Des observateurs ne comprennent pas pourquoi les prix du maïs et du manioc augmentent alors qu’ils sont produits sur place et non en Ukraine. En fait, il y a la solidarité des prix entre eux. Il arrive souvent que les prix des produits et des services domestiques s’alignent sur ceux des produits étrangers. La hausse des prix intérieurs s’explique aussi par des problèmes structurels. C’est le cas des difficultés de transport de l’intérieur du pays vers les centres urbains à cause de la dégradation des voies terrestres, ferroviaires et lacustres, de la diminution du nombre de véhicules par suite de leur vétusté, des barrages routiers institués par les services de sécurité. Les prix des carburants demeurent un autre élément déterminant du niveau des prix du fait de son implication sur les coûts de transport.
Bien avant la guerre en Ukraine depuis le 24 février, le Congo-Kinshasa a commencé à subir l’inflation importée. Le monde est aujourd’hui connecté. L’inflation dans un pays entraîne des effets dans un autre. La crise de Covid-19 ainsi que la hausse subséquente des coûts de logistique du fret maritime ont été à la base de cette inflation. Puis vint la guerre en Ukraine, le 24 février, qui eut des répercussions immédiates sur les prix, notamment des céréales et du pétrole. Comme le Congo-Kin vit essentiellement du commerce extérieur, il s’en est suivi que cette hausse des prix a eu des retombées sur l’économie nationale.
Prenant prétexte de cette hausse ses prix, le ministre de l’Economie, Jean-Marie Kalumba fut destitué, le 30 mars, par l’Assemblée nationale après le vote d’une motion de défiance. Les députés nationaux lui reprochaient la hausse des prix des produits de première nécessité bien avant le déclenchement de la guerre en Ukraine. C’est le cas des prix des farines de maïs et de manioc, du riz, du sucre, de l’huile végétale, du poulet, du pain, du lait. Beaucoup ne comprennent pas pourquoi les prix du maïs et du manioc augmentent alors qu’ils sont produits sur place et non en Ukraine. En fait, il y a la solidarité des prix entre eux. Il arrive souvent que les prix des produits et des services domestiques s’alignent sur ceux des produits étrangers. Les producteurs des produits agricoles congolais sont aussi consommateurs des produits importés. Ainsi, pour préserver leur pouvoir d’achat, ils augmentent aussi les prix de leurs produits. La hausse des prix intérieurs s’explique aussi par des problèmes structurels qui sont en fait des goulots d’étranglement. C’est le cas des difficultés de transport de l’intérieur du pays vers les centres urbains à cause de la dégradation des voies terrestres, ferroviaires et lacustres, de la diminution du nombre de véhicules par suite de leur vétusté, des barrages routiers institués par les services de sécurité.
Il y a aussi les phénomènes d’anticipation et de spéculation. Dans le passé, l’effondrement de l’économie avait privé l’Etat des moyens de son fonctionnement. Les pouvoirs publics auraient donc dû réduire leur train de vie. Ils ne l’avaient pas fait. Au contraire, les dépenses publiques ont été multipliées dans des proportions incompatibles avec un niveau de recettes fortement en baisse. Cette politique avait conduit à la dépréciation de la monnaie et à la hausse des prix. La dépréciation continue de la monnaie avait provoqué la pénurie des biens, surtout des biens importés, et enlevé sa valeur à la monnaie nationale, suscitant à son endroit la méfiance au profit des monnaies étrangères. Elle a aussi contribué à la baisse de la consommation, à la fuite les investisseurs et à la dollarisation de l’économie.
Heureusement, l’inflation actuelle ne s’explique pas par des causes monétaires ou des effets de la dépréciation du taux de change. Les prix des carburants demeurent un autre élément déterminant du niveau des prix du fait de son implication sur les coûts de transport. Depuis le début du mois d’avril il s’observe des files d’attente devant les stations d’essence qui sont consécutifs au gel des prix du pétrole à la pompe. Normalement, ces prix doivent augmenter de près de 70%. Mais craignant son impact sur le pouvoir d’achat de la population, le gouvernement a choisi de les subventionner. L’Etat s’est engagé à rembourser aux sociétés pétrolières les pertes. On parle d’une créance d’environ 400 millions de dollars rien qu’en 2022. Mais si l’on n’y prend pas garde, ces subventions risquent de réveiller les vieux démons de déficits budgétaires financés par la création monétaire génératrice à la fois d’inflation et de dépréciation monétaire.
Mieux vaudrait appliquer la politique d’actualisation de la structure des prix lorsque l’un des trois principaux paramètres (prix moyen frontière commercial, taux de change et volume mis en consommation) qui la constituent connait une variation de 5% à la hausse ou à la baisse. L’enjeu fondamental est de mettre fin à la guerre d’hégémonie en Ukraine. Il faut en finir avec les sanctions et contre-sanctions qui handicapent la production, le commerce et la croissance économique mondiale.
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Gaston Mutamba Lukusa