La République démocratique du Congo est-elle condamnée à vivre dans l’instabilité politique?

Mwamba Tshibangu

Mwamba Tshibangu

Les jours passent, mais c’est comme si rien ne bougeait véritablement sur le plan politique. L’installation des membres de la chambre haute et basse a eu lieu. Mais l’exécutif n’est toujours pas au rendez-vous. Après les élections contestées qui étaient assujetties aux manigances et aux diverses manipulations, la préoccupation des gens est résolument tournée vers la gouvernance dans l’optique d’effacer les années sombres du kabilisme.

L’exécution du programme d’urgence des 100 premiers jours du nouveau président de la République a semblé redonner l’espoir d’un élan de changement en perspective. Mais, à la lumière de certains paramètres, le pays tarde à prendre l’envol pour affronter les défis de taille qui sont devant les actuels gouvernants.

Quatre facteurs majeurs seraient à la base de l’actuelle instabilité : le président de la République semble n’avoir pas totalement les mains libres pour agir. L’ascendance des « vainqueurs » qui multiplient des crocs-en-jambe et font traîner les choses; la persistance des revendications de Martin Fayulu dans le contentieux électoral et enfin, le mécontentement de non-participants aux élections qui voudraient tout chambouler pour recommencer le processus à zéro.

Le bras de fer qui perdure entre la coalition CACH et le FCC est un mauvais présage pour le pays. Il révèle que ses acteurs principaux ne jouent pas franc jeu. Ils ne s’accommodent pas à l’humeur de la rue et s’en tiennent mordicus à leur positionnement factuel qui est le fruit des tricotages et de manœuvres sordides.

Par ailleurs, s’il est permis de comprendre la démarche de celui qui se proclame le « président élu », socialement, elle inquiète davantage d’autant plus qu’elle s’accompagne des velléités de soulèvement populaire. Les réseaux sociaux enflammés en font continuellement écho comme s’il s’agissait d’une simple ballade de santé. Les instigateurs dudit projet et ceux qui exigent la démission du premier magistrat du pays semblent ignorer la fracture de la société congolaise qui est nettement marquée à la suite de ces élections. Il est évident qu’une bonne portion de la population soutient le nouveau président en dépit de l’alliance contre nature que sa coalition a nouée avec le FCC.

En dehors de ceux qui ne jurent que par le soulèvement populaire pour libérer le pays des mains des occupants, d’autres voix s’élèvent envisageant une solution politique autour d’une table ronde pour régler le problème de « légitimité » du pouvoir. Dans tous les cas, il ne serait pas superflu de se demander comment ce qui semble facile aujourd’hui n’a pu être réalisé quand le peuple congolais était uni pour chasser les « Médiocres » de la scène politique. Comment vont-ils rallier un grand monde derrière ces projets si la preuve convaincante de la victoire de Fayulu sur les autres candidats n’a pas été établie clairement?

Dès lors, dans la logique où chaque camp crie à la victoire, prospecter le renversement du pouvoir actuel sans la garantie d’embarquer le peuple congolais, profondément divisé, serait un pari risqué. Par ricochet, puisqu’on continue à brandir l’épouvantail d’un soulèvement populaire, si rien ne se fait ou ne se fera dans les jours, semaines ou mois qui viennent, c’est une fois de plus démontrer la poltronnerie des Congolais qui savent certes, crier et menacer, mais qui sont incapables de passer à l’action.

Souhaiter le changement de régime, surtout s’il ne répond pas aux expectatives de la population, est légitime. Cependant, il faudrait bien réfléchir avant d’envisager de renverser la situation politique en dehors des élections. En théorie, l’idée pourrait paraître facile à réaliser puisque d’autres pays ont montré l’exemple. Toutefois, la situation post-électorale est bien différente au Congo. Elle est, en présentant deux tableaux en même temps, d’une complexité extrême. En fait, le désir de changement s’oppose à la continuité apparente qui se manifeste dans les gestes et les actes des caciques du FFC. Il est impossible, en ce moment, de savoir avec exactitude quelle est la tendance qui prédominera entre les deux courants en présence. Proférer les menaces ou jouer au jeu de la déstabilisation risque de donner l’impression de vouloir empêcher le nouveau pouvoir, en gestation, de jeter les bases pour amorcer le développement durable et intégral du pays.

En marge de cette dualité, il y a d’autres enjeux à ne pas prendre à la légère. Loin d’être un mirage, ceux qui travaillent depuis des années pour morceler le pays sont tapis dans l’ombre. Ils sont même, à bien des égards, patients. Ils n’attendent qu’une occasion propice pour interférer dans les conflits internes et imposer finalement leur vision. Ainsi, la balkanisation tant répugnée par beaucoup de Congolais pourrait être facilitée par certains actes ou erreurs politiques.

Durant cette période de flottement politique, la prudence et surtout le bon jugement devraient être de mise pour chercher à éradiquer les maux qui rongent la société congolaise ou le groupe d’individus qui bloquent l’amorce de la bonne gouvernance et l’instauration d’un État de droit. Tout doit être donc fait pour préserver la cohésion nationale et viser l’intérêt suprême de la nation. Le contraire irait dans le sens d’alimenter l’instabilité politique.

 

Par Mwamba Tshibangu

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