« Lambert Mende séjourne à Bruxelles. Il a obtenu une dérogation aux sanctions de l’Union Européenne ». La nouvelle a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans les milieux Congolais tant au pays qu’à l’étranger. Chacun y va de son commentaire. Nombreux sont des ex-Zaîrois qui considèrent ce « geste humanitaire » comme une « brèche » ouverte aux mesures de restriction prises le 29 mai dernier à l’encontre d’une dizaine de « pontes » du régime. C’est le cas de l’actuel ministre des Communications et médias.
Après vérification dans certains milieux proches du ministère belge des Affaires, il se confirme que Lambert Mende séjourne bel et bien dans la capitale belge. Des sources aéroportuaires à Kinshasa assurent qu’il serait accompagné de plusieurs membres de sa famille.
Mende aurait bénéficié d’une « dérogation » pour « raisons familiales ». L’étonnement suscité par cette nouvelle auprès de certains fonctionnaires belges incline à penser que cette « dispense » a été « négociée » au sommet de la hiérarchie de la diplomatie belge où trône l’ex-kabilâtre Didier Reynders.
Libéral francophone, Reynders serait en froid avec le président hors mandat « Joseph Kabila ». Lors de la 72ème Assemblée générale des Nations Unies, des témoins étaient surpris de voir le Premier ministre belge Charles Michel se rendre sans « son » ministre en charge de la diplomatie au rendez-vous avec « Kabila ».
Tout en convenant avec le philosophe français Jean-Paul Jouary qui a écrit qu« ‘imiter la barbarie du tyran nous transforme en sauvages » (voir l’ouvrage « Mandela, une philosophie en actes », publié chez Librairie Générale Française), d’aucuns parlent déjà de « brèche » ouverte au sein de l’Union Européenne (UE).
Sur proposition du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères, le Conseil de l’UE avait, en date du 29 mai dernier, adopté des « mesures restrictives » à l’encontre de neuf personnalités de la mouvance kabiliste dont les agissements constituent non seulement des « entraves » au processus électoral mais aussi des atteintes aux droits et libertés.
Outre Lambert Mende, la liste comportait les noms ci-après: Kalev Mutondo (administrateur général de l’Agence nationale de renseignements, ANR), Evariste Boshab (ancien ministre de l’Intérieur), Gédéon Kyungu Mutanga (ex-chef milicien des Bakata Katanga), Alex Kande Mupompa (gouverneur du Kasaï central), Jean-Claude Kazembe Musonda (ancien gouverneur du Haut-Katanga), Muhindo Akili Mundos (commandant de la 31è brigade des FARDC), Eric Rihorimbere (commandant adjoint de la 21 région militaire à Mbuji Mayi) et Emmanuel Ramazani Shadari (ministre de l’Intérieur).
Inamovible ministre de la Communication et médias, l’ex-opposant et rebelle du RCD qui prétendait combattre les régimes dictatoriaux de Mobutu Sese Seko et de Mzee Kabila n’a guère contribué au triomphe de la liberté d’expression. Bien au contraire. Il s’est évertué à museler les médias qui tiennent un discours non-conforme à l’orthodoxie kabiliste.
Dans la décision précitée de l’UE, Mende est présenté, à juste titre, comme le « responsable de la politique répressive menée envers les médias » tant congolais qu’étrangers. C’est le cas notamment de RFI dont le signal a été coupé durant plusieurs mois privant les auditeurs kinois de leur droit à l’information.
Questions: le ministre Didier Reynders qui piaffe d’impatience pour aller inaugurer la nouvelle ambassade du Royaume de Belgique à Kinshasa a-t-il décidé d’ouvrir une brèche aux sanctions de l’UE afin de rentrer dans les bonnes grâces du dictateur « Kabila »? Devrait-on parler de duplicité dans les milieux francophones belges?
B.A.W.
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