Affaire « Catalan & Sharp »: L’Administration Trump se réveille. Enfin!

C’est le moins qu’on puisse dire à la lecture d’un des récents tweets de l’ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique à Kinshasa, Mike A. Hammer. On y apprend que le cas des experts onusiens Zaida Catalan (Suédoise) et Michael Sharp (Américain), assassinés le 12 mars 2017 au Kasaï Central, a été évoqué, au département d’Etat, entre le président Felix Tshisekedi et le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo.

« Le Président[Felix Tshisekedi]a réitéré son engagement à découvrir les coupables & les tenir responsables, peu importe de qui il s’agit » écrit le diplomate américain sur son compte twitter, Mike Hammer@USAmbDRC.

Cour militaire de Kananga

A tort ou à raison, une certaine opinion congolaise – et pourquoi pas internationale? – suspectait et continue à suspecter tant le secrétaire général des Nations Unies que les gouvernements américains et suédois d’avoir « passé par pertes et profits » ce double meurtre, de leurs concitoyens, dont la préméditation ne fait plus l’ombre d’un doute.

Trente-trois. C’est le nombre de mois écoulés depuis l’ouverture en juin 2017, à Kananga, (Kasaï Central), du procès des présumés assassins des deux experts. Chargés par le Conseil de sécurité de mener des investigations sur des allégations de graves violations des droits humains et de l’existence des fosses communes dans le « Grand Kasaï », ces derniers sont tombés dans un véritable traquenard dans la localité de Moyo Musuila, dans le Territoire de Dibaya.

Et pourtant. Les deux enquêteurs étaient en contact quasi-permanent tant avec le directeur provincial (Redoc) de l’ANR (Agence nationale de renseignements) que des agents du Service de renseignements militaires (ex-Demiap).

RÉPUBLIQUE BANANIÈRE

Au fil du temps, les observateurs ont acquis la conviction que la manifestation de la vérité et la détermination des responsabilités étaient loin de faire partie de l’agenda de la justice militaire de la garnison de Kananga. Ici, l’objectif semble se limiter à la « disculpation » des autorités politico-administratives tant au niveau local que nationale.

Depuis 990 jours, les habitants de Kananga assistent à une pantalonnade judiciaire. Les magistrats militaires font preuve d’une désinvolture digne d’analphabètes juridiques d’une république bananière.

Dans une dépêche datée du 27 février dernier, la très officielle Agence congolaise de presse (ACP) annonçait que la prochaine audience dans l’affaire ministère public contre les 57 prévenus poursuivis dans cette affaire est fixée à mardi 10 mars. Au motif qu’un des magistrats du siège aurait des soucis de santé. Le pauvre! Manœuvres dilatoires ou volonté délibérée de ralentir abusivement le cours de la justice? C’est sans doute les deux.

Mukuntu Kiyana Timothée

Inutile de relever que la confirmation, le 7 février, de Timothée Mukuntu Kiyana au poste d’auditeur général des FARDC par « Fatshi » n’a pas fait que des heureux. Bien au contraire. Inféodé au « clan kabiliste », l’homme a une réputation sulfureuse dans la conduite de l’auditorat général de l’armée. 

Des témoins assurent que lors de l’audience du 20 septembre 2019, un prévenu, décédé depuis, a affirmé la main sur le cœur qu’il a été amené secrètement au siège de l’ANR à Kinshasa. Et qu’il a été interrogé par Kalev Mutond, alors patron de l’ANR, « en présence de Joseph Kabila ». Il s’agit de José Tshibuabua.

A l’audience suivante, Mukuntu est descendu au chef-lieu du Kasaï Central. Le magistrat exigea que Tshibuabua revienne à la barre pour répéter son propos. Sans se laisser impressionner, l’accusé a persisté et signé: « le Président honoraire se trouvait à côté de Kalev Mutond » lors de son audition sans procès-verbal au siège de l’ANR.

ROMPRE AVEC LES « MAUVAISES HABITUDES »

Le 30 octobre 2019, le président de la juridiction précitée, le colonel Jean Paulin Ntshayikolo, n’a pas manqué de stupéfier l’assistance en confondant son rôle à celui de la défense. « Aucune autorité politico-administrative ni un membre quelconque du gouvernement congolais n’a utilisé le prévenu Jean Bosco Mukanda et sa milice pour exécuter les experts onusiens et leurs accompagnateurs congolais », déclarait-il. Il répondait à l’avocat de Mukanda qui déplorait le traitement réservé à son client « après les services rendus ».  

Il apparaît clairement que la Cour militaire de la garnison de Kananga a reçu la « mission très spéciale » de laver de tout soupçon les présumés commanditaires de ce double crime d’Etat. Le constat est là, la Cour peine à « fabriquer » la motivation qui aurait incité les lampistes présents à la barre d’ôter la vie aux deux experts onusiens. Des experts dont la mission était « préjudiciable » plus à « Joseph Kabila » et ses janissaires qu’aux prétendus miliciens Kamuina Nsapu.

L’heure est peut-être venue de tordre le cou à une mise en scène pour le moins macabre orchestrée par les gouvernants congolais de l’époque. De quoi s’agit-il?

Vingt-quatre heures avant la « découverte » des corps sans vie de « Zaida » et de « Michael », le président de l’Assemblée provinciale du Kasaï Central – manifestement soudoyé – annonça que « 39 policiers ont été décapités » le vendredi 24 mars 2017 par des miliciens Kamuina Nsapu. Vous avez bien entendu: 39 policiers. Le problème? Depuis 36 mois, l’opinion attend désespérément de connaitre l’identité des « victimes ». La date de l’inhumation reste un mystère.

Il faut refuser de regarder pour ne pas voir que la décision d’occire les experts onusiens Zaida Catalan et Michael Sharp fut prise au plus haut niveau de la hiérarchie politique.

On espère que le « nouvel » auditeur général des FARDC, aura compris que « personne ne souhaite la mort du pécheur ». Et que l’heure est venue de rompre avec les « mauvaises habitudes » acquises durant « les années Joseph Kabila »…

 

B.A.W.

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