Depuis la nuit des temps, les « partenaires » du Congo-Zaïre n’ont cessé de reprocher aux dirigeants du pays de consacrer une part importante du budget de l’Etat aux dépenses dites de « souveraineté » privilégiant les domaines sécuritaires et de défense au détriment des secteurs ayant un impact social. L’intrusion du Coronavirus met à nu l’impréparation de ce grand pays de plus de 80 millions d’habitants à faire face à ce genre de fléau. L’infrastructure sanitaire obsolète ne répond guère aux standards internationaux. En France, le discours est « martial ». L’Etat affirme son autorité. Il met tout en œuvre pour préserver la santé des Français.
L’heure n’est plus à revenir sur la communication « chaotique » du ministre congolaise de la Santé, le médecin Etini Longondo dont la langue n’a cessé de fourcher à plusieurs reprises avant de trouver les renseignements exacts sur le « premier cas du voyageur testé positif » arrivé à Kinshasa, le dimanche 8 mars, par un vol de Brussels Airlines. On le sait maintenant. Il s’agit du Congolais Faustin Fitika. L’homme vit en France. Il ne s’agissait donc pas d’un citoyen belge ou d’un Français comme initialement annoncé.
Le Coronavirus est au centre de toutes les conversations non seulement dans la capitale congolaise mais aussi aux quatre coins de ce pays de 80 millions d’habitants où la santé publique n’a jamais été considérée comme un secteur vital. Encore moins une priorité. La part du budget destiné à ce domaine en témoigne. Pour l’exercice 2020, la loi de finances a prévu, pour faire simple, 5, 88 $US/ an et par habitant.
Pendant que sous d’autres cieux, on assiste à une « mobilisation générale » pour éradiquer le Covid-19, l’appellation scientifique du Coronavirus, au Congo-Zaïre, la nonchalance légendaire des gouvernants continue. Le président Felix Tshisekedi se tait. Ses homologues, eux, montent en premier ligne. On le verra plus loin.
Dans son allocution prononcée lundi 16 mars à l’occasion de la rentrée parlementaire (session ordinaire du mois de mars), le président du Sénat Alexis Thambwe Mwamba a déclaré que les membres de la Chambre haute pourraient être confinés chez eux jusqu’au moment où « le sénat aura la certitude que les élus ne seront pas exposés à la pandémie Coronavirus ».
PÉNURIE D’ASSISTANCE RESPIRATOIRE
On apprenait lundi soir que le Premier ministre Sylvestre Ilunga a tenu une réunion du comité multisectoriel du gouvernement. Et ce en prévision du conseil de ministre extraordinaire qui sera présidé, mardi 17 mars, par Felix Tshisekedi Tshilombo.
Quelle est l’état de la situation au Congo-Kinshasa? Des sources médicales indiquent que le fameux virus a la particularité d’étouffer la personne infectée au niveau des poumons. « A la date du 15 mars 2020, notre pays ne dispose que de 9 appareils d’assistance respiratoire », confie un expert qui a requis l’anonymat.
Au moment où ces lignes sont écrites, l’ex-Zaïre compterait trois cas testés positifs à cette pandémie. Dans son discours, Thambwe Mwamba a relevé que notre pays pourrait vivre une « situation grave » dans le cas où cette fléau se propagerait.
Dans un communiqué publié dimanche 14 mars, le ministre de la Santé a assuré que les personnes ayant été en contact avec les deux premiers voyageurs infectés ont été « retracés » et « listés ». Le troisième voyageur, en provenance de la Suisse et trois membres de sa famille auraient été internés et suivent des soins.
EVITER DE DEVOIR AFFRONTER EBOLA ET CORONAVIRUS
Sans rire, le ministre de la Santé annonce, sans donner la moindre précision de date, que cinq hôpitaux « vont bénéficier » d’un équipement « réhabilité » pour prendre en charge les personnes infectées. Il s’agit de: l’hôpital de l’amitié sino-congolaise, la clinique kinoise, la clinique Ngaliema, l’hôpital de la Rive et l’hôpital de Kinkole. Un numéro d’appel gratuit « sera bientôt » [Ndlr: rire interdit] mise à la disposition de la population. Quand? Mystère!
Selon une dépêche de l’ACP, l’OMS (Organisation mondiale de la santé), a prévu de « renforcer » dix-huit structures sanitaires du pays afin d’éviter la propagation de cette pandémie. Des équipes mixtes de cette agence onusienne et du ministère de la Santé seraient occupées au « bio-nettoyage » du service des « Urgences » de la clinique de Ngaliema. Pour eux, il s’agit d’éviter de devoir affronter à la fois la maladie à virus Ebola et Coronavirus.
Au moment où les nations mieux outillées au niveau d’infrastructures sanitaires proscrivent des rassemblements de 10 à 100 personnes et verrouillent leurs frontières, au Congo-Kinshasa l’insouciance est de plus belle. La vie continue dans les lieux publics comme si de rien n’était.
Une polémique est née avec l’arrivée depuis 72 heures à Goma d’un millier-et-demi d’individus « sans document valide » en provenance, semble-t-il, du Burundi. Une faute grave de la part des agents tant de la direction provinciale de l’ANR (Renseignement) que de la DGM (Migration). On espère que des sanctions seront prises après la détermination des responsabilités.
Au moment où l’autorité de l’Etat ronronne à Kin. A Paris, on assiste à l’affirmation volontariste de l’autorité de l’Etat. En l’espace de 72 heures, le président Emmanuel Macron a prononcé deux messages à la nation. Dans chacun d’eux, il a trouvé les mots justes pour attirer l’attention de ses compatriotes sur la nocivité de ce virus qui se transmet d’homme à homme notamment par les postillons. Le bilan actuel dans l’Hexagone est de 6.633 cas confirmés et de 148 morts.
PRIORITÉ AUX SECTEURS VITAUX
Se fondant sur les avis alarmants des « scientifiques » et en accord avec la classe politique ainsi que les présidents des deux Chambres du Parlement, le Président français a décidé la « réduction de déplacements » des Français. La mesure entre en vigueur dès ce mardi 17 mars à partir de 12 heures. « Nous sommes en guerre », a-t-il tempêté par six fois dans un speech d’une durée de 21 minutes.
A en croire certains médecins, les hôpitaux français ne parviennent plus à absorber les personnes testés positifs. « Les services de réanimation seraient au bord de la rupture », précise-t-on.
La Belgique qui n’a plus de gouvernement de plein exercice depuis dix mois est sur le point de trouver une « solution provisoire ». Celle-ci consiste à conférer des « pouvoirs spéciaux » d’une durée de trois mois, renouvelables deux fois, au gouvernement « en affaires courantes » que dirige la libérale francophone (MR) Sophie Wilmès.
A quelque chose malheur est bon. Les gouvernants congolais devraient profiter de la situation de crise générée par le Coronavirus ou Covid-19 pour élever les secteurs vitaux au rang de priorités. Il s’agit notamment de: la Santé, l’Education, l’Agriculture, la Recherche scientifique et les Affaires sociales. Une telle « élévation » implique naturellement l’accroissement des ressources tant financières qu’humaines et la modernisation des équipements.
B.A.W.