Joseph Dianzonzila, procureur général (PG) près la cour d’appel du Nord-Kivu, a décidé de « bannir » les défenseurs judiciaires exerçant au niveau de son office. Suspectés de « corruption », ces auxiliaires de justice – qui assistent les parties à l’instar des avocats – sont, depuis un mois, purement et simplement « interdits », à assister leurs clients au niveau de ce parquet. Une décision autant illégale qu’arbitraire.
Les défenseurs judiciaires évoluant au chef-lieu de la province du Nord-Kivu sont purement et simplement « interdits » à mettre les pieds au parquet général de Goma où ils ont l’habitude d’assister les justiciables. C’est un oukase, qui remonte à un mois. Il porte la signature du procureur général Joseph Dianzonzila. Dieu seul la « toute-puissance » que se targue les magistrats de ce rang dans l’arrière du pays.
Que reproche-t-on à ces auxiliaires de justice? Selon ce magistrat, il a été porté à sa connaissance « plusieurs cas d’escroquerie » au détriment des parties en procès. Selon lui, « certains » défenseurs judiciaires en seraient les auteurs de ces méfaits présumés.
Seulement voilà, au lieu d’ouvrir des informations judiciaires à charge des présumés délinquants, le procureur général (PG) Dianzonzila – qui prétend détenir des faits probants -, a préféré faire sa justice afin, selon lui, d’éviter l’embastillement aux « concernés ».
Joignant le geste à la parole, le PG a, dores et déjà, instruit tous les magistrats de son ressort de ne plus admettre la présence desdits défenseurs judiciaires aux côté des justiciables.
Là où le bât blesse est que le magistrat invoque un prétendu « code de conduite » pour justifier son acte. Il invoque également « la lutte contre la corruption prônée par le chef de l’Etat ».
Chargé de la discipline au sein du syndicat, Lucien Mwendapole, n’a pas usé de circonlocution en qualifiant la mesure prise par ce plus haut magistrat du ministère public au Nord-Kivu de « décision anticonstitutionnelle ».
UNE « DÉCISION ANTICONSTITUTIONNELLE »
Le syndicaliste fonde sa position sur le quatrième alinéa de l’article 19 de la Constitution. Cette disposition stipule: « Toute personne a le droit de se défendre elle-même ou de se faire assister d’un défenseur de son choix et ce, à tous les niveaux de la procédure pénale, y compris l’enquête policière et l’instruction pré-juridictionnelle ».
Selon un juriste contacté par Congo Indépendant, le magistrat Dianzonzila devrait être sanctionné pour « laxisme ». Pour lui, ce dernier est autant blâmable que les défenseurs judiciaires. « Il est intolérable qu’un magistrat ferme les yeux face une infraction dont l’auteur présumé est identifié sous le fallacieux prétexte d’éviter à celui-ci l’arrestation, commente-t-il. Par ailleurs, la lutte lutte contre la corruption prônée par le Président de la République ne pourrait être menée dans l’anarchie et l’arbitraire. C’est le juge qui doit apprécier le bien-fondé de l’accusation articulée à l’encontre du justiciable ».
Pour notre expert, le procureur général Joseph Dianzonzila a omis de noter que le président Felix Tshisekedi Tshilombo a parlé non seulement de « la lutte contre la corruption » mais aussi la promotion de « l’Etat de droit ». « L’Etat de droit qui signifie tout simplement la soumission des pouvoirs publics à la légalité ».
L’interdiction faite à ces défenseurs judiciaires de prester au niveau du parquet général près la cour d’appel de Goma est parfaitement illégale. Pire, le principe de la présomption d’innocence est foulé aux pieds. Et ce dans la mesure où les « concernés » n’ont pas été invités à faire valoir leur droit de défense. « Ils ont été condamnés avant même d’être jugés », conclut le juriste.
On espère que le ministre provincial de la Justice aura à cœur d’inviter ce magistrat à rapporter son oukase ou à ouvrir des informations judiciaires à charge de présumés « délinquants ».
B.A.W.