C’est ainsi que pourrait s’intituler le documentaire qui sera diffusé dans quelques mois à propos du retour du Président sortant Kabila à la tête de l’Etat…
Sauf si, nous Congolais, nous ne nous satisfaisons pas uniquement d’avoir éliminé de manière indiscutable aux élections présidentielles le candidat du Front Commun pour le Congo. Mais que nous revendiquions, exigions, de la Commission Électorale Nationale Indépendante la traçabilité des résultats des trois premiers scrutins du 23.12.2018 reportés au 30.12.2018.
C’est le minimum qui nous est dû pour le sacrifice involontaire de toutes les femmes, filles, enfants à l’Est de notre pays victimes du terrorisme des rebelles de la région; C’est la moindre des choses pour tous les Activistes laïcs ou des différentes confessions religieuses qui sont morts, assassinés dans un incendie ou par balles en luttant pour avoir la liberté de se choisir les dirigeants de notre pays; C’est le strict minimum pour les générations présentes et à venir de nos populations sur tout le territoire national et en dehors.
Gardez à l’esprit le slogan de campagne du candidat du Front Commun pour le Congo car tout ce qui va suivre et toute leur stratégie se résume en cela. C’est pour eux un truisme, une évidence: « On gagne ou on gagne ».
Tout commence au mois d’août 2018 par cette désignation qui était à la limite de la constitutionnalité d’un dauphin par le Président de la République au sein du Front Commun pour le Congo dont il est l’autorité morale.
A la limite de la constitutionnalité car le mandat du Président de la République est incompatible avec toute responsabilité au sein d’un parti politique, cfr. Art. 96§2 de la Constitution. Cependant, celui-ci en nommant le candidat présidentiel d’une plate-forme politique électorale assume une responsabilité dans une organisation dont les effets rejaillissent sur les partis politiques qui ont pour raison d’être la conquête du pouvoir.
Il en va de même des membres du Gouvernement qui ont soutenu le même candidat, leurs fonctions sont incompatibles avec toute responsabilité au sein d’un parti politique selon l’article 97 de la Constitution.
Mais, me direz-vous, le F.C.C. n’est pas un parti politique, tout au plus une plate-forme politique… Les Constitutionnalistes y reviendront un de ces prochains jours et vous verrez que le F.C.C. peut être considéré comme un regroupement politique au sens de l’article 14 de la loi n° 06/006 du 9 mars 2006 portant organisation des élections. Passons…
Malgré leur campagne électorale où ils ont sillonné vingt-cinq provinces sur les vingt-six sans entrave aucune:
- avec tous les gouverneurs de province comme coordonnateurs provinciaux du F.C.C.;
- avec l’épouse du Chef de l’Etat sortant qui est entrée dans la danse pour donner un coup de fouet supplémentaire à leur attelage électoral;
- en amputant le corps électoral de ses populations de la diaspora, de Yumbi, de Butembo et de Beni;
- en stoppant la campagne électorale dans la province de Kinshasa sur base d’un ‘édit’ motu proprio de son Gouverneur;
- en limitant la circulation des biens et des personnes de certains autres candidats, etc.
En dépit de tout cela, ils n’ont pas pu matérialiser leur première option pour les Présidentielles, leur premier « on gagne… » car le peuple les a sanctionné en votant TOUT sauf le candidat du pouvoir au scrutin du 30.12.2018.
Il reste leur seconde option « …ou on gagne! »
Fort de l’opacité des données de la Commission Électorale Nationale Indépendante axée notamment sur l’utilisation du kit électronique de vote pour la transmission des chiffres biaisés d’une part, et la non-publication des procès-verbaux de vote et de dépouillement d’autre part; Ils tentent néanmoins d’arriver à la Présidence de la République en s’octroyant les assemblées nationales et provinciales.
Comme chacun le sait, tout pouvoir émane du peuple qui l’exerce directement par voie de référendum ou d’élections et indirectement par ses représentants comme le dispose l’article 5 de notre Constitution.
En effet les représentants du peuple peuvent aussi conférer le pouvoir suprême lorsque l’on s’y prend bien.
Soyez très attentifs car les pièces du rouage s’imbriquent peu à peu mais ne laissent rien paraître à première vue.
- POUVOIR EXÉCUTIF
Le Président de la République nomme le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci comme prévu par l’article 78 de la Constitution.
- Ayant la majorité parlementaire avec les ‘résultats’ pour le moment intraçables de la Commission Électorale Nationale Indépendante, le F.C.C. aura le Premier ministre donc le pouvoir exécutif national.
- En ayant la majorité dans les assemblées provinciales, le F.C.C. pourra désigner la grande majorité des Gouverneurs de province et ainsi s’arroger le pouvoir exécutif provincial.
- POUVOIR LÉGISLATIF
Avec le contrôle des assemblées provinciales, les députés provinciaux du F.C.C. vont également élire les sénateurs et avoir la majorité au Sénat. Ils offriront sans hésitation la présidence du Sénat à leur chère autorité morale.
Par conséquent le pouvoir législatif sera concentré aux mains du F.C.C. qui aura, et l’Assemblée Nationale, et le Sénat qui constituent à eux deux le Parlement. Ils pourront faire passer toutes les lois qui leur semblent bonnes et contrôler avec bienveillance la gestion du gouvernement par leur Premier ministre ainsi que les entreprises et services publics (cfr article 100§2 de la Constitution).
