Angola: Des Congolais maltraités, « Kabila » et Tshibala se taisent

Depuis le 1er octobre, des Congolais expulsés sans ménagement de l’Angola arrivent en masse au village Kamako au Kasaï et dans les territoires de Kahemba et Kasongo Lunda dans la province du Kwango. Il leur est reproché d’écumer le patrimoine minier de ce pays particulièrement le diamant. A Kinshasa, le gouvernement se mure dans un silence embarrassé. Les médias d’Etat en l’occurrence la RTNC et l’Agence congolaise de presse observent une sorte de « blackout ». Pire, dix jours après, les refoulés, dépouillés de tout, attendent désespérément l’assistance des pouvoirs publics de leur pays. Ces expulsions massives ne sont pas uniques dans leur genre.

Sur les réseaux sociaux, les internautes ont pu visionner des images qui révoltent. On y voit des policiers angolais bastonner des personnes présentées comme étant des Congolais. Ces derniers sont assis à même le sol. A la merci des tortionnaires. A Kinshasa, c’est le silence plat.

Ministre de l’Intérieur Henri Mova

L’ex-opposant Bruno Tshibala, promu Premier ministre depuis le mois de mai 2017, a présidé mardi 2 octobre dernier la 17ème « réunion extraordinaire » du conseil des ministres. Contre toute attente, cette situation humanitaire n’a même pas été effleurée. Dans son rapport au conseil, le ministre de l’Intérieur et de la… sécurité Henri Mova Sakanyi est resté muet. Les « flics » de l’Agence nationale de renseignements pouvaient-ils ignorer ce problème?

Pendant que Mova clamait que la situation générale sur le territoire national est « caractérisée par un calme relatif », plusieurs dizaines de milliers des Congolais arrivaient au village Kamako au Kasaï. Entre le 1er et le 6 octobre, 52.600 personnes ont été dénombrées dans un état qui heurte la dignité humaine.

Au Kwango, des scènes identiques ont été observées à Kahemba et à Kasongo Lunda où l’on compte un total de 35.702 refoulés. Selon des sources, des policiers angolais ont soumis les femmes à des fouilles au niveau vaginal et anal afin, disaient-ils, de « récupérer les diamants ». Il est fait état des cas de violences sexuelles.

LES INTÉRÊTS DU « RAIS »

Intervenant mercredi 10 octobre à l’émission « Dialogue entre Congolais » de Radio Okapi, le vice-gouverneur de la province du Kwango, Tyson Muteba Nswan, qui se référait à un rapport de la société civile, a confié que plusieurs enfants figurent parmi les refoulés. A savoir: 2.687 enfants non-accompagnés, 3.711 enfants séparés de leurs parents et 1.895 orphelins.

Au cours de cette émission, le vice-Gouverneur Muteba – qui avoue être débordé par la situation – a usé des circonlocutions pour diluer l’inertie manifeste du gouvernement central. « Ayons la foi que le gouvernement va intervenir », a-t-il bredouillé en demandant aux « Congolais » de venir en aide aux expulsés. Il est assez stupéfiant d’entendre un détenteur du pouvoir d’Etat se lamenter.

A en croire Tyson Muteba, il y aurait plusieurs « Ouest africains » parmi les personnes renvoyées au Congo-Kin. Rien d’étonnant dans ce « pays libéré » où les nationaux n’ont aucune preuve de leur citoyenneté. En mai 1997, les « libérateurs » s’étaient empressés d’invalider la carte nationale d’identité dite « Carte pour Citoyen ». Vingt années après, les Congolais attendent toujours la nouvelle carte d’identité. Depuis 2006, c’est la carte d’électeur qui en tient lieu. Comble de l’ironie, les militants du PPRD, le parti kabiliste, possèdent des cartes biométriques en tant que membres. L’Etat serait-il moins bien loti qu’une association politique?

De gauche à droite, Tyson Muteba et Kanys Makofi Kabamba

« Joseph Kabila » qui fait mine de ne pas voir ni entendre ce qui se passe depuis le 1er octobre au village Kamako et dans les territoires de Kahemba et de Kasongo-Lunda, n’a pu s’empêcher de dépêcher illico presto, à Lubumbashi, le ministre de l’Economie l’ex-opposant Joseph Kapika et son collègue du Portefeuille Wivine Mumba à Lubumbashi. Mission: « s’enquérir des causes à l’origine de la hausse du prix de la farine de maïs sur le marché ». Les intérêts politiciens du « rais » auraient-ils préséance sur l’intérêt général?

DETTE MORALE

Pour la petite histoire, l’Angola a sauvé, à deux reprises, le régime AFDL-PPRD du naufrage. La première fois c’était en en août 1998 au lendemain de la rupture de la « coopération militaire » entre le Mzee LD Kabila et ses ex-parrains ougandais et rwandais. L’armée angolaise barra la route au commando conduit par James Kabarebe. Le commando fonçait vers la capitale après avoir pris le contrôle de quelques sites stratégiques au Bas-Congo. La tentative de coup d’Etat fut étouffée dans l’œuf.

En mars 2007, l’armée angolaise est venue à la rescousse des éléments de la garde prétorienne de « Joseph Kabila ». Ceux-ci étaient aux abois face aux soldats aguerris étiquetés « MLC » chargés de la garde rapprochée du vice-président de la République Jean-Pierre Bemba Gombo. On le voit, « Joseph » a contracté une « dette morale » vis-à-vis du régime MPLA.

Les deux situations décrites ci-haut n’expliquent pas la cause profonde de l’inaction volontaire de « Kabila ». En avril 2014, des Kinois en « séjour irrégulier » au Congo-Brazzaville subirent le même sort dans une opération baptisée « Mbata ya Mokolo ». Sans émouvoir le « raïs ». Des sources indiquèrent que ces expulsions procédaient d’un « accord secret » signé entre Denis Sassou Nguesso et « Kabila ». Celui-ci espérait « récupérer » quelques opposants ayant trouvé refuge de l’autre côté du fleuve Congo. Quatre années après, des refoulés du Congo-Brazzaville continuent à vivoter dans la capitale.

Vingt années après la prétendue « libération » du 17 mai 1997, les ex-Zaïrois ressemblent de plus en plus à des « orphelins » abandonnés à leur triste sort. En cause, le sommet de l’Etat est occupé par un imposteur qui n’a aucune attache psychologique avec le pays et sa population. Les refoulés d’Angola, eux, ne savent à quel Saint se vouer…

 

Baudouin Amba Wetshi

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