Que dit la loi électorale de la RDC? L’Article 237 ter de la Loi portant organisation des élections présidentielle, législatives,provinciales, urbaines, municipales et locales stipule: « Le mode de vote électronique ne peut être appliqué pour les élections en cours ».
Paradoxalement, la CÉNI, instrumentalisée par le régime kabiliste en place depuis 21 ans et qui ne cache pas sa détermination des’éterniser à tout prix au pouvoir, s’obstine à organiser les élections avec les machines à voter et plus ou moins dix millions d’électeurs fictifs, en toute illégalité. Or, nous savons tous que nul n’est au-dessus de la loi! »Dura lex sed lex »! La loi est dure mais c’est la loi!
Que disent les partis et les coalitions politiques ainsi que certaines personnalités, notamment Dr Denis Mukwege, le Prix Nobel de la Paix 2018 et Prix Sakharov 2014 de Liberté de pensée? Peut-on se dire démocrate,légaliste ou viser à instaurer un État de droit dans un pays si l’on ne se préoccupe pas de conditions (légales ou pas, frauduleuses ou pas) dans lesquelles des élections auxquelles l’on participe sont organisées et que l’on est quasi aveuglement déterminé à accompagner sans aucune condition une parodie électorale annoncée d’avance? Et le peuple dans tout ça, comprend-il réellement les enjeux en présence? Que dit le peuple dans sa majorité ou sa grande majorité? Que va-t-il faire? Que disent les uns et les autres?
Félix Tshisekedi, candidat commun de l’opposition Camp du Changement (CACH) à l’élection présidentielle du 23 décembre 2018, et Vital Kamerhe son directeur de campagne: « Nous irons aux élections avec ou sans machines à voter ».
Félix Tshisekedi: « Nous savons très bien que dans le chef de ce pouvoir [la Kabilie], ça ne sera ni Fayulu ni moi, avec la machine à tricher. Donc si cette machine est là, c’est peut-être ou sûrement pour faire gagner le candidat du pouvoir, Shadary. […]. Nous sommes tous de l’opposition. Notre lutte et celle de LAMUKA est la même. Seulement que eux ne veulent pas aller aux élections avec la machine à voter mais nous, ne voulant pas donner une brèche a la Kabilie, nous sommes prêts à aller aux élections même avec cette machine à voter ».(Conférence de presse, le 5 décembre 2018, à Goma)
Vital Kamerhe: « Il est temps pour les amis de LAMUKA de dire clairement à la population s’ils vont aux élections avec la machine à voter ou non, au lieu de désorienter la population. Qu’ils n’aient pas honte ». (Conférence de presse, le 5 décembre 2018, à Goma)
Martin Fayulu, candidat commun de l’opposition de la coalition LAMUKA à l’élection présidentielle du 23 décembre 2018: « J’ai dit au peuple congolais: ne permettez pas à quiconque d’organiser des élections avec la machine à voter,parce que c’est illégal, ce n’est pas prévu ni permis dans la loi électorale ni dans le calendrier de la Commission nationale électorale indépendante (CÉNI). La fraude est préparée. Nous devons, à partir de ces élections, commencer à établir un État de droit en RDC. […]. Nous demandons à nos électeurs qu’on n’installe même pas la machine à voter dans les bureaux de vote. Que personne ne puisse organiser les élections en utilisant la machine à voter. Exigez les bulletins papiers. Monsieur Shadary adit qu’il va continuer l’oeuvre de Monsieur Kabila, c’est-à-dire continuer à enfoncer la RDC. Je dois arrêter à ça! Nanga [président de la CÉNI] veut organiser le chaos. Nanga obéit aux ordres de Kabila. Nous disons au Conseil de sécurité des Nations Unies de ne pas rester les bras croisés, mais de nous venir en aide avec tous les partenaires internationaux pour régler ce problème ». (Interview sur RFI le 2 décembre 2018 et déclarations ailleurs, y compris lors de son meeting à Béni le 5 décembre 2018)
Néhémie Mwilanya, directeur de bureau de l’actuel président de la République (Joseph Kabila) et directeur de campagne du d’Émmanuel Shadary le candidat de la plateforme Front Commun pour le Congo -FCC-: « Le FCC présente ses préoccupations par rapport à ces acteurs qui ont choisi manifestement le choix de travailler contre le processus électoral. Le dernier développement reste marqué par certaines interviews des leaders de la plateforme LAMUKA qui font l’apologie de la violence contre le processus électoral. Nous les avons suivis déclarer ouvertement que le 23 décembre nous ne devrions pas avoir des élections avec le système proposé par la CENI, la machine à voter. Bien plus, le candidat de LAMUKA fait un appel à ses militants à empêcher l’organisation de la tenue des élections le 23 décembre dans ce pays, au motif qu’il ne serait pas d’accord avec l’utilisation de la machine à voter. Cela est extrêmement grave. C’est un déni de démocratie. Ce processus est porté par tout un peuple ».(Conférence de presse à Kinshasa le 3 décembre 2018)
Dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018 et Prix Sakharov 2014 de Liberté de pensée: « Je viens du Congo et je n’ai pas vu un seul signe de préparation de ces élections pour qu’elles soient transparentes, crédibles et apaisées. Je n’ai vu aucun signe.Par contre, j’ai vu une préparation militaire assez forte. […] ce sont là pour moi des signes de préparation d’une répression que des signes d’une élection. Peut-être qu’il y aura élection. Mais elle ne sera ni transparente, ni crédible, ni apaisée. S’il y a quelque chose qui de passe le 23 décembre [2018], ça sera beaucoup plus des nominations via les machines à voter que vraiment des élections. Le peuple congolais et les partis politiques congolais ont un choix difficile à faire. Aller voter avec ces machines connaissant donc les résultats avant même d’aller voter, avec [en plus] un fichier électoral corrompu avec plus de six millions de personnes qui sont sur des listes mais qui ne sont pas connues. Aller voter avec une machine à voter et qui peut être programmée, mais également que la grande partie de la population ne peut pas savoir utiliser. Pour certains, ça sera la première fois qu’ils verront un ordinateur. Moi je crois qu’aller voter dans ce contexte où vous savez déjà qui va gagner les élections, c’est ce que j’appelle des nominations, je crois que c’est légitimer un pouvoir qui est tout simplement un système d’oppression qui est à bout de souffle; Boycotter les élections, ça serait tout simplement accepter le statu quo et ça c’est un choix cornélien. Le peuple congolais est devant un choix vraiment cornélien. Je crois que c’est très très difficile. Aller voter c’est aller entériner ou légitimer un pouvoir, un système d’oppression. Boycotter, ça veut dire finalement que vous acceptez le statut quo et là c’est très difficile. Je crois qu’il n’y a pas de fatalité. Moi je crois qu’il y a un choix. Des solutions existent. Le peuple congolais a quand même l’article 64 [de la Constitution] et qui stipule que tout Congolais a l’obligation d’empêcher un individu ou un groupe d’individus qui veulent prendre le pouvoir par la force. Je crois que c’est au peuple congolais de choisir entre ces deux choix cornéliens, ou faire usage d’une loi qui est constitutionnelle, donc des’opposer à toute personne qui veut diriger ce peuple par défi ».(Interview du 5 décembre 2018, https://www.youtube.com/watch?v=CHXKWk3pXbM)
Que dit le peuple souverain primaire dans sa majorité ou dans sa grande majorité face à ces choix? Que va-t-il faire? À chacun de se forger sa propre opinion et au peuple souverain primaire, dans sa majorité ou dans sa grande majorité, de juger et décider:
- Aller peu importe voter avec les machines à voter, avec plus ou moins dix millions d’électeurs fictifs, une Commission électorale et une Cour constitutionnelle foncièrement et notoirement corrompues et inféodées, et ainsi cautionner la parodie électorale et la victoire frauduleuse annoncée du candidat dauphin du président sortant de la République(qui continuera sans nul doute à exercer le pouvoir par procuration avant de revenir ensuite officiellement quand il voudrait revenir)?;
- Poursuivre jusqu’au bout le combat et la pression pour obtenir des élections conformes à la loi (sans les machines à voter ni les dix millions d’électeurs fictifs), transparentes, libres,crédibles et apaisées ainsi que le triomphe de la démocratie et l’avènement d’un État de droit en RDC?;
- Boycotter les élections?;
- Enclencher l’article 64 de la Constitution (« Tout Congolais a le devoir de faire échec […]« ) pour faire échec au régime en place qui s’obstine et est déterminé à continuer à exercer le pouvoir en violation de la Constitution et à reprendre et conserver le pouvoir en violation de la Constitution et des lois de la République?
L’histoire de la RDC est en train d’être écrite de nouveau.Le souverain primaire doit prendre son destin en mains. La liberté, l’égalité et la démocratie n’ont pas de prix. Nul n’est au-dessus de la loi. La loi est dure mais c’est la loi. La saga continue…
Par Zeph Zabo
Écrivain juriste, auteur des livres Justice corrompue
Volume 1 (Connaître Vos Droits et Savoir Vous Battre pour Rétablir la Justice)et
Volume 2 (Les Juges et Nos Droits, Zabo vs. Système Judiciaire Corrompu. LaSaga Continue…)
E: zabo.zeph@gmail.com