A ce stade ils auraient quasi tous les pouvoirs, le Législatif et l’Exécutif aux niveaux national et provincial. Le pouvoir Judiciaire étant le cadet de leur souci.
Mais au-delà de ça, voici le plus grand tour que le F.C.C. jouera et c’est du grand art.
- POUVOIR TOTALITAIRE
Chacune des deux chambres du Parlement ainsi que le Gouvernement ont l’initiative de la révision constitutionnelle (tout comme le Président de la République et 100.000 citoyens) par l’article 218 de la Constitution.
Or ayant la majorité absolue dans les deux chambres avec les chiffres toujours intraçables de la C.E.N.I., et dirigeant le Gouvernement, le F.C.C. pourrait actionner soit le levier du Gouvernement soit celui du Parlement pour réviser l’article qui leur pose le plus problème, l’article 70, qui limite le nombre et la durée des mandats du Président de la République:
« Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois ».
Beaucoup pensent que cet article est intangible car verrouillé par le fameux article 220§1 qui dispose que:
« La forme républicaine de l’Etat, le principe du suffrage universel, la forme représentative du Gouvernement, le nombre et la durée des mandats du Président de la République, l’indépendance du Pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical, ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle ».
Et pourtant, rien n’interdit de réviser l’article interdisant de réviser un ou plusieurs articles de la Constitution!!!
Cet article 220 d’abord puis l’article 70 seront révisés par les 2 chambres sans passer par un référendum car, si tout reste en l’état, ils auront la majorité qualifiée des trois cinquièmes pour l’approuver en congrès comme l’exige la Constitution en son article 218 dernier alinéa.
En conséquence de quoi, le nombre voire la durée du mandat du Président de la République seraient augmentés. On passerait dans le même temps au suffrage indirect par le Parlement réuni en congrès pour l’élection du Président de la République.
Cela ouvrira la voie totalitaire, pour ne pas dire royale, à Kabila pour revenir à la tête de l’Etat de manière ‘démocratique’.
Vous pensez que c’en est fini là?
Oh que non! Voici le coup de grâce:
Le Premier ministre (F.C.C.) qui est le SEUL au regard de la Constitution à pouvoir demander à la cour constitutionnelle de déclarer l’empêchement définitif du Président de la République, va saisir celle-ci pour organiser la vacance du pouvoir en sortant de son chapeau une cause au choix (haute trahison en ce compris enrichissement illicite, corruption passive comme active, démission, décès, etc.) en conformité avec l’article 76 de la Constitution et ainsi sous une certaine forme le Premier ministre va destituer le Président de la République issu de l’Opposition, quel qu’il soit.
Rubis sur l’ongle le Président du Sénat, Kabila donc, voté par ses pairs Sénateurs deviendrait ainsi le Président de la République intérimaire sans passer par des élections.
Pour clouer le bec à toutes les forces positives qui lui ont enjoint de ne pas se représenter, le Président sortant dont le dauphin avait perdu sans appel les Présidentielles organiserait lui-même de nouvelles élections au suffrage universel indirect dont il sortira bien évidemment vainqueur.
Il expliquera pour se justifier comme il avait déjà évoqué que le coût énorme des élections au suffrage universel direct n’avait plus de raison d’être car on arrive au même résultat à moindre frais. Surtout que nous venons à peine de sortir d’élections générales onéreuses. Qui par ailleurs sont inachevées vu que d’autres scrutins, à divers niveaux de pouvoir doivent encore se tenir…
Et de conclure que cela ne sera pas une première puisque Joseph Kasa-Vubu fut élu de cette manière comme premier Président de la République.
Sous des dehors de démocratie nous verrons alors s’enraciner une dictature peu éclairée et par nature prédatrice laissant à la marge la Congolaise et le Congolais de l’extérieur comme de l’intérieur du pays au profit d’une oligarchie plus puissante que jamais.
Ce tableau vous paraît incroyable? Vous n’avez encore rien vu… Ceci n’en est que la version la moins violente.
Ce que le Congo sera demain, et pour longtemps encore, dépendra de la traçabilité des résultats des trois scrutins du 30.12.2018 par la publication des procès-verbaux de votes et de dépouillement signés par les témoins des partis politiques et les observateurs des organisations nationales et internationales. Voire du (re-) comptage manuel des bulletins de vote si des incongruités venaient à persister.
Les deux batailles remportées dans le sang et dans les larmes mais avec sagesse en évitant d’abord le troisième mandat du Président sortant puis en sanctionnant par la suite son successeur désigné dans un processus électoral chaotique ne doivent pas altérer notre jugement ni affaiblir notre vigilance collective.
La victoire finale de l’expression de la volonté populaire est à gagner dans les prochains jours avec le concours de nos Juges de la cour constitutionnelle qui ont le devoir non seulement déontologique mais le devoir tout simplement en tant que citoyens de faire manifester la vérité des urnes qui libérera toute la nation.
Sentiments patriotiques,
Par Patrick Yogo
Porte-parole du M.P.R. Belgique