L’Association Africaine de Défense des Droits de l’Homme « ASADHO », en sigle est vivement préoccupée par la violation flagrante par le premier président de la cour de cassation de la République Démocratique du Congo, des dispositions légales relatives à la compétence des tribunaux de Commerce.
En effet, en date du 08 juin 2019, par sa note circulaire relative à l’interdiction d’autorisation des saisies arrêts et saisies conservatoires par les présidents des tribunaux de commerce, Monsieur le premier président de la cour de cassation, a pris la décision en violation de la loi, de retirer aux présidents des tribunaux de commerce les pouvoirs d’autoriser les saisies conservatoires et saisies arrêts conformément au droit Ohada, en les confiant aux présidents des tribunaux de grande Instance.
Le premier président de la cour de cassation justifie sa mesure illégale par le fait que certains chefs de tribunaux de commerce de quelques ressorts auraient abusés de leurs pouvoirs par des autorisations de saisies conservatoires suite à une mauvaise interprétation des dispositions des articles 49 et 54 l’Acte uniforme du 10 avril 1998, portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution. Outre cette raison, Monsieur le premier président de la cour de cassation fait une interprétation biaisée des dispositions combinées des articles 113, 111 de la loi organique N° 13/011-b du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire, 21 et 22 de la loi N° 016/2002 du 16 octobre 2002 portant création, organisation et fonctionnement des Tribunaux de Travail.
L’ASADHO fait observer que si certains chefs de tribunaux de commerce auraient commis des abus dans l’exercice de leurs fonctions portées à la connaissance du premier président de la cour de cassation, il revenait à celui-ci de les déférer devant la chambre de discipline compétente au niveau du conseil supérieur de la magistrature au lieu de modifier la loi sans en avoir le pouvoir.
L’ASADHO relève d’une part que, la note circulaire susvisée est de nature à porter atteinte au droit fondamental des citoyens créanciers commerçants à accéder à la justice devant leur juge naturel qui est le juge de commerce compétent pour garantir le recouvrement de leurs droits à la propriété privée et sur les créances commerciales. D’autre part, elle viole le principe de la séparation des pouvoirs du fait qu’elle enlève aux présidents des tribunaux de commerce la compétence leur dévolue par la loi. Le premier président de la cour de cassation est devenu lui-même législateur.
Aux termes des dispositions de l’article 149 de la loi organique précitée, le président du tribunal de grande instance ne peut autoriser les saisies conservatoires en matière commerciale que là où les tribunaux de commerce ne sont pas encore installés. Et l’article 17 de la loi n°002/2001 du 03/07/2001 définit clairement les matières qui relèvent de la compétence des tribunaux de commerce.
La décision du premier président de la cour de cassation viole ces dispositions légales qui sont d’ordre public ainsi que, celles du traité uniforme relatives à la compétence de Tribunaux de Commerce. Il crée à dessein une insécurité judiciaire pour les droits de créanciers Commerçants.
De ce qui précède, l’ASADHO recommande:
- Au premier président de la cour de cassation de:
- Rapporter sa note circulaire susmentionnée supra;
- Respecter les dispositions légales relatives à la compétence des tribunaux de commerce et tribunaux de grande instance dans leur esprit et lettre.
- Au conseil supérieur de la magistrature de:
- Ouvrir des poursuites disciplinaires contre le Premier Président de la Cour de Cassation.
- Aux Présidents de Tribunaux de Commerce de:
- N’obéir qu’à l’autorité de la loi;
- Dénoncer toute attitude contraire à la loi ou toute action d’intimidation.
Fait à Kinshasa, le 22 juillet 2019
ASADHO
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