Agée de 29 ans, activiste de la société civile, Gloria Sengha Panda Shala, change de fusil d’épaule. Après avoir milité, durant une dizaine d’années, dans les mouvements citoyens « La Lucha » (La Lutte pour le changement) et VICI (Vigilance citoyenne), la jeune dame a pris la redoutable résolution de quitter le « militantisme citoyen » pour s’engager dans l’univers impitoyable qu’est le monde politique. Se réclamant de la social-démocratie, elle se tâte encore avant d’adhérer dans la formation politique de son choix. Ses anciens camarades, eux, la suspecte d’avoir pris la carte du parti « Ensemble pour la République ». L’intéressée explique la motivation de sa démarche. INTERVIEW.
Confirmez-vous l’information selon laquelle vous avez tourné la page de la société civile pour rejoindre le monde politique?
Oui, je confirme!
Quel est l’élément déclencheur de ce changement de cap?
Après avoir brandi des pancartes dans la rue sans que nos revendications obtiennent gain de cause, j’ai estimé qu’il serait plus efficient d’intégrer les institutions pour faire promouvoir le changement.
En 2017, vous avez participé à Chantilly, en France, à la rédaction du « Manifeste Citoyen Esili! ». Plusieurs « journalistes engagés » qui étaient présents se sont engagés, par la suite, dans la politique active en invoquant la même motivation. Pensez-vous que la présence de ces derniers dans les « centres décisionnels » aient contribué à un quelconque changement?
Il m’est difficile de dresser le bilan des actions de ces compatriotes.
Sur le plan idéologique, où pourrait-on vous situer?
Je m’identifie comme une sociale-démocratique. Dans un monde dominé par le capitalisme, j’estime que l' »Etat-providence » a encore un rôle à jouer. J’entends lutter contre les inégalités et pour une juste redistribution des richesses.
Le Congo-Kinshasa compte, semble-t-il, 700 partis politiques. Avez-vous déjà fait votre choix?
Au moment où nous parlons, je n’ai pas encore fait mon choix en dépit du fait que j’ai désormais le statut de « femme politique ». Je suis encore occupée à scruter des projets de société en espérant trouver des convergences au niveau des valeurs.
Que répondez-vous à vos anciens camarades de « VICI » qui vous suspectent de « flirter » avec le parti « Ensemble pour la République »?
Je n’ai pas adhéré à l’Ensemble de Moïse Katumbi. Je n’ai pas encore fait mon choix. Je dois cependant vous avouer que je compte de nombreux amis proches dans le parti « Ensemble pour la République ». Ces amis m’ont manifesté leur sympathie lors du décès de mon père. Ce fait est à l’origine des spéculations au sein de « VICI ».
Dans une interview accordée à Congo Indépendant le 22 octobre 2021, vous avez déclaré notamment que « rien n’a changé en matière d’exercice des droits et libertés ». Devrait-on interpréter votre départ de la société civile comme un « abandon du combat »?
Absolument pas! Je suis une militante dans l’âme. C’est depuis l’âge de 20 ans que je milite pour la défense des droits et libertés. C’est une question de convictions. Je garde la même énergie. Aucun parti ne pourrait m’en empêcher.
Dans la même interview, vous avez dit ces mots: « Ceux qui sont morts depuis 2015 pour l’avènement d’un Congo démocratique seraient-ils fiers de nos alliances politiques? » Je vous retourne la même question…
Les compatriotes ayant perdu la vie au cours de nos combats pour le triomphe des droits et libertés seront toujours fiers de moi. L’acte que je viens de poser ne marque pas une rupture. C’est une continuité du combat sous un autre format. Il s’agit maintenant de prendre le pouvoir. Je suis convaincu que nos défunts camarades seront fiers de moi. Jusqu’à quand va-t-on manifester dans la rue sans être écoutés? Nous devons entrer là où se prennent les décisions. C’est l’acte que je viens de poser.
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Propos recueillis par Baudouin Amba Wetshi