénoménale du niveau de l’enseignement, le manque d’eau potable et d’électricité, la carence des infrastructures routières, fluviales et lacustres, le tout, dans un environnement où pullulent de foyers de tension et où les violations des droits humains sont la norme.
Nonobstant ce cataclysme politique et la bourrasque au niveau social, les affairistes de l’ex-majorité présidentielle opèrent de nuit et de jour pour confisquer le pouvoir. À la mauvaise gestion du pays s’ajoute la mauvaise foi de vouloir, coûte que coûte, se pérenniser au pouvoir en dépit du fait que toutes les institutions sont hors mandat légal. Les élections politiques sont évoquées, mais en réalité, c’est pour détourner l’attention vers un objectif qui n’est plus un secret pour personne.
Par ailleurs, sans attendre le verdict de l’histoire, les condamnations acerbes tombent ces jours sur la tête de cette classe politique « médiocre » qui n’a pas su, aux dires de Mgr Ekofo, construire réellement un État digne de ce nom. C’est à se demander si ceux qui clamaient encore, il n’y a pas longtemps qu’hier, que Kabila était le seul capable de mieux diriger ce pays, entonnant à gorge déployée, le slogan de: « Kabila to tondi yo nanu te » étaient des martiens ou des gens d’un autre monde?
Devant le mépris et le non-respect des droits de l’homme ayant poussé le régime tortionnaire de Kinshasa à intimer l’ordre à sa soldatesque pour assaillir les fidèles dans des lieux de culte, le rappel à l’ordre et à la réalité des faits était devenu impératif. Le qualificatif de « médiocres » et la demande expresse de dégager la scène, ne sont que le reflet de la volonté populaire qui n’en peut plus de supporter des supplices sans fin. La dose de piment leur administrée à travers une homélie habilement habillée en morale politique est indicatrice d’un ras-le-bol généralisé qui annonce la fin d’un règne en soit, funeste et macabre, qui a démontré toute sa défaillance face à ses responsabilités régaliennes.
De ce qui précède, il faudrait tirer une leçon pour l’avenir: les politiciens congolais devraient comprendre que la carrière politique est avant tout un service au profit de la communauté. La politique n’est donc pas le lieu indiqué pour faire les affaires ou pour chercher à s’enrichir illicitement. D’autres professions sont là pour satisfaire l’appétit de ceux et celles qui ne visent que l’intérêt personnel au lieu de voir d’abord la mission qui est derrière l’engagement politique. Les affairistes congolais doivent cesser de faire du bidonnage du pouvoir en aliénant sa nature et son sens premier. Le pouvoir pour le pouvoir amène parfois à l’amnésie et conduit souvent à la dérive totale. Le cas de la RDC fait figure d’école dans ce domaine.
Mwamba Tshibangu
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