Dans une correspondance n°620 /PR/IGF/OM 07-2021/NMM/2021 datée du 28 mai 2021, l’Inspecteur général des Finances, chef de service, transmet au Comité de gestion de la compagnie aérienne nationale « Congo Airways » les conclusions définitives du contrôle de gestion diligentée par ses services. La lettre est revêtue de quatre signatures. Outre celles de l’Inspecteur général, chef de service, et son adjoint, il y a deux inspecteurs des finances. Il y est question de « décaissements injustifiés » de plusieurs dizaines de millions de dollars dont l’un au profit d’un cabinet-conseil dénommé « Congo Challenge ». Une structure proche de l’ex-Premier ministre Augustin Matata Ponyo. Selon des sources, la direction de Congo Airways a balayé du revers de main les conclusions de cette enquête jugées « peu conformes à la réalité ».
On identifie généralement la « bonne gouvernance » à travers quelques principes. C’est le cas notamment de l’éthique, la transparence, l’efficacité, l’Etat de droit et l’obligation de rendre compte. Ces idéaux semblent guider l’action de l’Inspection générale des finances. Aucun responsable politico-administratif ne peut se soustraire au devoir redevabilité.
Après l’enquête sur la « débâcle » du Parc agro-industriel Bukanga Lonzo, dans la province du Kwango – qui a mis l’ex-Premier ministre Augustin Matata et des membres de son « clan » dans tous leurs états -, il semble bien que l’Inspection générale des finances continue « à fouiner ». Contre vents et marées.
On apprenait que l’IGF aurait transmis au président Felix Tshisekedi ainsi qu’au Premier ministre Sama Lukonde un nouveau rapport sur la « gestion pirate » d’une dizaine d’établissements publics. Des directeurs généraux et des présidents de conseil d’administration proches de l’ancien « Premier » Matata y seraient épinglés. On imagine que le dossier y afférent sera remis aux instances judiciaires compétentes.
En attendant que les patronymes des « DG » et « PCA » suspectés soient déversés sur les réseaux sociaux, une lettre de l’IGF dont les références sont reprises ci-haut fait le « buzz ». Le président du conseil d’administration et le directeur général de « Congo Airways » en sont les destinataires.
DÉCAISSEMENTS INJUSTIFIÉS
De quoi s’agit-il? Il s’agit des cas de « mauvaise gestion » présumée découverts par l’IGF. Et ce au terme d’un audit mené sur les finances de cette compagnie aérienne née sous Matata Ponyo. On parle de plusieurs millions de dollars US décaissés de manière injustifiée.
Un de ces décaissements attire particulièrement l’attention. Montant: 123.200 USD. Le bénéficiaire est un organisme privé dénommé « Congo Challenge ». Cabinet-conseil, celui-ci aurait perçu cette somme pour avoir « arbitré » « un conflit d’ordre administratif entre Congo Airways et la RVA d’une part et Congo Airways et Fond de promotion industrielle d’autre part ».
En interrogeant l’incontournable moteur de recherche « Google », il apparait que « Congo Challenge » est une société dont le PCA n’est autre que l’ancien ministre des Finances (2010-2012) et ancien Premier ministre (2012-2016) Augustin Matata Ponyo. D’aucuns pourraient déjà pérorer sur un « conflit d’intérêt ». D’autres ne manqueraient pas de parler de la violation de la loi sur la passation des marchés publics.
Selon des sources accessibles, les bureaux de « Congo Challenge » sont logés au 5ème étage de l’immeuble « Kiyo Ya Sita », situé au n°364 du boulevard du 30 juin. L’auteur de ces lignes a tenté de joindre un préposé au numéro 00 243 812 763 003. Sans succès.
QUELQUES « MERCENAIRES DE LA PLUME ET DU MICRO »
L’agitation perceptible au sein du « clan Matata » parait de plus en plus compréhensible. Le Parc agro-industriel de Bukanga Lonzo tient lieu d’épée de Damoclès sur la tête de l’ancien « Premier ». Ce dernier a dû recruter quelques « mercenaires de la plume et du micro » pour jouer le rôle de « coupe-feu ».
Un média proche de la mouvance kabiliste n’a pas hésité de présenter « Mapon » en « bouc émissaire » insinuant, au passage, que l’ancien chef du gouvernement est « combattu » pour n’avoir pas adhéré à l’Union sacrée de la nation de Felix Tshisekedi. Traduction: « quelqu’un » tenterait d’empêcher l’homme à la cravate rouge à se lancer dans la course lors de la Présidentielle de 2023.
Dans cette agitation ambiante, on apprenait le 14 mai que Matata a déposé plainte contre Jules Alingete Key, l’Inspecteur général des finances, chef de service, au parquet général près la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe.
Selon un confrère kinois, le directeur général de Congo Airways, Désiré Balazire, aurait écrit au numéro un de l’IGF pour lui dire tout le mal qu’il pense des conclusions de l’audit mené par les Inspecteurs des finances. « Je tiens à vous informer que les observations transmises [au Comité de gestion de Congo Airways] ne sont pas conformes à la réalité des faits ». Qu’en pense ce « DG » du paiement effectué au profit de « Congo Challenge »? Ce paiement serait-il également non conforme à la réalité des faits?
Qui de Jules Alingete Key et d’Augustin Matata Mapon aura la peau de l’autre? Une certitude: l’IGF vient de marquer un point en prenant l’ex-« Premier » Matata la main dans le sac…
Baudouin Amba Wetshi