En réaction à l’interview accordée à Congo Indépendant en date du 11 décembre dernier par l’ancien ministre Antipas Mbusa Nyamwisi, Bertrand Bisimwa, président de l’ex-mouvement rebelle M23 nous a fait parvenir un « droit de réponse ». Cinq pages et demi. Pas moins. Et pourtant, les passages où le M23 est cité couvrent à peine une demi-page. Conformément au droit de l’information en la matière, la personne lésée a le droit de réagir en observant la même longueur que le texte qui fait grief. Notre journal se limite par conséquent à citer la réplique aux passages querellés. A en croire un Bertrand Bisimwa très respectueux du « droit d’ainesse », il aurait tenté sans succès d’entrer en contact avec le président du RCD/K ML Antipas Mbusa Nyamwisi. Bisimwa exige des « excuses » pour des propos attribués « injustement » au M23.
Notre réaction aux propos tenus par l’honorable Antipas Mbusa Nyamwisi lors de son interview accordée à www.congoindependant.com le 13 décembre 2017
« Tout d’abord nous tenons à préciser que c’est à notre corps défendant que nous sommes obligés de rompre momentanément avec nos habitudes pour répondre, à travers les médias, à un ainé et un ancien compagnon de la révolution; nos multiples tentatives de le joindre en privé pour en discuter ayant échoué. La contrainte du rétablissement de la vérité nous ayant obligé, nous lui présentons donc, anticipativement, toutes nos excuses ».
« Notre démarche vise tout simplement à opposer les faits à ce qui apparaît comme des affirmations non fondées et dont la seule parole de notre ainé suffit comme preuve ».
I. DE LA CREATION DU MOUVEMENT DU 23 MARS, M23 EN SIGLE PAR JOSEPH KABILA
« Il s’agit d’un jugement à l’emporte-pièce monté sur base d’une lecture en pièces détachées de l’histoire du M23 ».
« A moins de compter sur une amnésie collective des Congolais, l’honorable Mbusa Nyamwisi devrait avoir frais dans sa mémoire que la lutte du M23 date de décembre 2003. (…). (…), nous avons créé le 23 décembre 2003 à Bukavu, une organisation non gouvernementale dénommée Synergie Nationale pour la Paix et la Concorde, SNPC en sigle, pour servir d’instrument d’alerte à ces ‘dirigeants-révolutionnaires’ sur ce drame qui n’avait jamais été pris en compte par ces anciens négociateurs de Sun-City dont notre ainé Antipas Mbusa Nyamwisi, qui fut nommé, par ailleurs, ministre de la Coopération régionale ».
« C’est ainsi que le 5 juillet 2006, nous déciderons de fusionner la SNPC et le CMDP pour créer une nouvelle organisation appelé le Congrès National pour la Défense du Peuple, CNDP en sigle (…) ».
« C’est à la suite du refus par le gouvernement de mettre en œuvre le dernier accord signé avec lui le 23 mars 2009, que naquit le 6 mai 2012 le Mouvement du 23 mars (…) ».
II. DE LA DATE DE LA CRÉATION EFFECTIVE DU M23 ET DU LANCEMENT DES HOSTILITÉS
« La prise de Bunagana n’est pas l’acte fondateur du M23. Plusieurs localités étaient déjà tombées sous son contrôle: Runyoni, Mbuzi, Cyanzu, Jomba, etc. »
III. DU RECRUTEMENT DES EX-COMBATTANTS DU M23
Voici ce que nous avons déclaré dans notre communiqué du 4 décembre 2017 en réaction au rapport de Human Right Watch rendu public à la même date: « Les personnes concernées par ces recrutements-rapatriements se comptent parmi les déserteurs et autres indisciplinés radiés au sein de notre Mouvement et qui ont trouvé abris dans les camps des réfugiés autres que les lieux de cantonnement officiel de Bihanga en Ouganda et de Kibungo au Rwanda ».
« Il y a une grande différence entre un bandit et un déserteur ou un bandit et un indiscipliné. (…). Il est donc établi que l’honorable Antipas Mbusa Nyamwisi nous fait porter, injustement, des paroles et des mots que nous n’avons jamais prononcés. Nous espérons qu’en sa qualité d’ainé il saura présenter des excuses, même en privé ».
IV. QUOIQUE L’HONORABLE DISE SUR LE M23, IL EST DE NOTORIÉTÉ PUBLIQUE QUE LA LUTTE DE CE MOUVEMENT A SES MÉRITES NOTAMMENT:
« (…), la fragilisation du régime de manière à le contraindre à faire des concessions de taille à l’opposition politique et à la société civile à travers, notamment, des forums dits Concertations Nationales, Conférence sur la paix, la sécurité et le développement au Nord-Kivu, Sud-Kivu et Maniema, etc ».
« La signature de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba qui prévoyait des reformes profondes dans le pays et un dialogue inclusif entre le Pouvoir et l’opposition »;
« (…). Notre Ainé oublie-t-il que c’est ce même Chef de l’Etat qui, après la mise en déroute de son armée à la prise de Goma en Novembre 2012, avait mobilisé le Conseil de sécurité de Nations-Unies, sous prétexte que le processus de démocratisation du pays issu de l’accord de Sun-City était menacé par le M23 pour que soit créé une Brigade d’Intervention pour traquer ce mouvement. Pouvait-il alors mobiliser pour détruire sa propre créature? »
« Lorsque notre ainé Antipas Mbusa Nyamwisi faisait partie du régime de Joseph Kabila et que nous étions la seule opposition du pays, il nous considérait comme des ennemis de leur régime. (…), nous sommes passés sans transition du statut d’ennemis à celui des amis du même régime parce que seulement lui, notre ainé, a eu des démêlés avec le chef de l’Etat sur une affaire de partage de responsabilités et qu’il est obligé de refaire son image au sein de l’opinion en se refusant de cautionner la lutte du M23 qu’il rejoint, pourtant, dans l’opposition. De qui se moque-t-il? (…) ».
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Note de la rédaction: le « droit de réponse » de Bertrand Bisimwa a un seul mérite. Celui de confirmer ce que l’on savait. A savoir que le CNDP et le M23 n’étaient que les deux faces d’une même médaille. Dans une interview accordée à « Jeune Afrique », le colonel rwandais Patrick Karegeya – assassiné à Johannesburg – avait déclaré que les deux « rébellions » étaient l’œuvre de l’actuel maître de Kigali.
B.A.W.
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