Pour les opérations financières douteuses en RDC on n’a pas besoin de paradis fiscaux, ni transferts complexes et multiples pour brouiller les pistes.
Il suffit d’avoir un gendarme qui participe activement à ces opérations et un autre qui ne veut pas voir et laisse faire.
Le gendarme qui participe est le trio Finances/Budget/BCC, aidé par quelques banques locales qui, sous couvert « d’ordres reçus » facilitent et parfois initient les opérations douteuses. Non seulement elles bénéficient d’une partie du butin mais toute indiscrétion du personnel est violemment réprimée allant jusqu’à la condamnation à mort par les tribunaux.
Dans ces conditions les opérations sont simples: quelques écritures suivies de retraits en cash massifs et le tour est joué.
Le gendarme qui ne veut pas voir est le gendarme du dollar américain. Après les affaires des cent jours, des 15 millions des pétroliers, des 200 millions d’avance sur impôts payés par la Gecamines et d’autres opérations en cash largement révélés dans la presse, ce gendarme, malgré ses grandes déclarations sur la lutte contre la criminalité financière reste étrangement muet. Alors qu’il a droit de vie ou de mort sur les banques et qu’il pourrait exiger des audits indépendants des banques et même de la BCC et empêcher les dérives, son silence permet la continuation des pratiques de mauvaise gouvernance.
Ces derniers jours, un rapport intitulé « Congo Hold-Up » a été publié et circule sur le net. Il s’agit du rapport d’une enquête menée par un consortium de journalistes et de ONG’s concernant des opérations financières douteuses en RDC.
Compte tenu de l’influence que pourrait avoir ce consortium sur les décideurs politiques, il est à espérer que le gendarme du dollar se réveille car les pratiques dénoncées par le rapport « Congo Hold up » et qui concernent l’ancien régime perdurent aujourd’hui.
Mais il est à craindre que pour les mêmes raisons de « maintien de la stabilité » il persiste dans son aveuglement volontaire.
Espérons qu’une demande similaire soit faite aujourd’hui par le consortium qui a publié « Congo Hold up » et qu’elle ne connaisse pas le même traitement que celui de nos intellectuels congolais de la DUC.
Si le consortium reste dans le narratif, sans actions en justice bien menée et des pressions sur les « partenaires techniques et financiers », on en parlera pendant quelques jours, les opérations illégales continueront et les « bailleurs » continueront à supporter la mauvaise gouvernance.
Tout en félicitant les auteurs du rapport il convient de souligner que les montants dont il est question totalisant environ 140 millions de $US, sont ce qu’un vol à l’étalage est comparé à un hold-up si on les compare aux opérations douteuses dans les secteurs minier et pétrolier.
Espérons que le consortium continue sur sa lancée et traque les autres « gros poissons » comme l’affaire Bukanga Lonzo, qui est en train d’échapper à la justice alors qu’elle porte sur plus de 200 millions de $US.
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Jean-Marie Lelo Diakese