À l’approche de la date indiquée par la CENI pour les élections, le paysage politique congolais demeure très nébuleux. Le cap est certainement fixé. L’échéance du 23 décembre demeure un point de mire autour duquel se jouent de multiples conjectures. Le peuple congolais ira-t-il aux élections ou celles-ci risquent fortement de déraper sous l’effet d’événements probables?
Le vent d’un éventuel boycott souffle du côté de ceux qui ne voudraient pas aller aux élections avec la machine « à tricher », prête à broyer les véritables résultats des urnes et à en sortir d’autres suivant un moule déjà programmé.
D’autres, bien qu’envisageant d’y participer, sont sceptiques quant à la tenue même des élections dans des conditions équitables et favorables à tous les candidats. Par ailleurs, un sentiment de révolte est omniprésent dans presque toutes les couches de la société, favorisé par la politique répressive du gouvernement. En cette matière, la police qui est censée protéger les citoyens et les citoyennes n’hésite pas à tirer, à balles réelles, sur de paisibles manifestants.
Une vague de mécontentement plane, sans l’ombre d’un doute, dans le microcosme congolais. L’on ne peut oublier la révolte estudiantine qui a occasionné trois morts dans leur rang alors qu’ils revendiquaient la reprise des cours interrompus par la grève des professeurs. Ces derniers qui n’en pouvaient plus des promesses non tenues réclamaient à leur corps défendant l’augmentation salariale bloquée par le gouvernement. Hormis cette vague qui a ébranlé et surchauffé l’hémisphère de la colline inspirée, un phénomène inédit d’une ampleur plutôt vaste est à signaler.
Il y a eu des manifestations spontanées des populations à travers tous les territoires congolais le dimanche 18 novembre 18. L’objectif clairement exprimé était la sensibilisation de la population, sur une large échelle, de la nécessité d’activer l’application de l’article 64. Tous ces événements témoignent l’état d’ébullition que le pays est en train de traverser durant cette période préélectorale.
L’opposition qui devait s’unir pour augmenter ses chances de remporter ces scrutins est divisée entre ceux qui appuient Martin Fayulu et ceux qui se rangent derrière le ticket Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe et tout ceci, sans compter la myriade d’autres candidats qui semble avoir formé le troisième pôle. Le comble ou le malheur de cette division, c’est la poudrière que d’aucuns voudraient allumer pour attiser le tribalisme viscéral et dégradant derrière le dos des candidats. Ses effets nocifs sur la cohésion sociale et le risque potentiel d’un démembrement du territoire qui plane comme un épouvantail si jamais le pays tombait dans une instabilité incontrôlable sont à craindre.
Qu’à cela ne tienne, le vrai combat est dirigé contre Kabila. C’est son départ qui est l’objectif ultime de tous. Il n’y a plus de place pour des compromissions ou des conciliabules. C’est l’organisation des élections crédibles ou le ras-le-bol généralisé. Le soulèvement populaire ayant comme point de chute le départ forcé de ceux qui auront échoué dans cette tâche et la mise en place d’une nouvelle administration de transition, neutre et citoyenne est l’arme fatale entre les mains des citoyens. L’Accord de la Saint-Sylvestre, désormais dépassé, et dont les clauses majeures n’ont pas été respectées et appliquées, ne pourrait plus être invoqué, étant vidé naturellement de toute sa substance.
Les élections mal organisées ne pourraient apporter de solution à la crise de légitimité du pouvoir. Face au cul-de-sac qui se profile à l’horizon et compte tenu du danger que toute la nation congolaise risque de courir, le peuple congolais, qui a déjà manifesté son mécontentement à plusieurs reprises, est appelé à finaliser son projet d’éradiquer la dictature en activant l’article 64 afin de bouter dehors ceux qui détiennent et exercent le pouvoir par la force. Les lamentations et les slogans scandés à longueur de journée ne suffiront point. C’est la détermination d’en découdre, une fois pour toutes, avec ces caciques du pouvoir qui est le levier de la victoire. C’est tout le peuple qui doit se lever comme un seul homme pour le sursaut final. Il faut pour cela mettre en place une synergie au niveau d’actions à mener sur le terrain. Tous les mouvements et toutes les forces vives du pays qui ne souhaitent pas que la mère-patrie sombre dans le chaos et dans l’obscurantisme devraient se déployer dans l’action pour abattre le régime dictatorial.
Il sied de souligner les efforts entrepris par le Mouvement « Paix et Solidarité » qui est parvenu à fédérer différents mouvements de lutte afin d’agir de manière coordonnée. L’erreur fondamentale, à ce stade, serait de se fier à ce qui se dit ou qui se fait pour faire croire à l’opinion publique et internationale que la route des élections est balisée. Brandir concomitamment une autre alternative populaire est un moyen de pression efficace et plus encore, elle est intrinsèquement une finalité en soi. Le pouvoir est aux abois. Il doit garantir l’organisation des élections crédibles ou alors, c’est l’option de la rue qui prendra le dessus. Naturellement, celle-ci ne pourrait être improvisée. Elle devrait être minutieusement préparée et alimentée en conséquence par des contributions financières. Sans cela, elle risque de ne pas être viable et suffisamment forte pour prendre le relais de la transition afin de restituer la décision de la gouvernance du pays entre les mains du souverain primaire.
Par Mwamba Tshibangu