Joseph Kabila part à la reconquête de Lubumbashi. Tout est bon pour obtenir des galons. Après l’inauguration en fanfare des bâtiments de la Gécamines, qui avaient été construits dans les années 1960, voici le tour de trois immeubles au centre-ville de Lubumbashi. On parlera de la Révolution de la Modernité. Mais les histoires et les réalisations de ces ouvrages soulèvent des préoccupations sur la bonne gouvernance.
AGENCE DE LA BANQUE CENTRALE DU CONGO
C’est en 1989 que le Premier ministre d’alors, Léon Kengo Wa Dongo, actuel président du sénat congolais, avait posé la première pierre de bureaux de l’agence de la Banque Centrale à Lubumbashi. L’institution avait déjà d’excellents bureaux sur l’artère principale de la ville. En 1989, on avait suspecté une opération d’évasion de fonds publics. La preuve, selon les connaisseurs, est qu’au lieu d’acheter un terrain, la banque s’appropria du parc de la ville, un terrain à usage public avec des arbres superbes, des pelouses, fleurs, bancs et kiosque à concerts.
La société Auxeltra Béton avait réalisé la structure, puis le chantier fut abandonné pendant un quart de siècle. Les travaux ont repris avec un Belge, proche ami du chef de l’état congolais et bénéficiaire habituel de plusieurs contrats de gré à gré.
Malheureusement, la Banque Centrale n’a ni l’aura ni les besoins de 1989. L’institution n’est pas seulement une banque d’émission monétaire; elle est aussi dépositaire des comptes bancaires de l’État. Cette dernière fonction, qui justifierait beaucoup d’espace et un nouvel immeuble, a disparu. Les ministères, suivis par les entreprises publiques, les provinces et les collectivités logent leurs avoirs et opérations dans des banques privées.
HYPNOSE
Lubumbashi avait été choisi pour un investissement chinois dans l’immobilier. Le gouverneur de la province présenta son propre terrain en vue de le vendre. Malheureusement, l’endroit n’était pas approprié à cause de l’exiguïté des voies d’accès, des embouteillages, de l’absence d’égouts et des pénuries d’eau et d’électricité. Il s’agit, en plus, d’un quartier historique avec un paysage urbain qui alignait, en perspective, le Gouvernorat, la Cathédrale Saint-Pierre et Paul, le Palais de Justice, l’Hôtel de Ville et la Synagogue. On raconte que l’affairisme du gouverneur aurait courroucé le chef de l’état qui, ensuite, aurait mis sa propre griffe en le baptisant d’Hypnose. Le gouverneur aurait aussi imposé un architecte italien, à l’époque son compatriote Daniele Rotondo. D’un coût estimé de 40 millions de dollars américains, le bâtiment est high-tech, tout revêtu de parois vitrées et rétro éclairées. Ce sera le chantier le plus coûteux de l’histoire du pays parce que les matériaux de construction ont été acheminés par rotations d’avions et de super cargos. Informé de l’affairisme du gouverneur, le chef de l’état aurait repris le parrainage du projet. C’est lui qui aurait baptisé HYPNOSE le complexe de 10 étages.
GOUVERNORAT DU HAUT-KATANGA
La province du Katanga a été découpée en quatre provinces: Tanganika, Haut-Lomami, Lualaba et Haut-Katanga. Ces quatre anciens districts étaient tous dirigés dans des bureaux qui n’avaient jamais été étroits. Autant dire que l’ancien gouvernorat aurait été trop vaste pour le Haut-Katanga. D’autant que l’ancien gouverneur s’était occupé de la réfection des installations, sans ériger une brique pour les trois autres provinces.
Le premier gouverneur du Haut-Katanga jugea les lieux étroits et lança la construction d’un building. Ce n’était ni nécessaire, ni une priorité. Le plus préoccupant est que le chantier fut lancé avant même l’investiture du gouverneur; il n’y a jamais eu d’aval parlementaire ou budgétaire, ni appel d’offres public. L’immeuble est un monument à la mauvaise gouvernance.
Par K. Willy