Le gouverneur de la province du Tanganyika (134.940 km²), Richard Ngoie Kitangala, a présenté, mercredi 26 septembre, à Kinshasa, un « Plan de développement » de cette province. Il est évalué à 3 milliards de dollars sur quatre ans (2019-2024). Des questions restent sans réponse tant en ce qui concerne l’origine du financement que de la solvabilité de cette région essentiellement agricole. Des observateurs voient, en filigrane, l’ombre de la fratrie « Kabila ». Depuis le mois de juin 2016, « Joseph » manifeste un intérêt grandissant sur cette partie du pays qui jouxte sa Tanzanie natale mais aussi le Burundi et la Zambie. Des sources crédibles font, par ailleurs, état de la découverte d’un important gisement d’or noir dans les eaux du Lac Tanganyika.
A quelques 80 jours de la date fixée pour les élections générales, le gouverneur Richard Ngoie Kitangala a créé un petit « événement » en présentant le mercredi 26 septembre le « Plan de développement » de la province de Tanganyika. Qui oserait le lui reprocher? Personne! Des questions restent cependant sans réponses.
Qui a conçu ce « plan de développement » au moment où la gouvernance tant politique qu’économique semble en berne tant au niveau provincial que national? Quelle est l’origine du financement? Quelle est la capacité de solvabilité de la province du Tanganyika? Pourquoi maintenant?
A toutes ces questions, Ngoie Kitangala est resté allusif. Intervenant le jeudi 27 septembre à l’émission « Dialogue entre Congolais » de Radio Okapi, John Banza Lunda, ministre provincial du plan, n’a pas été d’un grand secours. Sauf dans l’énumération des « priorités » de ce plan. A savoir: renforcement des institutions, consolidation de la paix, sécurité, cohésion sociale, amélioration des services sociaux et développement des infrastructures.
D’après Banza Lunda, « c’est le peuple du Tanganyika qui a conçu cette stratégie de développement ». Le peuple, c’est qui? Par quel mécanisme s’est-il prononcé? Mystère! S’agissant du financement, l’homme assure que le gouvernement national fournira « une partie ». Une « autre partie » viendra des « partenaires techniques et financiers ». Sans d’autres détails.
TROIS MILLIARDS USD
Au moment où les détenteurs des capitaux les plus sérieux évitent soigneusement le « Congo démocratique », le gouverneur Ngoie assure avoir trouvé des « bailleurs de fonds » prêts à mobiliser 3 milliards de dollars – excusez du peu – sur quatre ans (2019-2022). Chaque année, ces « bons samaritains » mettront 750 millions USD au service du développement de cette province congolaise. La solvabilité de cette région essentiellement agricole – et qui ne compte pas une seule industrie – reste à démontrer.
A en croire le ministre Banza, ce « plan » bénéficierait du soutien du gouvernement national. Une situation pour le moins paradoxale qui viendrait à confirmer la volonté de « Kabila » de privilégier certains coins du pays au détriment des autres. La tentation est forte de parler d’une institution des inégalités au niveau des provinces.
L’article 181 de la Constitution congolaise institue dans son deuxième alinéa une « Caisse nationale de péréquation ». Mission: « financer des projets et programmes d’investissement public, en vue d’assurer la solidarité nationale et de corriger le déséquilibre de développement entre les provinces et les autres territoires décentralisés ».
Douze ans après la promulgation de cette Loi fondamentale, cette « Caisse » censée donner une « égalité de chance » aux 26 provinces du pays n’a toujours pas été installée. Un déficit de volonté politique. A quelques rares exceptions près, toutes les régions du pays souffrent d’un criant manque d’infrastructures.
Selon des sources bien informées, des « sondages » auraient révélé la présence d’un important gisement d’or noir sous le Lac Tanganyika. Depuis juin 2016, « Kabila » effectue des visites fréquentes au chef-lieu de cette province.
« BLANCHIMENT »
Le 4 janvier 2018, le « raïs » s’est rendu à Kalemie où il fait construire un bateau de plus de 3.500 tonnes. Plusieurs entreprises chinoises opèrent dans la région. C’est le notamment de « CREC9 » et SZTC (Société Zhengwei Technique Corporation). Celles-ci se sont vues attribuer des marchés de plusieurs millions de dollars sans appel d’offres. Le Groupe Malta Forrest n’est pas en reste.
« Kabila » y a lancé quelques projets pharaoniques: élargissement de l’aéroport de Kalemie dont la longueur de la piste est passée de 1750 à 2500 mètres. Coût: 18 millions USD; modernisation de l’aérogare par la société chinoise de SZTC. Coût? Mystère; érection d’un stade omnisports au quartier Kichanga, montant: 10 millions USD. Une université serait également en construction.
Pourquoi un tel intérêt vis-à-vis de la ville de Kalemie? Des détracteurs du régime finissant soupçonnent « Kabila » et ses partenaires mafieux d’être attirés par l’odeur du pétrole. Il semble bien qu’une entreprise chinoise serait sur le point de débuter l’exploitation.
On apprenait, vendredi 28 septembre, que le vice-gouverneur de la province de Tanganyika, Ali Bin Omari Simukindje, a été chargé de remettre cinq vaches et plus de 300 sacs de farine de maïs, trois cent boîtes d’huile végétale, des sacs de sel et des cartons de biscuits à la « population autochtone » du village Lukwangulo. Le donateur n’est autre que « Kabila » dont la résidence à Kalemie serait située à un jet de pierre de ce hameau.
Et si le « financier fantôme » du « plan de développement de la province de Tanganyika » n’était autre que le président hors mandat « Joseph Kabila »? Quelle serait l’origine des sous à mobiliser? Blanchiment?
Baudouin Amba Wetshi