La réalité congolaise est troublante à plus d’une raison. Le cas pourrait être illustré aisément au regard de deux phénomènes émergeant qui se disputent la primauté dans le subconscient des Congolais. Il y a une tendance qui a toujours existé, mais qui a été exacerbé ces derniers temps par l’évocation de la balkanisation comme menace sociétale à redouter alors que l’hécatombe qui émiette des morts par milliers continue insidieusement sans affecter outre mesure les commanditaires et les exécutants séculiers.
Il est à se demander s’il est juste de continuer à percevoir le danger qui est manifeste et réel dans cet ordre des choses? Autrement dit, où serait passé le Génocide congolais? Subsidiairement, comment pourrait-on le mettre à l’avant plan sur les agendas internationaux de manière à le sortir de l’ornière du silence dans laquelle il est présentement enfermé?
Les deux phénomènes étant indissolublement liés, les Congolais ne pourraient-ils pas concevoir une approche holistique qui inverserait la tendance actuelle, empêchant du coup l’autre processus, la balkanisation, à poursuivre son chemin impétueux, destructeur et sinistre? Les gens s’affairent plus sur les effets que sur les causes fondamentales du problème qui est en train d’écumer, au fil des ans, le fondement même de la nation congolaise, c’est-à-dire, l’unité de son peuple et par-dessus tout, l’intégralité du territoire national.
Ces derniers temps, plusieurs personnalités de haut calibre se sont levées pour dénoncer le projet de balkanisation du pays qui continue à s’enraciner à vive allure au vu des massacres répétés qui ont pour champ d’opération l’est du pays. L’acte de dénonciation est louable en soi. Toutefois, ce geste si noble soit-il, aurait été plus incisif si toutes les dispositions étaient prises pour s’attaquer ouvertement à tous ceux et celles qui sont derrière ce projet funeste de balkanisation.
Après le constat des manœuvres sordides visant la balkanisation, a-t-on jamais cherché, outre à la présence des militaires congolais sur le terrain, à prospecter d’autres avenues pour le contrer efficacement et l’éradiquer définitivement? Bien que les Congolais soient unanimement opposés à ce vil projet, il faut reconnaître qu’ils sont fortement divisés quant aux voies à emprunter pour en venir à bout. Cette question étant hautement sensible et humanitaire, il n’en demeure pas moins qu’il est éminemment politique tout en étant d’intérêt national et stratégique. Ce faisant, elle devrait dégager au-delà des barrières partisanes et des démarcations idéologiques, l’unanimité de vues.
Dès lors, les Congolais feraient mieux de miser plus sur les actions que sur les paroles vaines et sans effet. Le génocide s’opère au grand jour pour parvenir à imposer un jour la balkanisation du pays. Le génocide congolais actuel débute, comme tout le monde le sait, avec l’avènement de l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre) qui s’insurgea contre le régime dictatorial de Mobutu. C’est donc depuis les années 1996 que cette guerre larvée est en train de tuer, à dessein, des millions de Congolais. Ces actes ignominieux, qui découlent d’un vaste complot, portent bien la signature de personnages qui sont connus et des pays – figurant dans des rapports de l’ONU et des ONG – qui ont trempé dans ces massacres à grande échelle.
Si ce pogrom perdure dans le temps et ne trouve pas d’échos au niveau international, c’est à cause de nombreuses complicités de la communauté internationale qui protège, à travers de nombreuses multinationales, leurs intérêts. C’est également, en grande partie, à cause des Congolais, eux-mêmes, qui n’ont pas su bouger avec dextérité et détermination pour faire reconnaître le génocide congolais alors qu’il est, de loin, le drame qui a connu plus de massacres depuis la 2ieme guerre mondiale.
Néanmoins, il faut admettre à ce sujet que plusieurs initiatives ont été assumées par des Congolais, de manière isolée, sans qu’il y ait une coordination pouvant faire résonner leur voix, à l’unisson. C’est ici qu’il faut saluer l’initiative du professeur Bele qui lance, à travers le monde, une journée commémorative du Génocide congolais. La date fixée est le vendredi, 28 février 2020. Une invitation est adressée à tous les Congolais et à toutes les Congolaises de s’habiller en noir, en signe de deuil et d’observer à 12 heures, de ce jour-là, une minute de silence. C’est mieux encore si les gens pouvaient se réunir pour marquer cet événement. L’initiative va plus loin en ne se limitant pas à manifester l’acte de désapprobation face au génocide. Bien plus, elle voudrait actionner le mécanisme de condamnation des coupables qui seront désignés par une Cour ad hoc et jugés selon les procédures pénales.
Mettre en acte une procédure judiciaire, en dehors des institutions légales reconnues est une gageure. C’est un acte intrépide qui démontre la détermination d’aller jusqu’au bout de cette histoire. Car, les Congolais ont « droit de vivre en sécurité dans un environnement paisible » soutient le prof Jean Bele comme le stipule, dit-il, la déclaration universelle des Droits de l’homme.
À la suite de plusieurs initiatives qui n’ont pas porté fruit, le temps est arrivé pour les Congolais de mettre en avant plan le Génocide qui se perpètre au jour le jour afin de stopper définitivement le projet funeste de balkanisation.
Par Mwamba Tshibangu