Justice: La première audition de JM Kabund n’a pas mobilisé les Kinois

« Jean-Marc Kabund-a-Kabund, l’homme seul? ». C’est la question que des observateurs n’ont pas manqué de se poser au regard de la foule clairsemée qui a « escorté » l’ancien 1er vice-Président de l’Assemblée nationale. Arrivé au Parquet général près la Cour de cassation, jeudi 28 juillet, aux alentours de 11h00, Kabund a quitté le lieu à l’issue de près quatre heures d’audition. Les faits mis à sa charge sont gravissimes: « outrage » au chef de l’Etat. Contrairement aux prévisions des « analystes politiques » autoproclamés, l’ex-président a.i. de l’UDPS n’a pas reçu « le grand honneur » de monter dans le fourgon cellulaire. On imagine le « désenchantement » de tous ceux qui prétendaient que Kabund allait être arrêté. Une seconde audition est prévue le mardi 2 août.

Jean-Marc Kabund a dû se rendre à l’évidence que sa « cause » est loin de mobiliser la tentaculaire capitale congolaise avec ses 10 à 12 millions d’âmes. Une soixantaine d’individus dont manifestement des «  »curieux » l’ont accompagné jusqu’à l’ex-building INSS qui abrite l’office du procureur général près la Cour de cassation.

Dans une réquisition n°4159 datée du 22 juillet 2022, le procureur général près la Cour de cassation avait demandé au Bureau de l’Assemblée nationale « l’autorisation » et non la levée des immunités du parlementaire afin d’ouvrir une « instruction » à sa charge.

Que reproche-t-on à Jean-Marc Kabund?
Le Procureur général près la Cour de cassation revient sur certains de l’allocution prononcée par l’intéressé lors de son point de presse du 18 juillet. L’orateur « a tenu des propos (…) injurieux et de nature à porter atteinte à l’honneur dû aux institutions publiques et à la dignité du chef de l’Etat avec l’intention de l’offenser ». Le magistrat d’égrener aussitôt ces griefs.

On retiendra, pour l’essentiel, quelques allégations: « Felix Tshisekedi est un danger public au sommet de l’Etat »; « l’absence d’une vision claire et d’un leadership convaincant dans le chef du président Felix Tshisekedi », l’incompétence notoire et le mégestion institutionnalisée; « les caisses de l’Etat saignent jour et nuit; les militaires et les policiers vivent dans des conditions exécrables; depuis que Felix Tshisekedi est au pouvoir il n’a jamais songé à doter l’uniforme aux éléments des FARDC et la PNC ».

Qualification des faits.
Pour le Procureur général près la Cour de cassation, « les faits tel qu’exposés sont susceptibles de constituer les infractions d’injures publiques, des imputations dommageables, d’outrages envers les autorités publiques, d’offenses envers le chef de l’Etat et de propagation des faux bruits ». La peine oscille entre deux mois et deux ans d’emprisonnement.

Conscient de la gravité des faits et surtout des peines encourues, le procureur général près la Cour de cassation a tenu à obtenir le « feu vert » du Bureau de l’Assemblée nationale afin le député Kabund vienne donner sa part de vérité. Un adage dit que « la charge de la preuve incombe à celui qui affirme et non à celui qui nie ». L’autorisation de l’Assemblée nationale obtenue, il ne restait plus qu’à entendre Kabund. Date et heure: le jeudi 28 juillet à 10h30.

Outrage.
Dans le Lexique des termes juridiques publié chez Dalloz, 2014-2015, le mot « outrage » renvoie « à l’expression diffamatoire ou injurieuse destinée à diminuer l’autorité morale de la personne investie d’une fonction de caractère public désignée par la loi ». Le Dictionnaire du vocabulaire juridique 2021, Lexis Nexis, s’attarde sur le vocable « offense ». Celui-ci est définit comme un manque d’égards à l’encontre d’une personne chargée de mission d’une service public ou dépositaire de l’autorité de l’Etat. On le voit, l’outrage dépasse la personne de l’individu Felix Tshisekedi. C’est la dignité de la fonction à caractère public assignée par la loi qui est préservée.

Dans la soirée de jeudi 28, les conversation tournaient essentiellement sur la première audience de Kabund. L’ancien 1er vice-Président de l’Assemblée nationale aurait-il convaincu le magistrat instructeur de sa bonne foi? L’opinion congolaise, elle, semblait divisée. Entre, d’une part, les partisans de l’embastillement de Kabund – pour prêcher par d’exemple – et d’autre part, ceux qui militent pour un non-lieu au nom de l’inopportunité des poursuites.

Choix cornélien.
C’est le lieu de saluer le sang-froid et le professionnalisme de l’Avocat général Useni Sefu Caïphe. Il reste un dilemme: la nécessité pour les pouvoirs publics de sévir à chaque violation de la loi. Et le risque que la sévérité de la sanction n’élève « Jean-Marc » au rang de « Martyr ». Ses quelques partisans n’attendraient que cette dernière issue. Rendez-vous est pris pour le mardi 2 août.


Baudouin Amba Wetshi

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