Arrivée à Matadi depuis un mois, pour exercer – sur recommandation du chef spirituel de l’Eglise kimbanguiste – la fonction d’Assistante du gouverneur Atou Matubuana de la province du Kongo Central, la dame Mimi Muyita Ankieta s’est rendue tristement célèbre en se laissant entraîner dans ce qui ressemble bien à une « cabale ». Sans convaincre, elle accuse le vice-gouverneur, Justin Luemba, d’avoir tenté de la violer. Ce dernier soutient qu’ils entretenaient une relation amoureuse. Qui dit vrai? Les faits se seraient passés le dimanche 25 août dans un appartement (maison de passage) du gouvernorat. C’est là que Muyita loge depuis son arrivée au chef-lieu du Kongo Central.
Depuis lundi 26 août, une vidéo est au centre de toutes les conversations. On y voit un homme nu comme un ver de terre assis dans un canapé en cuir de couleur blanche ou beige. L’homme, sanglotant, implore littéralement ses « bourreaux » d’arrêter l’humiliation lui infligée en l’exhibant dans cette « tenue ».
Première surprise, l’individu dont question est immobilisé par une policière. Seconde surprise, le directeur provincial de l’ANR (Redoc) se trouve sur les lieux. Qui l’a ameuté? Pourquoi? Sauf changement, le titulaire de ce poste s’appelait Max Lupoko Ngyemen. Dernière surprise, « quelqu’un » qui est hors champ filme la scène. Qui a commandité ce « reportage »? A quelle fin?
Là où le bat blesse est que l’homme en tenue d’Adam n’est pas n’importe qui. Il s’agit de l’adjoint au gouverneur de la province du Kongo Central. Il s’agit du vice-gouverneur. De quoi s’agit-il?
« FLAGRANT DÉLIT DE VIOL » OU « COUP MONTÉ »
S’adressant au « Redoc » tout en se lamentant, le vice-gouverneur Justin Luemba donne sa version des faits. Selon lui, il entretient une « relation amoureuse » avec la dame Muyita depuis son arrivée à Matadi. « Le dimanche 25 août, elle m’a téléphoné en me disant excellence vient me rejoindre, je suis seule », raconte Luemba sans bafouiller. Celui-ci demande aussitôt à son chauffeur de le conduire dans l’appartement du gouvernorat où loge « Mimi ».
Dans son propos, Luemba n’a pas hésité de suspecter Matubuana d’être l’auteur du « coup » monté contre lui. Il était chaque fois interrompu par sa « victime » Mimi dont l’intonation vocale était tout sauf celle d’une personne « traumatisée » par une « tentative d’agression sexuelle ». « Je t’ai toujours dit qu’il ne sera jamais question d’entretenir des rapports amoureux entre nous », clame-t-elle avec aplomb. Et d’ajouter: « Je suis l’assistante du gouverneur. Je ne suis pas ta dame ». On entend sa voix. Elle reste hors champ.
Ce qui ne devait être qu’un banal cas d’adultère à insérer dans la rubrique « fait divers » est aussitôt qualifié de « tentative de viol ». Luemba est déclaré pris en « flagrant délit de viol ». Il est embarqué. Destination: parquet de Matadi. Il sera par la suite relâché « faute de plaignant ».
Pendant 48 heures, le gouverneur Matubuana est resté muet comme une carpe. Pas un mot de « compassion » ou d’indignation suite à l’infortune de son numéro 2 embourbé dans une affaire de mœurs.
Mercredi 28 août, Matubuana décide de sortir de son mutisme par une tribune revêtue de la signature d’un certain Papy Tamba. Le même. Il s’agit d’un des anciens propagandistes dits « communicateurs » de la mouvance kabiliste. L’intitulé du texte met à nu son caractère tendancieux autant que partial: « Qui cherche la tête du gouverneur Atou Matubuana rencontrera la vérité sur le chemin ».
Au lieu de décrire les faits de manière objective, Tamba prend la posture d’un « juriste » en s’érigeant en représentant du ministère public. Il est chargé de prononcer une sorte de « réquisitoire ».
Après avoir qualifié Luemba de « récidiviste », l’ex-communicant du PPRD de lancer: « Nous sommes face à une récupération politique sur fond de manipulation de l’opinion par un groupe de gens non autrement identifié ». L’objectif serait, selon lui, de « ternir l’image du gouverneur ».
ASSOCIATION DE MALFAITEURS
En violation du secret d’instruction, Tamba fait état des « relevés des appels téléphoniques » du vice-gouverneur. D’après lui, celui-ci a émis « un premier coup de fil le 25 août à 5h44 ». Selon Tamba, Luemba aurait téléphoné à la « pauvre Mimi » (sic!) par quatre fois « avant de s’inviter chez elle de façon impromptue ».
A en croire l’ex-communicateur du PPRD, « le 4ème appel téléphonique a visiblement exaspéré » l’Assistante du gouverneur. « La pauvre Mimi était surprise de voir le vice-gouverneur se déshabiller devant elle ce jour-là », soupire Tamba. A-t-on déjà vu un violeur se mettre à poil avant d’accomplir son forfait? Aucun psychologue ne pourrait répondre par l’affirmative.
Devrait-on déduire que cette « exaspération » a incité la dame Muyita à tendre un « piège » au vice-gouverneur en ameutant un agent de police et le Redoc? Dans quel but?
Le comportement de Justin Luemba est indigne d’un gestionnaire de la Cité. On n’ose pas imaginer la souffrance morale qu’endure son épouse ainsi que ses enfants. Qui oserait néanmoins lui jeter la première pierre dans ce Congo-Kinshasa où « grands » et « petits » citoyens n’ont que deux obsessions: l’argent et le sexe.
La société congolaise a perdu tous repères au point que des mères de famille n’hésitent pas à se comporter comme des « célibataires ». Des pères de famille, mêmement.
Au Kongo Central, des voix commencent à s’élever tant pour exprimer l’indignation que dénoncer une « conspiration ». Les mêmes voix reprochent à Matubuana et Luemba d’avoir terni l’image de la province.
D’aucuns évoquent un conflit latent qui opposerait le « Mundibu » Atou Matubuana au « Muyombe » Justin Luemba. Les deux hommes sont pourtant étiquetés FCC (Front commun pour le Congo).
Le Kongo Central compte une seule ethnie « Kongo » ou « Ne Kongo ». Celle-ci se subdivise en plusieurs sous-groupes ou tribus. « Notre Province est tombée très bas à cause des agissements de ces deux responsables politiques », confie un Ne Kongo joint au téléphone à Matadi.
Pour lui, Matubuana et Luemba « ne sont plus dignes de diriger cette région ». Il en serait de même du Redoc actuel. Et ce y compris, la policière présente sur les lieux. « Cette cabale est l’œuvre d’une association de malfaiteurs », conclut notre interlocuteur?
Des questions restent sans réponses. Quel est l’enjeu de ce conflit? Quelle est la justification de la présence du directeur provincial de l’ANR dans une affaire qui ne concerne en rien la « sécurité nationale »? Pourquoi l’Agence nationale de renseignement veut s’occuper de tout sauf de sa mission de « surveillance » des personnes susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l’Etat? Que dire du comportement de la policière? Question finale: Qui a manipulé la dame Mimi Muyita Ankieta?
B.A.W.