Un très mauvais signal. C’est le moins qu’on puisse dire des nominations intervenues mercredi 10 juin dans des entreprises du portefeuille de l’Etat. Trois patronymes « emblématiques » mettent à nu un mauvais casting. Il s’agit de: José Makila Sumanda, Lambert Mende Omalanga et Abdallah Bilenge. Selon des sources, d’autres nominations sont attendues dans les heures ou jours qui suivent. Seize mois après l’investiture de Felix Tshisekedi à la tête de l’Etat, le « changement » prend chaque jour le relief d’une « mission quasi-impossible ».
Les spectateurs qui ont suivi l’émission « Kiosque » de Canal Congo Télévision (CCTV) animée, mercredi 10 juin, par Serge Kabongo, ont pu suivre notamment Jean-Marie Kasamba. Celui-ci a claironné sans rire que la situation du pays est « devenue pire qu’à l’époque de Joseph Kabila ». Comme à son habitude, le patron de « Télé 50 » n’a articulé aucun argument à l’appui de sa thèse. Faisait-il allusion au fait que le dollar américain était échangé contre plus de 2.000 FC?
C’est un véritable message subliminal que Kasamba a envoyé. Un message qui pourrait être décrypté comme suit: « Kabila » n’entend en aucun permettre à son « allié », le président Felix Tshisekedi, à réussir son quinquennat. A-t-on déjà vu quelqu’un qui a failli contribuer au succès de son remplaçant?
PARTAGE NI ÉQUITABLE NI ÉQUILIBRÉ DU POUVOIR
Dans la pure logique du « partage équitable et équilibré du pouvoir » instauré lors du régime de Transition « 1+4 » (2003-2006), le chef de l’Etat congolais a signé mercredi 10 juin une série d’ordonnances portant nomination des mandataires dans les entreprises du portefeuille de l’Etat. Sauf qu’ici, le partage n’est ni équitable ni équilibré. Le Fcc a la part du lion.
S’il est vrai que tous les « promus » ou reconduits sont de citoyens congolais jouissant de l’égalité devant la loi, il n’en demeure pas moins vrai que certains d’entre eux sont un peu trop « marqués » par un passé récent que la grande majorité des Congolais voudrait oublier.
Ce passé s’appelle les « 18 années de pouvoir » de « Kabila ». Dix-huit années jalonnées de mensonges d’Etat, de violations massives des droits et libertés, d’impunité. Sans oublier la gabegie, la corruption, l’insécurité des personnes et des biens et l’analphabétisme.
CLIENTÉLISME
Ancien ministre de la Communication et des médias, Lambert Mende Omalanga est le nouveau président du conseil d’administration de la Ligne maritime Congolaise (LMC). José Makila Sumanda, ancien ministre des Transports et voies de communication va occuper la même fonction à l’ex-Onatra. D’aucuns pourraient ergoter qu’il ne s’agit pas des postes exécutifs. Et alors?
On se demande bien les critères ayant présidé au choix de ces deux politiciens friands des intrigues et des courbettes. Des politiciens qui n’ont laissé aucun souvenir immuable lors de leur passage à la tête des ministères précités. Aucune réforme majeure. Ne dit-on pas « qui peut le plus, peut le moins »?
Que dire de la reconduction du nommé Abdallah Bilenge à la tête Direction générale de la très juteuse Régie des voies aériennes (RVA)? Depuis 2014, ce service public fait payer aux voyageurs une taxe aéroportuaire dite « Go pass » respectivement de $ 50 pour le vol extérieur et $ 15 pour le vol domestique. Objectif: assurer la réfection des aéroports du pays. Durant les « années Joseph Kabila », la RVA a été réduite au rang d’une « pompe à fric » pour les « puissants du moment ». Du « fric » géré dans une totale opacité.
L’IMPOSSIBLE RENOUVEAU
Selon l’actuel ministre des Transports et voies de communication, cette Régie aurait encaissé un montant de $ 138 millions de 2014 à 2019. Dieu seul sait la destination donnée à cette somme mirobolante. Il apparaît que le maintien de Bilenge à son poste est motivé plus par simple clientélisme qu’une compétence avérée. « Joseph Kabila » a voulu récompenser un de ses « clients ». Il en est de même de Mende, Makila et les autres.
Jean-Marie Kasamba n’a peut-être pas tort. Depuis la « passation pacifique » du pouvoir entre le Président sortant et l’entrant, aucun changement majeur n’est intervenu dans les grands corps de l’Etat. Tous les poste-clés sont tenus par des hommes et des femmes qui doivent leur ascension sociale à « Kabila ». C’est le cas de: la Banque centrale, les Régies financières, les entreprises du portefeuille, la Douane et accises (DGDA), les ministères des Mines, des Finances et de la Défense, l’armée, la police, les services de renseignements. Comment pourrait-on promouvoir un semblant de renouveau dans ces conditions? « Fatshi » se trouve encerclé par une meute des loups et des hyènes.
En laissant son prédécesseur continuer à politiser les entreprises du portefeuille de l’Etat, le président Felix Tshisekedi envoie un très mauvais signal en direction de la grande majorité des Congolais. Une majorité désenchantée. Il doit agir vite. A défaut, le risque est grand qu’il perde totalement l’opinion avec le retour aux affaires des personnalités du genre José Makila et Lambert Mende…
B.A.W.