« Rien ne sera plus comme avant ». Cette phrase n’a pas été prononcée par un acteur de théâtre, encore moins par un responsable d’une secte, elle est devenue une espèce de profession de foi de presque tous les grands dirigeants politiques du monde. Même les économistes libéraux, les chantres de l’économie de marché, reconnaissent leur impuissance à faire de projections sur les solutions qu’il va falloir mettre en œuvre pour relancer l’économie mondiale qui est en arrêt depuis pratiquement deux mois. Il est évident que les marges de manœuvre sont très limitées au regard à l’ampleur de la situation et surtout à la diversité des conséquences selon les pays.
Si en Occident, particulièrement en Europe et aux Etats-Unis, face à la crise du Coronavirus, le choix a été fait de recourir aux emprunts garantis par les Etats pour soutenir leur économies, en Afrique, avec une contraction du PIB estimée à 1,25% cette année, les conséquences seront lourdes sur toutes les économies des pays africains.
Aujourd’hui, le FMI, la Banque mondiale et les dirigeants africains appellent à une action internationale d’envergure pour permettre à l’Afrique de contenir les effets dévastateurs de Covid-19 dans les secteurs des infrastructures médicales dont les besoins sont immenses. Selon certains experts, le coût de ces besoins est d’au moins 114 milliards de dollars américains, alors que les promesses des créanciers bilatéraux, multilatéraux et privés sont de l’ordre de 44 milliards. La suspension de paiement du service de la dette préconisée par les créanciers s’avère largement insuffisante pour permettre à l’Afrique de passer cette période ô combien dramatique de sa courte histoire. Peut-être que la restructuration de la dette aurait été la solution la plus efficace pour soulager les pays africains, mais hélas, les créanciers en ont décidé autrement!!!
Certains économistes suggèrent de recourir à un mécanisme financier dont disent-ils, a déjà fait preuve de son efficacité dans la crise mondiale dans les années d’après les différents chocs pétroliers: Il s’agit des « Droits de Tirages Spéciaux » (DTS) du FMI.
Les Droits de Tirage Spéciaux crée par le FMI en 1969 comme avoir de réserve internationale complémentaire dans le cadre du système de parités fixes de Bretton Woods. Je ne vais pas m’attarder sur les péripéties qui ont jalonné l’histoire des DTS qui n’est pas une monnaie mais plutôt une créance virtuelle sur un panier de monnaies librement utilisables des membres du FMI. Quelques années après la création des DTS et l’effondrement du système de Bretton Woods, les grandes monnaies sont passées à des régimes de taux de change flottants. L’expansion des marchés de capitaux internationaux a permis aux pays solvables d’emprunter plus facilement et accumuler des volumes importants de réserves internationales contrairement à la majorité si pas la totalité de pays Africains dont la faiblesse des économies (rente) exposées à des fluctuations récurrentes de cours de matières premières. Aujourd’hui, tous les pays africains sont confrontés aux difficultés liées à leurs déséquilibres chroniques de leurs balances de paiement, ce qui ne leur donne pas suffisamment de marges de manœuvres pour affronter une crise de cette ampleur. Ne disposant pas de réserves officielles suffisantes pour les raisons évoquées ci-haut, l’Afrique est obligée de recourir à des expédients et à la charité de ceux qu’elle accuse régulièrement avec raison de la piller. Pour moi, le recours aux Droits de Tirage Spéciaux est un palliatif, les pays africains doivent diversifier leurs économies, il faut créer les conditions et construire les infrastructures pour la transformation de nos matières premières sur place et créer de la valeur ajoutée. Il faut des politiques publiques efficaces en matière d’énergie électrique, d’eau, routes, santé, éducation etc…
Quels seront les défis à relever après la crise du Coronavirus pour les pays africains dont les économies sortiront anéanties?
Il est indéniable que « rien ne sera plus comme avant ». Donc, les modèles économiques seront repensés, la mondialisation qui est un processus d’élargissement de l’espace économique d’intervention des agents économiques associés à la libération des échanges, doit tenir compte d’un certain nombre de besoins vitaux comme la santé et les équilibres climatiques. Sinon l’humanité ira tout droit vers sa perte.
Que vont faire les pays africains pour relancer leurs économies après la crise?
Comme la diversifications des économies africaines ne se fera pas du jour au lendemain, il va valoir immédiatement après la crise du Coronavirus mettre l’accent sur les priorités des actions à impact social visible notamment: la santé, l’eau, l’éducation l’énergie et la protection de l’environnement. l’Afrique qui n’a pas accès au flux financier international compte tenu de sa faible solvabilité. Elle doit faire preuve d’imagination, sinon elle risque de connaitre des jours encore plus difficiles.
Okitapoy Longa Mboyo
Économiste