Jeudi 10 octobre, le couple Tshisekedi avait la mine sombre à son retour du Nord-Kivu. Signe que la triste nouvelle n’était plus un secret. Le suspens aura été long. Soixante-douze heures après sa disparition des radars, l’Antonov 72 affrété par la présidence de la République aurait été retrouvé aux environs du territoire de Kole, au Sankuru. Si celle nouvelle était confirmée, on peut gager que les informations fournies par le ministre de la Défense nationale au cours de la réunion extraordinaire du Conseil des ministres de vendredi 11 octobre était erronées. Citant… des sources de la Monusco, ce membre du gouvernement a assuré que l’épave de cet aéronef se trouverait à Kasese dans le territoire de Punia, au Maniema. Le crash de cet avion a engendré une conséquence inattendue. Les « Bases » de l’UDPS et du PPRD sont sur « pied de guerre ». Les invectives fusent. Les tshisekedistes purs et durs représentés par Fils Mukoko accusent, à tort ou à raison, « Joseph Kabila » de mijoter un « coup d’Etat ». La « coalition » célébrée le 29 juillet dernier semble traverser une… zone de forte turbulence.
Selon des sources concordantes, l’épave de l’Antonov 72, affrété par la Présidence de la République, a été retrouvée près de la localité d’Okoto dans la province du Sankuru. Des villageois auraient vu quatre corps. Trois hommes de race noire et un Blanc. Un coup d’œil rapide sur la carte du Congo-Kinshasa laisse apparaître que le chemin le plus direct entre Goma et la capitale passe au-dessus des provinces du Maniema et du Sankuru.
Plusieurs questions taraudent les esprits. Primo: Que s’est-il passé dans cet avion qui est parti de Goma le jeudi 10 octobre à 13h32? Secundo: Combien de personnes étaient à bord? Enfin: Quid des enquêtes?
QUE S’EST-IL PASSE DANS CE VIEUX « COUCOU »?
En parcourant le « communiqué officiel » publié le même jeudi 10 octobre par le directeur général de l’AAC (Autorité de l’Aviation Civile), Jean Tshiumba Mpunga, indique que cet aéronef – affrété pour la logistique présidentielle – a décollé de Goma à 13h32 TU. Il « a perdu contact avec le centre de contrôle » quelques 59 minutes après soit à 15h00 TU. On apprend également que l’appareil devait atterrir à l’aéroport de Ndjili à 16h43.
Certains experts sont intrigués du fait que l’AAC ne fait état d’aucun « appel de détresse » lancé par le pilote tout au long des 59 minutes de vol. Il n’a pas non plus lancé de S.O.S après avoir constaté une quelconque avarie. Ces « détails » inclinent à penser, disent-ils, que la cause de l’accident devrait être un « événement inattendu et brusque » qui n’a pas permis à l’équipage de réagir.
Des sources aéronautiques ont fait état d’une « météo exécrable » ce jeudi 10 octobre. Que s’est-il passé? En montant plus haut pour éviter les nuages, l’appareil aurait-il connu une dépressurisation? Y a-t-il eu une explosion à bord? L’avion se serait-il écrasé contre une montagne? Des sous-questions qui restent, pour l’instant, sans réponses.
COMBIEN DE PERSONNES ÉTAIENT A BORD?
Dans une dépêche datée du 11 octobre, l’Agence congolaise de presse (ACP) rapporte que l’Antonov 72 dont question avait à son bord quatre membres d’équipage et quatre civils et militaires.
Au cours de la réunion extraordinaire du Conseil des ministres du vendredi 11, le président Felix Tshisekedi Tshilombo a fait savoir qu’il y avait à bord « sept compatriotes au service de la nation ». Il a ajouté que les recherches étaient menées dans la partie Nord de la province du Maniema avec le concours de la Mission onusienne au Congo. Le ministre de la Défense nationale a enfoncé le clou en prétendant que l’épave de cet avion « se trouverait » à Kasese, dans le territoire de Punia, au Maniema. Ce ministre n’avait manifestement pas la bonne information.
Selon le journal en ligne russe en.crimerussia.com, outre les sept Congolais, il y avait huit membres d’équipage dont deux de nationalité russe. Citant l’ambassade de Russie à Kinshasa, ce webjournal note que le pilote, qui répondrait au nom de Vladimir Sadovnichy, serait un militaire. Repris de justice, l’homme a eu maille à partir avec la justice du Tadjikistan où il fut condamné en 2011 à huit ans de prison avant d’être amnistié. L’autre Russe s’appellerait Vitaly Shamkov.
