C’était le premier événement en grand pompe qui devait annoncer la vraie consistance de l’opposition du duo Martin Fayulu et Adolphe Muzito. On aurait voulu qu’il eusse lieu, sans entraves, pour refléter l’État de droit prôné par le régime de Félix Antoine Tshisekedi. Malheureusement, au pays de Mfumu Kimbangu, il est extrêmement difficile, ces derniers temps, d’arriver à un consensus politique.
Lamuka était dans ses droits d’organiser une marche pacifique. Cela est clairement contemplé dans la constitution, notamment dans l’article 25 qui dispose: « La liberté des réunions pacifiques et sans armes est garantie sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public et des bonnes mœurs » et dans l’article 26 où il est bien précisé que: « La liberté de manifestation est garantie. Toute manifestation sur les voies publiques ou en plein air, impose aux organisateurs d’informer par écrit l’autorité administrative compétente ». Il y a donc une condition sine qua non: les autorités administratives et policières doivent être au courant pour assurer entre autres l’aspect sécuritaire. Cela a été fait.
À signaler que dans un premier temps le gouverneur de la ville-province de Kinshasa avait dit non à cette marche alléguant des raisons farfelues et fallacieuses concernant la Covid, même si la persistance de celle-ci ne fait point de doute. Puisque la coalition Lamuka tenait mordicus à l’organisation de cette marche, d’autres conciliabules ont eu lieu. Au cours de celles-ci la date de 17, soit un décalage de deux jours par rapport à la date initialement fixée par Lamuka, a été proposée en vue d’éviter principalement de perturber la rentrée parlementaire programmée bien avant.
Par la voix de Martin Fayulu, leader de l’ECIDE, cette proposition qui aurait pu permettre l’organisation de la marche, a été rejetée. En l’absence d’une entente, il fallait s’attendre que l’autorité établie, au-delà du fait d’avoir raison ou non, puisse faire valoir ses dispositions au risque de voir bafouer son rôle étatique du contrôle de la cité. De son côté, Lamuka prévoyant déjà ce scénario et sachant que la coalition n’allait pas obtempérer aux règles d’un régime qu’elle taxe de dictatoriale, avait préalablement dépêché une délégation auprès de la CPI dénonçant préventivement les abus d’autoritarisme que les manifestants allaient subir. Chose qui est arrivé ponctuellement quand on doit appliquer la force.
Dans ce jeu de confrontation entre le pouvoir et l’opposition, il est à se demander, en fin de compte, qui avait à gagner ou à perdre dans l’organisation de cette marche. Pour Lamuka qui est désormais divisée en deux ailes, il était question que Martin Fayulu démontre qu’il a pignon sur rue, cela, par une mobilisation monstre sur toute l’étendue de la République. C’était aussi une occasion sublime pour relancer son mouvement en vue des épreuves à venir en marge des élections de 2023. Pour le gouvernement, il y avait l’image d’un pays qui respecte les droits humains qu’il fallait absolument préserver. De l’autre côté, le pouvoir en place devrait démontrer sa tolérance et son assurance que l’opposition ne ferait pas de poids face aux réalisations qui sont en train d’être menées à travers plusieurs projets sur différents territoires à travers le pays.
L’échec d’un compromis est une indication palpable qu’il est difficile de compter sur la volonté politique de différents animateurs des partis politiques pour trouver des solutions idoines aux problèmes que traverse le pays. Si dans des petites choses on n’arrive pas à s’entendre et à trouver des compromis, comment peut-on s’imaginer que sur des problèmes dont les enjeux sont majeurs, ils arriveront à se mettre d’accord ? Le cas de la CENI (Commission électorale nationale indépendante) est là pour le confirmer. Tant qu’il continuera à tirer en longueur, les espoirs de tenir les élections dans le délai pour éviter justement à ce que ne se réalise une des craintes de Lamuka, c’est-à-dire, le glissement aux élections.
Dans tous les cas, les pressions de Lamuka ne vont pas se limiter certainement à une seule marche. Il y aura bien d’autres actions qu’ils vont chercher à entreprendre. Ce qu’il faut cependant éviter, c’est de tomber dans des situations d’agitation et de troubles qui ne vont certainement pas favoriser la tenue des élections libres et transparentes dans un climat apaisé et propice à l’expression démocratique.
Mwamba Tshibangu