COP29 à Bakou : 300 milliards d’aide climatique internationale promis par an

Selon des experts du Sud, ce financement est plutôt insignifiant par rapport aux efforts demandés aux pays en voie de développement de préserver la biodiversité alors qu’ils ne sont pas suffisamment aidés  par les pays du Nord.

Du 11 au 24 novembre 2024 s’est tenue à Bakou, en  Azerbaïdjan, la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 29). Les 200 pays participants, dont la RD Congo, ont mis l’accent  sur le financement climatique « afin d’aider les pays à protéger leurs populations et leurs économies contre les catastrophes climatiques, et à partager les avantages de l’essor des énergies propres ». L’accord auquel les pays sont parvenus après d’âpres négociations permet notamment de tripler le financement aux pays en développement, par rapport à l’objectif précédent de 100 milliards de dollars par an. Ce financement est maintenant fixé à 300 milliards de dollars par an d’ici à 2035. Mais, c’est deux fois moins que ce que réclamaient les pays en développement. De l’avis des experts du Sud, c’est peu par rapport aux efforts demandés aux pays en voie de développement de préserver la biodiversité alors qu’ils ne sont pas suffisamment aidés  par les pays du Nord. Il a aussi été entendu, lors de la COP29, que tous les acteurs  travailleront ensemble pour augmenter le financement aux pays en développement, à partir de sources publiques et privées, afin d’atteindre un montant de 1.300 milliards de dollars par an d’ici à 2035. Notons que c’est à Copenhague, en décembre 2009,  que les pays développés ont fait la promesse de décaisser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 pour permettre aux pays en développement de faire face aux changements climatiques. D’après l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les pays développés sont allés au-delà de cet engagement. Ils sont parvenus  à mobiliser en 2022 des fonds de l’ordre de 115,9 milliards de dollars américains.

La RD Congo, pays-solution au réchauffement climatique

Les crédits carbone ont pour objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre, de promouvoir la conservation de la biodiversité et de générer des bénéfices économiques et sociaux. Mais la RD Congo qui s’est proclamée pays-solution ne profite pas assez de ces financements climatiques. Le pays compte environ 480 espèces de mammifères, 565 espèces d’oiseaux, 1.000 espèces de poissons, 350 espèces de reptiles, 220 espèces de batraciens et plus de 10.000 angiospermes (plantes à fleurs) dont 3.000 seraient endémiques. Le pays a  neuf parcs nationaux, soit 13,8% du territoire national. Parmi ces aires protégées, quatre parcs sont désignés comme sites du patrimoine mondial par l’UNESCO. Il s’agit des parcs suivants: Virunga, Kahozi-Biega, Salonga, et Garamba. A ceci, il faut ajouter un vaste patrimoine forestier, représentant 10% des réserves forestières tropicales mondiales, incluant près de 50% des forêts denses d’Afrique et 60% des forêts tropicales du bassin du Congo ayant une capacité d’absorption du carbone qui dépasse l’Amazonie. Enfin, le pays dispose de vastes réserves de minerais qui concourent  à la transition écologique: cuivre, cobalt, lithium.  Suivant la Banque mondiale, « les effets des changements climatiques sont déjà perceptibles à travers le pays, notamment la persistance des fortes chaleurs, des pluies violentes, la dégradation des terres, particulièrement par des érosions, le dérèglement des saisons, l’augmentation des séquences de sécheresse pendant les saisons de pluie, et les inondations ».

Le Groupe d’études sur le Congo (GEC) a publié, en octobre, un rapport  intitulé « Attentes et désillusions climatiques en République démocratique du Congo ». Ce rapport indique qu’en 2022 « alors qu’elle contribue à l’atténuation du réchauffement climatique grâce notamment à ses forêts et tourbières, la RDC fait figure de parent pauvre en financements climatiques. Le Fonds national pour la réduction des émissions provenant du déboisement et de la dégradation des forêts (Fonaredd) qui a été mis en place en 2012 pour canaliser les appuis des bailleurs, n’a réussi à mobiliser que 750 millions de dollars américains, y compris le dernier financement relevant de la deuxième lettre d’intention signée avec le fonds CAFI (Initiative pour la forêt de l’Afrique centrale) pour un montant de 500 millions de dollars américains ». En comparaison, effet, les études menées dans le cadre de l’élaboration de la contribution  déterminée à l’échelle nationale (CDN) évaluent les besoins du pays en matière de lutte contre les changements climatiques à 48,68 milliards de dollars américains à l’horizon 2020-2030, soit une moyenne de 4,8 milliards de dollars par an. A noter que Kinshasa a abrité, les 27 et 28 novembre, l’Atelier national sur les perspectives de révision de la contribution déterminée à l’échelle nationale (CDN). La prochaine soumission aura lieu en février 2025. Les CND sont  revues tous les cinq ans pour aider le monde à se rapprocher de l’accord de Paris sur le climat de 2015 visant à limiter le réchauffement climatique à +1,5°C.

Le manque d’attractivité de la RD Congo face aux financements climatiques

Pour permettre à l’Indonésie de faire avancer son objectif de neutralité carbone à ce pays  a su attirer en novembre 2022 un financement de l’ordre de 20 milliards de dollars américains de la part des États-Unis, du Royaume-Uni, du Canada et de la France. Lors de la COP27, l’Afrique du Sud a reçu des promesses de financement de 8,5 milliards de dollars américains de la part de l’Allemagne, du Royaume-Uni, des Etats-Unis, de la France et de l’Union européenne. En comparaison, la RD Congo n’a réussi à mobilier que 750 millions de dollars en 2022. C’est la sempiternelle histoire des ressources naturelles dont regorge le pays mais qui ne profite pas à la population du fait de la mauvaise gouvernance et de la corruption. Suivant le rapport de GEC, « L’abondance des ressources dont dispose la RDC dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques constitue une condition nécessaire, mais pas suffisante pour devenir un grand bénéficiaire des financements climatiques publics et/ou privés. Parmi les déterminants majeurs figurent la bonne gouvernance, le climat des affaires, la stabilité socio-économique et politique, la capacité à mettre en œuvre des politiques de manière efficace et efficiente, la capacité à contrôler la corruption, ou encore l’existence d’un cadre juridique transparent. En outre, les pays riches ont tendance à prioriser des financements climatiques à des fins d’atténuation. Ces pays tiennent compte aussi des considérations géopolitiques en matière d’allocation les financements climatiques ».

Gaston Mutamba Lukusa

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