Haut-Katanga: Nicolas Kazadi « fait le ménage » à la DGDA. Mais…

Le ministre des Finances vient d’instruire le numéro un de la Direction générale des douanes et accises (DGDA) de suspendre, à titre conservatoire, des agents suspectés de participation, depuis plusieurs années, dans la fraude pétrolière. Nicolas Kazadi n’a pas dit un mot au sujet de l’étrange contrat qui lie la DGDA aux entreprises privées « Trafigo » et « Pacific consulting« . Ces sociétés privées sous-traitent une importante partie des activités de l’ex-Ofida au poste de Kasumbalesa. Un oubli?

Informée de la « baisse constante » des recettes tant en ce qui concerne les droits de douane, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que la redevance Foner (Fonds national pour l’entretien routier) au niveau de la DGDA/Haut Katanga, l’Inspection générale des finances (IGF) y a dépêché une équipe d’enquêteurs dans cette région du pays qui importe, chaque mois, 93.000 m3 de produits pétroliers. Les inspecteurs de l’IGF ont pu constater que « les opérateurs économiques du secteur pétrolier font perdre au trésor public des milliers de dollars US« .

En ce début du mois d’octobre, le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, a décidé de descendre sur le terrain. Il n’était pas seul. Il était accompagné de l’Inspecteur général des Finances, chef de service, Jules Alingete Key. Deux objectifs: rétablir l’autorité de l’Etat dans le secteur pétrolier et augmenter les recettes publiques.

Nicolas Kazadi a eu, auparavant, des entretiens avec les douaniers et les opérateurs pétroliers appartenant au patronat congolais (FEC). Ensemble, ils ont passé en revue les divers « abus » imputés non seulement aux agents de la DGDA mais aussi à une vingtaine de entreprises « réputées » dans l’évasion fiscale et la contrebande. Jadis, indique un communiqué du ministère des Finances, la fraude était due aux exemptions accordées par le gouvernement central.  « Pour maîtriser la situation et repartir sur de nouvelles bases« , peut-on lire dans le texte précité, le ministre des Finances croit avoir trouvé « l’arme fatale« . Il a instruit le patron de la DGDA de suspendre  » à titre conservatoire« , tous les agents suspectés d’implication dans la corruption. Les entreprises, elles, sont astreintes de verser à l’Etat congolais la somme de 54 millions de dollars. Et ce au plus tard le 20 octobre prochain.

TRAFIGO & PACIFIC CONSULTING

Une vue de la station de péage à Kasumbalesa

Des observateurs n’ont pas manqué de s’étonner de ne trouver aucune allusion sur les sociétés privées « Trafigo » et « Pacific consulting » lesquelles font plus la pluie que le beau en tant que sous-traitants des activités douanières au poste frontalier de Kasumbalesa.

Au commencement était une dépêche de l’Agence congolaise de presse. datée du 10 mai 2018. Citant une « source qui a requis l’anonymat« , l’ACP rapporte  que le gouvernement provincial du Haut Katanga a transmis la gestion du poste douanier de Kasumbalesa à la DGDA. Sans lancer d’appel d’offres, la haute direction générale de la DGDA, où trônait Déo Rugwisa Magera, décide de concéder la sous-traitance de cet important poste douanier à une nébuleuse société dénommée « Trafigo« . Ceux qui connaissent les moeurs politico-financières de ce pays avaient deviné qu’un « puissant du moment » était derrière ce contrat qualifié de léonin.

Après quelques investigations sommaires, il est apparu que ladite société appartient au « clan Kabila » en général et à « Jaynet » en particulier.

Un mois après l’investiture de Felix Tshisekedi Tshilombo à la tête de l’Etat, un « lanceur d’alerte » vint enfoncer le clou. Dans une correspondance datée du 15 février 2019,  l’homme – qui assure être fonctionnaire à la Banque centrale du Congo – prévient le nouveau chef de l’Etat de la « baisse continue » des recettes fiscales et douanières dans le Haut Katanga.

D’après lui, l’explication de cette situation est à rechercher dans la décision de la DGDA de confier une importante partie de ses activités à la société « Trafigo ». A qui appartient cette entreprise privée? Le « lanceur d’alerte » écrit, sans fioritures, que cette dernière est la propriété de « Jaynet « Kabila« . Et de préciser: « A Kasumbalesa, Trafigo de Madame Jaynet Kabila élude chaque mois un montant de 24 millions de dollars des droits des douanes dont elle devrait s’acquitter». On apprend, dans la foulée, que le péage sur la route Kasumbelesa-Lubumbashi est géré par un certain Simon Kong, sujet chinois, pour le compte de… Zoé « Kabila ».

LES VESTIGES DU « SYSTEME KABILA »

Jaynet « Kabila »

Dans son émission « Masolo na député » du 29 juillet 2020, le journaliste et député Eliezer Ntambwe effleure le sujet en signalant la présence à Kasumbalesa non seulement de « Trafigo SPRL » mais aussi de « Pacific Trading« . « A qui appartient Trafigo« , s’interroge-t-il. Après, silence radio.

Le 10 août 2020, c’est le tour du très agité député national Daniel Safu de prendre position sur le même dossier. Contre toute attente, l’ex-journaliste « engagé » surprend le grand public en enfilant la casquette d’un « lobbyiste« . Au cours d’un « point de presse » qu’il a tenu le 6 août, il lance: « Le rôle du député ne consiste pas seulement à charger« . Le rôle du député consiste-t-il à défendre les intérêts d’un particulier à fortiori ceux d’une entreprise commerciale?

En fouillant sur la toile, l’auteur de ces lignes découvre une proximité indéniable non seulement entre Pacific Trading SPRL et l’inénarrable « Congo Futur » mais aussi avec la sulfureuse BGFI Bank dirigée à l’époque par Francis Selemani Mtwale, un « cousin » à l’ex-président « Joseph Kabila« . Une certaine Magali Raway Kayitesi, concubine d’un général disparu récemment, serait la gérante de Trafigo.

Des observateurs avertis ont compris que les propriétaires de Trafigo SPRL et Pacific Trading ont « embauché » quelques « lobbyistes » dans le cadre d’une campagne de communication. Mission: faire l’éloge du « partenariat » DGDA-Trafigo. Personne n’est dupe. On espère que le ministre des Finances, Nicolas Kazadi Kadima-Nzuji, comprendra également que l’augmentation des recettes douanières et fiscales dans le Haut Katanga restera chimérique. Et ce aussi longtemps que les autorités compétentes vont se complaire à regarder ailleurs pour ne pas voir quelques « vestiges » du « système Kabila« .

B.A.W.

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