Le Comité de politique monétaire (CPM) a décidé de garder inchangé le taux directeur de la Banque centrale du Congo (BCC) à 25%. La raison principale est que le taux d’inflation a diminué. Et pourtant sur les marchés, les prix de plusieurs produits de base ont pris l’ascenseur. La politique monétaire de la BCC est handicapée par la forte dollarisation de l’économie. Cette situation limite la portée des actions de la Banque centrale du Congo.
Le 31 mai, le Comité de politique monétaire (CPM) a décidé de garder inchangé le taux directeur de la Banque centrale du Congo (BCC) à 25%. Il en est de même des coefficients de réserve obligatoire sur tous les dépôts, soit 10% pour les dépôts à vue en francs congolais et 0% pour les dépôts à terme. Pour les dépôts en devises, les coefficients de la réserve obligatoire sont maintenus à 13% pour les dépôts à vue et à 12% pour les dépôts à terme. La raison principale est que le taux d’inflation a diminué. Il vient de 7,6% en mai 2023 à 5,9% à la même période en 2024. A noter que le taux d’inflation a été de 23,8% en 2023, ce qui a contribué à l’érosion du pouvoir d’achat de la population.
La politique monétaire de la BCC se base sur trois instruments principaux, à savoir le taux directeur ou taux de référence, le coefficient de réserve obligatoire et les billets de trésorerie. Le taux directeur est appliqué aux banques commerciales quand elles viennent se refinancer auprès de la banque centrale. Comme les personnes physiques et morales qui vont emprunter auprès des banques quand elles sont à court de liquidités, les banques commerciales vont aussi auprès de la banque centrale pour emprunter de l’argent quand leur trésorerie est serrée. Dans ce cas, le taux d’intérêt appliqué est le taux directeur. Quand il est élevé, les charges des banques s’accroissent et l’inverse quand le taux est faible.
La situation économique et financière de la RD Congo appelle à la prudence. Alors que La BCC affirme qu’il y a baisse de l’inflation, sur les marchés, les prix de plusieurs produits de base ont pris l’ascenseur (riz, manioc, maïs, légumes, bière, boissons sucrées, etc.…). C’est à se demander si nous vivons dans un même monde. Avec la dépréciation du taux de change et la décision de certains pays de l’OPEP+ de restreindre l’offre de pétrole, les prix des carburants à la pompe pourront augmenter. Dans ce contexte il est difficile de comprendre la décision du gouvernement du 23 mai de baisser les prix des carburant, un mois après leur révision à la hausse. Ceux-ci sont passés, le 25 mai, de 3.475 francs congolais à 3.440 francs pour l’essence. Le pétrole est passé de CDF 2.900 à 2.875, le gasoil de 3.465 à 3.435. C’est incompréhensible au moment où les sociétés pétrolières font face à des difficultés de trésorerie du fait que l’Etat qui subventionne les prix des produits pétroliers ne parvient pas à faire face à ses obligations. Au lieu de procéder à la révision à la baisse des prix des produits pétroliers il aurait été indiqué de les maintenir et verser la plus-value aux entreprises pétrolières. La prochaine hausse des cours de pétrole sur les marchés internationaux risque de se traduire bientôt par la pénurie des carburants et la hausse des prix. Les risques de dérapage budgétaire et des pressions inflationnistes demeurent élevés à cause de la guerre dans l’Est du pays et de la hausse du train de vie de l’Etat par suite de la mise en place des nouvelles institutions.
La politique monétaire de la BCC est handicapée par la forte dollarisation de l’économie. Une forte dollarisation limite la portée des actions de la Banque centrale du Congo. La transmission du taux d’intérêt directeur est diluée lorsque la majeure partie de l’intermédiation se fait en dollars. Ainsi la BCC a demandé, le 3 juin, aux banques commerciales de paramétrer à partir du 31 juillet les terminaux de paiement électronique uniquement en francs congolais. Actuellement, il n’y a que 13% des terminaux sur l’ensemble du territoire national qui sont configurés pour accepter les francs. La décision de la BCC ne concerne pas les guichets automatiques des banques. Mais ce sera compliqué dans un pays où près de 80% de la monnaie en circulation est en dollars américains.
Gaston Mutamba Lukusa