Neuf ans après, le chef d’Etat congolais sera reçu mardi 17 septembre par le Roi Philippe. Une entrevue riche en symbole. La dernière rencontre à ce niveau remonte au 30 juin 2010. Le roi Albert II et la reine Fabiola avaient fait le voyage de Kinshasa. C’était à l’occasion du 50è anniversaire de la proclamation de l’indépendance du Congo. Depuis cette date, les relations entre les deux pays n’ont cessé de se détériorer sous « Joseph Kabila ». L’arrivée au pouvoir du président Felix Antoine Tshisekedi semble inversé la tendance. Va-t-on assister à un « retour à la normale » dans les relations entre les deux pays? Lundi 16 septembre, la diaspora congolaise semblait, pour sa part, éclatée entre les « partisans » et les « anti-Fatshi ». Des praticiens des arts martiaux communément appelés « maîtres » auraient été recrutés pour « punir » ces derniers.
Quel sentiment le président Felix Tshisekedi Tshilombo, 55 ans, éprouvait lundi 16 septembre à son arrivée à l’aéroport militaire de Melsbroek au vu du vice-Premier belge Didier Reynders venu l’accueillir au nom du gouvernement du royaume de Belgique?
Question sans intérêt? Nullement! « Felix » qui est plus Bruxellois que Kinois a passé plus de la moitié de sa vie en Belgique où il était domicilié. Dans la capitale belge où il a étudié et mené une intense vie militante, tout le monde le connait. Il connait tout le monde.
Parti à Kinshasa en novembre dernier battre campagne – lors de la présidentielle du 30 décembre 2018 -, Fatshi est revenu dans son « pays d’adoption » revêtu du titre prestigieux de Président de la République.
N’en déplaise au candidat « malheureux » Martin Fayulu Madidi, c’est en sa qualité de chef de l’Etat que « Fatshi » sera reçu, mardi 17, par le Roi Philippe, qui est âgé de 59 ans. Un déjeuner serait prévu.
Ce sera l’occasion pour ces deux hommes, de même génération, de faire connaissance et surtout de renouer le contact rompu au somment de l’Etat entre leurs deux pays ayant en partage un « patrimoine historique commun ». « La Belgique est historiquement chez elle au Zaïre », s’exclamait l’ancien ministre belge des Affaires étrangères Renaat Van Eslande.
Selon des sources, le Président congolais pourrait remettre au Roi des Belges une invitation à effectuer une visite d’Etat au Congo en juin prochain. Le dernier séjour d’un couple royal belge remonte au mois de juin 2010. Albert II et Paola avaient assisté à la commémoration du 50ème anniversaire de la proclamation de l’indépendance. Le voyage s’est terminé en « eau de boudin », comme disent les Belges. En cause, le tapage fait par la presse du Royaume autour d’un « bijou » offert à Paola par l’épouse « Kabila », née Marie-Olive Lembe di Sita. Le quotidien bruxellois « La Dernière Heure » avait fait état d’une « magnifique parure en diamant et or ». Un vrai scandale pour la Belgique « puritaine ».
LA « ZAÏRIANISATION »
Vers la fin de l’après-midi de ce même mardi 17 septembre, Felix Tshisekedi va entamer la partie économique de sa visite officielle. Il est attendu à 17h00 à la Fédération des Entreprises de Belgique (FEB), l’équivalent de la FEC (Fédération des Entreprises du Congo). Le chef de l’Etat va prononcer un discours fort attendu tant du côté belge que congolais. Sur son compte Twitter, l’homme d’affaires John Nsana Kanyoni écrit: « La FEC espère le retour des entrepreneurs belges en RDC ».
Depuis novembre 1973, les milieux d’affaires belges ont déserté le pays qui s’appelait encore le Zaïre. Les mesures de nationalisation dites « zaïrianisation » ont servi de détonateur. Les anciens propriétaires ou actionnaires n’ont pas été indemnisés. Un vrai sacrilège dans ce monde occidental où l’on ne badine pas avec la propriété.
L’arrivée au pouvoir de Laurent-Désiré Kabila n’a apporté aucun regain de confiance. Le Mzee a brillé par une politique économique et une diplomatie illisible et imprévisible. Les rapports bilatéraux se sont détériorés davantage sous « Joseph Kabila ». Plus à tort qu’à raison, ce dernier n’a cessé d’accuser le gouvernement belge de « torpiller » le Congo-Kinshasa auprès de l’Union européenne. En réalité, la dérive despotique du pouvoir kabiliste fut l’épicentre du différend.
Lors de la rencontre de ce mardi avec les représentants du monde belge des affaires, le chef de l’Etat congolais aura à entendre des « récriminations amicales » sur le mauvais climat des affaires qui règne dans l’ex-Zaïre. La corruption et les tracasseries administratives en seraient les griefs les plus épinglés.
Le « patron » de la FEB, Bernard Gilliot, ne manquera pas d’émettre quelques « recommandations » en guise de « préalables » pour encourager les entrepreneurs belges à reprendre le chemin de l’ex-colonie.
LA DIASPORA CONGOLAISE ÉCLATÉE
Le souhait le plus exprimé dans les milieux d’affaires est de voir l’Etat congolais se désengager de l’économie ou tout au moins d’atténuer son emprise sur la production, la commercialisation et le change. L’autre souhait serait de voir les pouvoirs publics se consacrer à leurs missions régaliennes. A savoir notamment, assurer les équilibres macro-économiques. Sans omettre la défense du territoire et le maintien de l’ordre. Pour ces milieux, l’Etat doit jouer le rôle d’ « impulseur » de l’économie et du social.
Dans un cadre congolo-congolais, « Fatshi » devrait s’entretenir, mercredi 18 septembre, avec ses compatriotes de la diaspora. Les participants à cette réunion devaient s’inscrire via le site de la représentation diplomatique congolaise à Bruxelles. Les dispositions sécuritaires sont maximales.
La diaspora congolaise est néanmoins apparue fort « éclatée » au moment où le président Tshisekedi foulait le sol belge. A l’aéroport de Melsbroek, Fatshi a été accueilli plus par ses « partisans » que par la communauté congolaise dans sa diversité. Des journalistes ont été ostracisés et menacés. Chef d’Etat, « Felix » n’appartient plus à un clan ou parti. Il est au service de la nation toute entière.
Sur les réseaux sociaux, on apprenait que des « maîtres » en arts martiaux avaient été recrutés pour « corriger » les « anti-Fatshi ». On espère que la rencontre prévue mercredi sera l’occasion pour le Président de la République de lancer des appels au rassemblement et à l’unité.
Baudouin Amba Wetshi