Depuis la survenance de ce crash, des langues commencent à se délier pour dénoncer les « pratiques » du responsable de la logistique (aviation) à la Présidence de la République.
Dans un « Mémo » anonyme qui circule sur les réseaux sociaux, le nommé Charles Bujiriri Deschryver est accusé de sous-louer à l’armée de « vieux coucous » de l’époque soviétique qu’il prend en location en son propre nom. Ce serait ces avions que la Présidence utilise. Des observateurs espèrent que « Felix » profitera notamment de cette « tragédie » pour « nettoyer » certains services de la Présidence qui restent peuplés par des « hommes du raïs ».
QUID DES ENQUÊTES?
Aux dernières nouvelles, des Sankurois auraient découvert un homme de race blanche en vie à côté de l’épave de l’Antonov. Ils auraient dénombré trois morts de race noire.
On apprend que des membres de la police judiciaire et ceux de la justice militaire seraient en route vers le lieu du crash. Dieu seul sait quand ils pourront atteindre le lieu du sinistre dans ce pays démuni de routes praticables. « On devrait, toutes affaires cessantes, sécuriser l’endroit de l’accident pour empêcher la disparition de certains indices », commente un expert en aéronautique joint à Kinshasa.
Pour lui, après la sécurisation du périmètre du crash, les enquêteurs devraient commencer par rechercher les « quatre coins » de l’appareil.C’est à dire, le nez, la queue et les deux ailes. « Si ces quatre parties sont retrouvés dans un petit périmètre ce que l’avion est arrivé au sol intact », Dans le cas où les débris de l’appareil sont éparpillés, souligne-t-il, ce qu’il y a eu une explosion.
On espère que les investigateurs auront à cœur de faire éclater la vérité sur ce qui s’est réellement passé pour permettre aux familles des victimes d’accomplir le travail de deuil.
BISBILLES ENTRE LES « BASES » DU CACH ET DU FCC
Comme si cette tragédie ne suffisait pas, on apprenait samedi 12 octobre que le PPRD Constant Mutamba, président d’une nébuleuse association politique dénommée « Nogec » (Nouvelle génération pour l’émergence du Congo), a porté plainte contre le « combattant » Fils Mukoko auprès du procureur général près la Cour d’appel de Kinshasa/Matete. « Après le crash de l’avion-cargo (…), écrit-il, sieur Mukoko a fait une déclaration à la presse ce vendredi 11 octobre 2019 au siège de son parti UDPS, à travers laquelle il a affirmé qu’il s’agissait d’un coup d’Etat manqué orchestré par le président honoraire Joseph Kabila Kabange ». Pour ce kabiliste, il s’agit d’une imputation dommageable.
Dimanche 13 octobre, une vidéo a circulé sur les réseaux sociaux. On y voit un groupe de « jeunes » à la mine patibulaire, béret rouge vissé sur la tête. Qui sont-ils? Selon leur porte-parole non autrement identifié, le groupe s’appelle les « soldats jeunes leaders politiques du raïs Joseph Kabila Kabange ».
Quelle est la teneur de leur déclarations? Pour l’essentiel, le groupe accuse la direction de l’UDPS « d’instrumentaliser » Fils Mukoko pour « insulter » l’ancien président « Kabila » qui, selon eux, « mérite respect et considération ».
Le porte-parole de ce groupement de mettre Mukoko « en garde ». « En l’espace de six mois de votre gestion, nous avons constaté la dilapidation d’un milliard et demi de dollar laissé par Joseph Kabila dans le trésor par des voyages touristiques ». Suivez son regard.
Les « jeunes » de sortir l’artillerie lourde: « Vous avez trompé pendant plusieurs décennies en prétendant que vous luttiez pour le bien du peuple congolais. La réalité vous a rattrapé. Le slogan ‘le Peuple d’abord’, s’est transformé en ‘ventre d’abord' ». Et de conclure: « Faites attention, Joseph Kabila n’est pas un homme seul. Il a sa jeunesse très virulente et prête à le défendre ».
Fatshi et « Kabila » vont un de ces jours trinquer, coupe de champagne en main, pour minimiser ces éclats de voix. Une question vient néanmoins à l’esprit: Vous avez dit que l’alternance a eu lieu le 30 décembre 2018 dans ce pays?
Baudouin Amba Wetshi