Quand le Congo-Kinshasa s’éveillera…

Outline map of Democratic Republic of Congo with the national flag superimposed at country outline borders. 3d graphic with shadow and the feeling of space

A Dar es Salam, le président ougandais Yoweri Kaguta Museveni a demandé à son homologue congolais Felix Tshisekedi Tshilombo d’engager un « dialogue » direct avec le M23. Paul Kagame du Rwanda ne dit pas autre chose. « C’est la ligne rouge à ne pas franchir », avait déclaré le chef de l’Etat congolais, le 18 janvier 2025, lors de l’échange de vœux avec le corps diplomatique.

Cette « recommandation » du numéro un Ougandais a été diversement commenté. D’aucuns ont parlé de « trahison ». Au motif que Museveni qui a des contacts avec « Fatshi » ait pu rester sourd et muet sur l’agression de l’Est de la RDC par le Rwanda.

En réalité, les dirigeants rwandais et ougandais restent dans leur logique. Une logique qui remonte au mois d’octobre 1996, lors du lancement de l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre).

Ladite logique s’appuie sur trois piliers. Primo : installer un « régime ami » à Kinshasa ; un régime qui ne menace pas la sécurité nationale tant de l’Ouganda que du Rwanda. Secundo : empêcher la renaissance d’un Congo fort doté d’une armée dissuasive et Enfin : se faire payer en exploitant les ressources naturelles du Congo.

Dans un documentaire intitulé « L’Afrique en morceaux » réalisé en 2000 par l’Egyptienne Jihan El-Tahri, Museveni n’est pas allé par quatre chemins : « Nous avons fait tout ça pour rien ? ». Dans une interview au magazine « Jeune Afrique/L’Intelligent » en juillet 2001, « Joseph Kabila » est plus explicite : « Nous avons combattu Mobutu les armes à la main en prenant des risques pour nos vies ».

Le 1er octobre 1990, le Front patriotique rwandais attaque le Rwanda de Juvénal Habyarimana. En application de l’article 2-1 de la Convention portant création de la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL), le maréchal Mobutu est venu à la rescousse en déployant un bataillon des forces spéciales commandé par le général Donatien Mahele Lieko Bokungu. Les combattants du FPR sont mis en débandade et renvoyés en Ouganda.

En juillet 1994, le FPR prend le pouvoir à Kigali. On assiste aussitôt à l’arrivée massive des experts américains. On peut gager que ceux-ci n’ont pas manqué de fournir à Kagame et ses camarades des informations tactiques sur l’état de déliquescence des Forces armées zaïroises. Une armée qualifiée à tort « d’armée de Mobutu ». Une armée abandonnée à son triste sort durant les six années et demie de « transition démocratique » émaillée du bras de fer Mobutu-Tshisekedi. Une armée non-entrainée, mal équipée, mal entretenue. Une armée désoeuvrée.

On ne le dit pas assez mais, depuis 1990, les FAZ étaient dans le collimateur de Museveni et de Kagame. A preuve, dès l’accession au pouvoir de LD Kabila à Kinshasa, le Rwandais James Kabarebe, alors colonel, fera interner 45.000 FAZ dans un camp de concentration à Kitona, au Kongo Central. Bilan : plusieurs milliers de morts dont les meilleurs éléments issus de grandes écoles militaires.

Kagame savait qu’un pays dépouillé de son armée ne peut pas se défendre. Museveni ira plus loin en parlant de la Somalie : « Un pays qui n’a pas d’armée ressemble à un homme atteint du Sida dont le système immunitaire ne fonctionne plus ».

Après la mort de Laurent-Désiré Kabila dans les circonstances non-élucidées à ce jour, Un « Ovni politique » est apparu le 17 mai 2001. Il s’agit de « Joseph Kabila ». Inconnu de la grande majorité des Congolais, « Joseph » semble correspondre au « régime ami » souhaité tant par Museveni que Kagame.

L’appétit venant en mangeant, le nouvel homme fort rwandais a fini par réalisé que la partie orientale de la RDC pourrait constituer son « espace vital ». Alors Envoyé spécial de l’Union Européenne pour les Grands Lacs, Aldo Ajello de confier à l’hebdomadaire Jeune Afrique n°2410 du 18au 24 mars 2007 ce qui suit : « A Dar es Salam, le 21 décembre 2005, Kabila et Kagame se sont rencontrés longuement ». D’après lui, Kabila s’est engagé, à cette occasion, à « prendre en compte  les intérêts vitaux du Rwanda. Depuis tout va bien. »          

Investi le 24 janvier 2019, Felix Tshisekedi Tshilombo a donné dans un premier temps l’image d’un « Faux naïf ». Il a fini par comprendre que le Rwanda de Kagame entend assujettir la RDC à travers ses supplétifs du M23. Dialoguer avec ce mouvement, comme le suggère Museveni, reviendrait à sceller l’asservissement de notre pays par le mixage et le brassage. Pire, il faudra exécuter l’accord du 23 mars 2009 signé par Joseph Kabila concédant l’Est de la RDC au Rwanda. Le prix à payer est lourd: laisser Kigali et Kampala piller nos ressources.

Pour avoir dit « niet » aux apprentis colonisateurs que sont Museveni et Kagame, Felix Tshisekedi est devenu un homme à abattre. Un homme à abattre parce qu’il veut restaurer la souveraineté nationale de la RDC et  l’intégrité de son territoire. Incompris, « Felix », est devenu un homme à abattre parce qu’il est résolu à éradiquer l’influence rwandaise sur les institutions congolaises. Civiles et militaires.

Quand le Congo-Kinshasa s’éveillera…   

Baudouin Amba Wetshi

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