La décision est tombée dans l’après-midi de jeudi 14 juin. Dans une communication gouvernementale, le vice-Premier et ministre belge des Affaires étrangères, le libéral francophone (MR) Didier Reynders, a mis fin à un suspens qui dure depuis quatre jours. Le gouvernement belge a donné le « feu vert » autorisant l’ancien vice-président de la République Jean-Pierre Bemba Gombo à fouler le sol belge pour rejoindre son épouse et leurs cinq enfants. Il ne reste plus qu’à accomplir des « formalités administratives d’usage ».
Didier Reynders, ministre belge des Affaires étrangères
« La Belgique a toujours inscrit son action en soutien aux juridictions pénales internationales. Dans ce contexte, les autorités belges ont répondu favorablement à la demande de la Cour [pénale internationale, Ndlr] de permettre le séjour de Monsieur Bemba en Belgique, où réside sa famille, suite à sa mise en liberté provisoire. La décision a été communiquée à la Cour et les démarches pratiques seront entreprises à cet effet dans les jours à venir », indique le communiqué publié par le chef de la diplomatie belge.
Concrètement, les avocats du président du MLC doivent accomplir les formalités usuelles en vue de l’obtention de l’autorisation de séjour.
Selon des sources, la demande de Bemba de rejoindre sa famille en Belgique aurait donné lieu à des tractations frisant des « marchandages politiques » au sein de la coalition qui dirige l’Etat fédéral.
Les libéraux francophones, réputés à tort ou à raison proches de « Joseph Kabila » semblaient traîner les pieds. Et ce contrairement aux nationalistes flamands de la NV-A qui n’ont jamais fait mystère de leur répulsion du système incarné par le satrape congolais dont le dernier mandat a expiré depuis le 19 décembre 2016. Une fois n’est pas coutume, le secrétaire d’Etat à l’Asile et Migration, le très médiatique Théo Francken, a fait diligence sans « atermoiements funestes ».
Pour l’anecdote, lors de l’attentat terroriste survenu le 29 mai dernier à Liège, le ministre d’Etat François-Xavier de Donnéa, un des « éléphants » du MR, se trouvait à Kinshasa. L’opinion tant nationale qu’internationale ne cachait pas sa surprise en prenant connaissance du message larmoyant de « soutien » et de « solidarité » que le « raïs » – réputé impavide – s’était empressé d’adresser au peuple belge. Les deux pays sont fâchés depuis belle lurette. De Donnéa aurait-il mis à profit son passage à Kin pour faire du lobbying?
Les auditeurs de RFI ont été surpris jeudi d’entendre une commentatrice accuser les autorités belges d’expression néerlandophone de retarder l’examen du « dossier Bemba » au motif que ces dernières seraient « proches de Joseph Kabila ». Objectif: empêcher Bemba de rejoindre sa famille domiciliée dans la très huppée commune de Rhode-Saint-Genèse dans le Brabant flamand.
PASSEPORT BELGE
La communication faite par Didier Reynders sur ce dossier Bemba vient tordre le cou – jusqu’à la preuve contraire – aux rumeurs répandues sur les réseaux sociaux selon lesquelles le « chairmain » détiendrait la nationalité belge. « Lors des affrontements armées en mars 2007, des éléments de la garde présidentielle avaient découvert à la résidence du vice-président Bemba un passeport belge en son nom », entend-on dire.
Procureur Fatou Bensouda
On peut gager que la réponse favorable donnée par le gouvernement belge n’a pas faire la joie de la procureure près la CPI, la Gambienne Fatou Bensouda. Celle-ci se consolait, depuis vendredi 8 juin, de garder l’ex « gros poisson » sous surveillance dans un hôtel à La Haye.
Depuis que la Chambre d’appel de cette juridiction internationale a annoncé l’acquittement du leader du MLC, l’ex-procureure et ministre de la Justice du dictateur déchu Yahya Jammeh mène une sorte de combat d’arrière-garde à l’encontre des juges d’appel qui ont mis à nu les erreurs de procédure commises tant par « Fatou » que son prédécesseur, le très vaniteux Luis Moreno-Ocampo.
Mauvaise perdante, Bensouda s’est fendue, mercredi 13 juin, d’un communiqué plein d’amertume et de rage. Elle dit respecter « l’irrévocabilité » de cette décision tout faisant remarquer que « certains aspects de la décision rendue à la majorité des juges » reste préoccupante à ses yeux. On est où là!
Dix ans après son transfert à la prison de Scheveningen à La Haye, Bemba Gombo va enfin retrouver une vie familiale avec « Mama Lilia » et leurs cinq enfants dans leur domicile comme le montre la photo d’archives qui illustre cet article. « Ça pourrait aller très vite », assurait, jeudi soir, une source bien informée.
Baudouin Amba Wetshi
