La cinquième revue permet un décaissement immédiat équivalent à 152,3 millions de DTS (environ 202,1 millions de dollars) afin de soutenir les besoins de la balance des paiements. La situation économique du pays demeure tributaire de fortes dépenses consacrées aux élections et à la sécurité au détriment du paiement des arriérés intérieurs.
Le Conseil d’administration du FMI vient d’achever, le 14 décembre, la cinquième revue de l’accord de facilité élargie de crédit (FEC) avec la RD Congo. Suivant le communiqué de presse rendu public, « l’achèvement de la cinquième revue permet un décaissement immédiat équivalent à 152,3 millions de DTS (environ 202,1 millions de dollars) afin de soutenir les besoins de la balance des paiements, portant le décaissement total à ce jour à 913,8 millions de DTS (environ 1219,1 millions de dollars). La situation socio-politique et sécuritaire est de plus en plus complexe, reflétant les prochaines élections générales du 20 décembre 2023 et le conflit en cours dans l’Est de la RDC. Malgré ce contexte, l’économie demeure résiliente, avec une croissance du PIB réel projetée à 6,2% en 2023, soutenue par un secteur extractif toujours dynamique malgré les chocs négatifs des termes de l’échange. La forte dépréciation du franc congolais a eu un impact sur l’inflation, qui a atteint 23,3% en glissement annuel en juillet 2023, avant de diminuer modérément à la suite des mesures prises par la Banque centrale du Congo (BCC). Le déficit du compte courant reste élevé, en raison de la détérioration des termes de l’échange et de l’augmentation plus importante que prévue des importations. L’accumulation de réserves internationales a ralenti en raison d’un manque à gagner de recettes minières libellées en dollars et des interventions effectuées par la BCC pour parer les pressions à la dépréciation du taux de change ».
La RD Congo a satisfait à la plupart des critères de réalisation. Il n’y a qu’un seul qui n’a pas été respecté, il s’agit du solde budgétaire intérieur « qui n’a pas été atteint en raison de la sous-performance des recettes du gouvernement central et d’ajustements insuffisants des dépenses ». De même, tous les objectifs indicatifs à fin juin ont été atteints sauf deux. Il s’agit du plancher des dépenses sociales et du plancher des recettes du gouvernement. La situation économique du pays demeure tributaire de fortes dépenses consacrées aux élections et à la sécurité au détriment du paiement des arriérés intérieurs. L’exécution budgétaire s’est traduite par une sous-performance des recettes face une hausse des dépenses. Ce déséquilibre a entraîné la dépréciation du taux de change et la hausse des prix des biens et services. Le taux d’inflation prévu à fin décembre est de 20,8%.
A signaler que dans la loi de finances pour l’exercice 2024, le gouvernement prévoit un taux de change à fin décembre 2024 de 2.535,5 francs pour 1 dollar. Ce qui est irréaliste, car le dollar s’échange déjà actuellement contre 2.650 francs. Entretemps, la situation politique et sécuritaire continue à se détériorer. Les campagnes électorales se traduisent par des discours de haine, d’intolérance et de division. Des violences et des morts d’homme ont été enregistrées faisant craindre que les électeurs ne soient forcés à voter pour tel ou tel candidat. Des craintes subsistent encore que les élections ne soient bâclées et ne conduisent à une guerre civile. La vérité des urnes demeure cependant le seul remède pour que le Congo continue à exister en tant que nation.
C’est encore pire sur le plan de la sécurité. A la centaine de milices armées qui sèment la mort et la désolation, il y a eu création, le 15 décembre à Nairobi (Kenya), d’une nouvelle plateforme politico-militaire dénommée Alliance Fleuve Congo (AFC) incluant le M23, des milices et des partis politiques. Mme Bintou Keita, Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU en RDC et cheffe de la MONUSCO, a dans un tweet du 16 décembre, exhorté l’AFC à renoncer à tout acte de violence susceptible de déstabiliser la RDC. Elle appelle également le M23 à respecter les termes de la Feuille de route de Luanda et à désarmer sans condition. Pour sa part, l’ambassade des États-Unis à Kinshasa a exprimé sa profonde préoccupation face à l’annonce faite le 15 décembre par l’Alliance du Fleuve Congo, un groupe qui comprend Corneille Nangaa et Michel Rukunda – individus sanctionnés par les États-Unis – et le M23, sanctionné pareillement par les États-Unis. Pour les Américains, les menaces de l’AFC sont un affront au peuple congolais, alors qu’il se prépare à exercer pacifiquement ses droits civils et politiques consacrés par la constitution congolaise. L’ambassadrice américaine, Mme Lucy Tamlyn, appelle tous les acteurs sincèrement intéressés à mettre un terme au conflit dans l’est de la RDC à se conformer aux initiatives de paix régionales menées par l’Afrique, notamment les processus de Luanda et de Nairobi. Elle affirme que les États-Unis envisageront de prendre des sanctions. A la suite du lancement de cette coalition politico-militaire depuis un pays membre de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), le gouvernement congolais a réagi en rappelant l’ambassadeur au Kenya, John Nyakeru ainsi que Jean-Pierre Masala, ambassadeur auprès de l’EAC avec résidence à Dar es-Salaam.
Enfin sur le plan économique, pour stabiliser la monnaie et l’inflation, le FMI recommande que le gouvernement se concentre sur la mobilisation des recettes budgétaires et entreprendre des réformes dans la gestion des finances publiques et des investissements. Il s’agira d’améliorer la gouvernance et la transparence dans le secteur minier particulièrement ainsi que de lutter contre la corruption et d’améliorer le climat des affaires. Ceci va contribuer au développement du secteur privé et à promouvoir une croissance économique durable et inclusive.
Gaston Mutamba Lukusa