Congo-Kinshasa: Le budget 2023 en forte augmentation

L’accroissement des recettes d’une année à une autre s’explique par les bonnes performances de l’industrie extractive. Ces recettes peuvent encore être optimisées grâce à un meilleur contrôle, un suivi en amont tout comme en aval des circuits de commercialisation ainsi qu’une gestion efficace et transparente du secteur. Il faut éviter, comme par le passé, que les dépenses imprévues ne deviennent la règle et non l’exception et qu’elles ne correspondent pas aux inscriptions budgétaires.

Gaston Mutamba Lukusa

Le vendredi 28 octobre, le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge a présenté devant l’Assemblée nationale le projet de budget de l’Etat pour l’exercice 2023. Ce budget qui est en équilibre s’élève à 29.520,9 milliards de FC (14,6 milliards de USD), soit un taux d’accroissement de 32,7% par rapport au budget de l’exercice 2022 chiffré à 22.253 milliards de FC. Le cadrage macroéconomique qui a servi à l’élaboration du budget de 2023 est le suivant: le taux de change moyen est de 2021,94 francs pour 1 dollar américain, le taux de croissance du PIB est prévu à 6,7% et le taux d’inflation moyen est projeté à 8,9%. Le PIB (Produit intérieur brut) nominal s’élève quant à lui à 151.553,4 milliards de FC (USD 74,954 milliards) et la pression fiscale est de 14,1% (il se situe entre 16% et 22% ailleurs en Afrique).

Le projet de loi de finances a été soumis à un débat général au terme duquel le chef du gouvernement a sollicité un délai de 48 heures pour répondre aux préoccupations des députés nationaux. Le projet sera ensuite envoyé à la Commission économique et financière pour examen approfondi avant son adoption en plénière. Après le vote, il sera transmis au Sénat pour examen. Selon la loi relative aux finances publiques de 2011, « … l’Assemblée nationale dispose de 40 jours à compter de la date du dépôt pour adopter le projet de loi de finances de l’année. Si le projet de loi de finances de l’année déposé dans le délai constitutionnel n’est pas voté dans les 40 jours suivant l’ouverture de la session budgétaire, ledit projet est transmis au Senat pour être adopté dans les 20 jours ». La loi budgétaire doit être promulguée au plus tard le 31 décembre 2022.

Des recettes en augmentation

L’accroissement des recettes d’une année à une autre s’explique par les bonnes performances de l’industrie extractive. Ces recettes peuvent encore être optimisées grâce à un meilleur contrôle, un suivi en amont tout comme en aval des circuits de commercialisation ainsi qu’une gestion efficace et transparente du secteur. Le gouvernement cite aussi la lutte contre le coulage des recettes à travers les organes de contrôle comme l’IGF (Inspection général des finances), la CENAREF (Cellule nationale des renseignements financiers) et la Cour des comptes ainsi que la maximisation des efforts des services, particulièrement au sein des régies financières et services d’assiettes. Les performances de l’industrie extractive résultent de la révision du Code minier, de l’accroissement de la production du cuivre et du cobalt ainsi que de la hausse des cours des matières premières. La récession qui est annoncée dans certains pays industrialisés risquent de porter un coup d’arrêt à cette embellie. Le gouvernement prévoit aussi des recettes extérieures de l’ordre de 6.300 milliards de francs soit 22,5% des recettes du budget général. Mais la crise économique globale qui s’annonce pourrait se traduire par une diminution de l’aide extérieure.

Des dépenses qui reflètent le programme du gouvernement

Selon le Premier ministre, le budget est basé sur le Programme d’actions du gouvernement dans ses volets: 1- Politique, Justice, Défense et Sécurité, 2- Economique et Financier, 3- Reconstruction et 4- Social et Culturel. Dans ce cadre, le gouvernement compte accroitre les dépenses d’investissement dans les secteurs porteurs de croissance (tels que les routes, l’agriculture, la pêche, l’élevage, etc.) ainsi que dans les secteurs sociaux. Il compte aussi poursuivre le financement de la gratuité de l’enseignement primaire. Il en est de même du Programme de développement local des 145 territoires, de l’assainissement du fichier et de la mise à la retraite des agents et fonctionnaires de l’Etat. Il faut ajouter la mise à disposition des crédits relatifs à la mutualisation des opérations électorales et de l’identification des populations.

Concernant la défense nationale, il y a la mise en œuvre de la loi de programmation militaire ainsi que la redynamisation de l’industrie militaire. Heureusement qu’il existe une réelle volonté politique de doter le pays d’une armée forte et disciplinée, car une loi de programmation de la mise en œuvre de la réforme la police nationale fut promulguée en 2013 mais n’a jamais été appliquée. Une mesure importante porte sur « la réduction du train de vie des institutions par une régression de 30% de leur budget de fonctionnement entre 2022 et 2023, avec un effet net de régression de 14,3% des frais de fonctionnement des institutions ». Le gouvernement pourrait aussi optimiser les recettes en fiscalisant les rémunérations des institutions politiques (taux d’imposition de 30%) malgré la forte opposition des parlementaires.

L’intensification de la guerre à l’Est du pays et l’organisation des élections dans les délais constitutionnels risquent de bouleverser les prévisions budgétaires. Il en est de même de l’ampleur de la récession en Europe et des retombées de la guerre en Ukraine (subventions des prix de certains produits de base et des carburants à la pompe). Il faut éviter, comme par le passé, que les dépenses imprévues ne deviennent la règle et non l’exception et qu’elles ne correspondent pas aux inscriptions budgétaires.


Gaston Mutamba Lukusa

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