Selon diverses sources, François Beya Kasonga devait être transféré, lundi 4 avril, à la Prison centrale de Makala. Au milieu de la soirée, personne n’était en mesure de confirmer le passage du conseiller spécial du chef de l’Etat en matière de Sécurité à l’entrée principale de ce pénitencier. Des informations parcellaires indiquent que l’ANR (Agence nationale de renseignements) aurait (finalement) transféré le dossier ad hoc à l’Officier du ministère public (OMP).
Sur son compte Twitter @JeanClaudeKat2, Jean-Claude Katende, président de l’Asadho (Association africaine de défense des droits de l’Homme) confirme le « transfert » de François Beya Kasonga, lundi, à la prison de Makala. « Nous devons continuer à nous mobiliser pour que ses droits fondamentaux soient respectés et qu’il ait droit à un procès juste et équitable », souligne-t-il en martelant: « On ne veut pas de procès à caractère politique ».
Le collectif « Free François Beya », lui, « alerte » l’opinion sur ledit « transfert ». Dans la soirée de lundi, plusieurs sources généralement bien informées n’osaient guère confirmer l’arrivée du conseiller spécial en matière de Sécurité à Makala. « Lundi 4 avril, Beya se trouvait encore dans une villa où il était assigné à résidence. Il n’était plus dans les installations de l’ANR », assurent-elles. Une certitude: le dossier contenant la note rédigée par l’ANR, en sa qualité d’officier de police judiciaire, se trouverait déjà sur la table de l’Officier du ministère public qui n’est autre, dans le cas sous examen, que l’Auditeur général des FARDC, le lieutenant-général Lucien Likulia Bakumi… en personne. Celui-ci aura à confirmer ou à requalifier l’infraction constatée par les OPJ de l’ANR. « Il n’est pas exclu que l’auditeur général des FARDC émette son avis sur l’opportunité des poursuites, commente un juriste. La justice a pour mission principale de préserver la paix sociale ».
58 JOURS DE « GARDE A VUE »
Arrêté le 5 février 2022, François Beya Kasonga, a vécu – jusqu’à la preuve du contraire – la « garde à vue » la plus longue. A savoir: 58 jours. Au lieu de 48 heures prescrites par l’article 18-4 de la Constitution. L’intervention de l’auditeur général des FARDC semble se confirmer qu’on se trouverait dans le cas d’une « infraction militaire ».
Porte-parole de la Présidence de la République, Tharcisse Kasongo Mwema Yamba Y’Amba n’avait pas dit autre chose dans son unique intervention le 8 février 2022: « Il s’agit d’une affaire relevant de la sûreté de l’Etat. Une matière de ce genre relève de la compétence exclusive de l’ANR (…). (…), dans l’état actuel des choses, on peut affirmer que les enquêteurs disposent d’indices sérieux attestant d’agissement contre la sécurité nationale ».
Nombreux sont des observateurs qui mettent en doute la « fiabilité » des éléments probants recueillis par l’ANR. Frère cadet du prévenu, Freddy Kanku Kasonga estime, dans une correspondance adressée à l’Administrateur général Jean-Hervé Mbelu Biosha, que l’ANR n’avait « pas de charges précises » contre son frère. Un expert en criminologie abonde quasiment dans le même sens.
Pour ce dernier, il est difficile de comprendre que l’ANR ait eu besoin de 58 jours pour « ficeler » le dossier Beya à son niveau. « L’arrestation est considérée dans les ‘services’ comme l’acte ultime. Quand l’ANR procède à l’interpellation d’un suspect, cela suppose qu’elle a réuni, en amont, des éléments matériels et pas seulement des indices », argumente-t-il. Ajoutant: « L’infraction s’apprécie sur la base d’éléments matériels ».
MBELU BIOSHA SUR UN « SIEGE EJECTABLE »?
Dans les milieux proches des « services », rares sont les experts qui pensent « très sérieusement » que Beya ait pu tremper dans une « conspiration » destinée à attenter à la sécurité nationale ou l’intégrité physique du premier magistrat du pays. « François Beya n’avait pas que des amis, loin de là. L’homme est réputé arrogant et revanchard. Il y a sans doute une file des gens qui attendaient l’occasion de lui rendre la monnaie de sa pièce. De là à l’accuser de comploteur, il y a un fossé à ne pas franchir » commente un agent de l’ANR qui avoue son aversion vis-à-vis de « Fantomas ».
On apprenait, au courant du mois de mars, de l’arrestation, dans le cadre du même dossier, d’un certain Elie Lungumbu. Ancien directeur provincial de l’ANR (Redoc) au Sud-Kivu, cet individu sulfureux est devenu « célèbre » du fait de sa proximité avec Zoé « Kabila ». Malgré qu’il a foulé le sol congolais depuis plus de deux décennies, le frère de l’ex-président « Joseph Kabila » refuse de s’intégrer dans ce pays qui lui a tout donné. Il « baragouine » une langue qui ressemble au français. Il ne s’exprime qu’en Swahili tanzanien. Sieur Lungumbu lui servait d’interprète. Selon des « mauvaises langues », « Elie » serait un expert en « rapt ». Serait-il mêler dans le dossier Beya? C’est à voir. Il faut dire que nul ne sait, à ce jour, le fait matériel reproché à Beya.
Au moment d’entamer le dernier paragraphe de ce « papier », l’auteur de ces lignes reçoit un coup de fil de Kinshasa. Le correspondant « supplie » de rester anonyme. Selon ce correspondant, « Fantomas aurait organisé les contacts entre la firme Wagner et les autorités centrafricaines d’une part et maliennes d’autre part ». Procès d’intention?
Revenons au dossier. Certains observateurs croient mordicus que le « siège » de l’Administrateur général Mbelu Biosha pourrait, à terme, devenir « éjectable ». Et ce dans l’hypothèse où l’Officier du ministère public jugerait « opportun » de classer sans suite ce dossier, au nom de la paix sociale. Affaire à suivre…
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Baudouin Amba Wetshi