Francis Kalombo, opposant à « Kabila » mais pas trop…

Proche parmi les proches de l’opposant et candidat à la prochaine élection présidentielle Moïse Katumbi Chapwe, Francis Kalombo a annoncé, lundi 7 mai, son départ du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) dont il est un des co-fondateurs. Qualifiée de « non-événement » par certains, cette annonce est jugée « tardive » voire « suspecte » par d’autres.

Lors de la publication, début avril, de la liste des membres du « bureau politique » de la coalition « Ensemble pour le changement » qui soutient la candidature de l’ancien gouverneur du Katanga à la prochaine présidentielle, des observateurs avaient noté, non sans surprise, l’absence de Francis Kalombo parmi les nominés au « politburo ».

On peut désormais imaginer que l’ancien président national de la ligue des jeunes du PPRD voulait se ménager une « sortie honorable » en lieu et place d’une exclusion déshonorante pour « vagabondage politique ». Une situation qui l’aurait privé non seulement de son mandat de député national mais surtout des émoluments qui y sont attachés. Pas moins de 12.000 $/par mois.

Les experts en législation sociale diront qu’après son départ en exil en janvier 2015, le « frondeur » Kalombo continuait à entretenir un « lien de subordination » par rapport à son employeur en l’occurrence l’Assemblée nationale. Le salaire étant la contrepartie du travail presté, une question saute à l’esprit: quelle est la nature du « job » accompli par ce parlementaire autoproclamé « dissident »?

L’Assemblée nationale a fait preuve d’une mansuétude assez équivoque à l’égard d’un de ses membres dont le mandat aurait dû prendre fin dès la session de mars 2015. Et ce pour « absence non justifiée et non autorisée à plus d’un quart de séances d’une session » (article 110 de la Constitution).

C’est désormais officiel: « Francis » soutient « Moïse ». Le « hic » dans cette histoire est que le premier a attendu près de 27 mois pour rompre le cordon ombilical avec le PPRD. « J’ai décidé ce jour de prendre officiellement congé du parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie dont je suis un des membres fondateurs. (…), je remets avec émotion et gravité le mandat de député que le peuple congolais m’a confié ».

Jean Kamisendu (à g.) et Sylvano Kasongo (à d.)

Dieu seul sait les représailles que le parti kabiliste inflige généralement à ceux qui osent lui tourner le dos. Cela va du procès-bidon au déguerpissement manu-militari des maisons de l’Etat. L’ancien gouverneur du Bandundu, Jean Kamisendu en sait quelque chose. L’ex-DGA de la Snel, Tokwaulu Aéna, mêmement. La liste est loin d’être exhaustive.

Dans sa déclaration faite depuis l’Afrique du Sud, Kalombo a rappelé le différend qui l’a opposé en janvier 2015 avec ses camarades du PPRD. « (…), je me suis opposé avec force à la modification de la loi électorale. (…)« . Il a lancé au passage ces mots: « Je quitte le PPRD parce qu’il s’est transformé en bourreau cruel du peuple congolais ».

« ALLIER LA MORALITE A LA POLITIQUE »

D’après lui, il remet son mandat de député du PPRD parce qu’il a « la conviction qu’il faut en toutes choses se mettre en ordre avec sa conscience et savoir allier la moralité à la politique ». Il rejoint désormais « Ensemble pour le changement » et réitère son soutien à « Moïse » avec qui il partage « les mêmes convictions ».

Tout en ignorant ses motivations, il faut bien reconnaitre que Francis Kalombo avait eu le courage de dénoncer la disposition subordonnant la tenue des élections à l’organisation d’un recensement de la population. Menacé par les sbires du régime qu’il a servi avec zèle, il a pris le chemin de l’exil.

Pour mémoire, Moïse Katumbi Chapwe avait claqué la porte du PPRD par une « déclaration politique » sans équivoque en date du 29 septembre 2015. « Au moment où nous, peuple congolais, entrons dans la dernière ligne droite du dernier mandat constitutionnel du Président de la République, les faits indiquent que depuis maintenant un an, tout est mis en œuvre pour ne pas respecter la Constitution (…) en élaborant une stratégie de glissement des dates des scrutins », écrivait-il.

D’aucuns continuent à reprocher à l’ex-gouverneur du Katanga d’avoir servi aux côtés de « Kabila » durant près d’une décennie. Pour eux, l’homme devrait, de ce fait, être également comptable du bilan des dix années de l’Etat-PPRD-MP. D’autres voix se sont élevées en accusant le jeune frère de Raphaël Katebe Katoto d’avoir bâti sa fortune « grâce au raïs ».

Après son départ du pays, en juin 2016, dans les conditions que l’on sait, Katumbi a fini par retrouver « l’ami Francis » en Europe. Coïncidence ou pas, c’est en mai 2016 que Kalombo avait notifié au secrétaire général du PPRD sa démission en qualité de président national de la ligue des jeunes.

Francis Kalombo

Francis Kalombo qui aime répéter à qui veut l’entendre qu’il a commencé à « travailler » avec « Joseph Kabila » bien avant l’avènement de celui-ci à la tête de l’Etat, n’a pas que des amis. Ses contempteurs assurent que depuis son départ en exil, il n’a jamais osé s’en prendre au « raïs ». Bien au contraire. Il tient à son égard un discours mielleux à la limite de la révérence. « Francis Kalombo concentre ses attaques à l’entourage du président Kabila », entend-on dire.

Dans une interview accordée à radio Top Congo en décembre 2017, il dit « ne plus reconnaître » l’homme qui trône à la tête du pays. « Si j’avais l’occasion de rencontrer le Président de la République, je lui dirai que la plupart de ses collaborateurs le trompent. Il est grand temps pour qu’on puisse l’aider. Nous devons aider le Président de la République à s’en sortir », soulignait-il.

Lors de cet entretien, Kalombo a fini par avouer qu’il a « toujours été député du PPRD » et qu’il continuait à percevoir ses émoluments. Pour lui, il n’est nullement en exil. « Dire que je suis en exil, revient à insulter le Président de la République ».

La sortie médiatique de l’ancien président de la ligue des jeunes du PPRD continue à susciter des interrogations. L’homme se dit opposant à « Kabila » mais pas trop. Et si Kalombo était chargé de jouer un « rôle »?

 

B.A.W.

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